Le pouvoir sucrant (PS) d’une molécule est défini par comparaison avec une solution connue de saccharose⁽ⁱ⁾ (sucre de table) de concentration massique généralement égale à 30 g par litre et à 20 °C et servant de référence. Il est calculé par le rapport entre la concentration massique de saccharose et la concentration massique nécessaire de cette molécule pour obtenir la même perception d'intensité du goût sucré, à la même température. Cette évaluation de la saveur sucrée se fait en laboratoire d'analyse sensorielle.

On distingue 2 types d’édulcorants :

• les polyols⁽ⁱⁱ⁾ édulcorants dits « de charge » ou « massiques » et de faible valeur calorique. 

  Ils sont présents naturellement dans de nombreux fruits et légumes comme les baies de sorbier (d’où le nom de sorbitol), l’écorce de bouleau (xylitol) ou les champignons mais ils peuvent être aussi synthétisés.

  Quelques exemples de polyols sont présentés dans le tableau ci-dessous. Il montre que les polyols ont un pouvoir sucrant voisin de celui du saccharose ou sucre de table. Les quantités utilisées sont proches de celles du sucre (d’où le nom « édulcorant de charge ou massique »). Ils apportent pour la plupart moitié moins de calories que le sucre et ne donnent pas de caries. Les polyols n’induisent pas d’augmentation de la glycémie (taux de glucose dans le sang) ce qui est important en cas de diabète.

  Nom (iii)	Pouvoir sucrant PS	Indice glycémique (iv)	kcal/g	Numéro
  mannitol	0,5	0	1,6	E421
  xylitol	1,0	7-15	2,4	E967
  sorbitol	0,6	9	2,6	E420
  érythritol	0,7	0	0,2	E968
  saccharose (référence)	1	75	4

  Ces propriétés justifient qu’ils soient utilisés dans les confiseries, les chewing-gums « sans sucre », les dentifrices (ils apportent un goût frais en bouche par leur chaleur de dissolution négative) ainsi que dans d’autres produits alimentaires. Cependant ils sont peu digestibles et fermentent dans le gros intestin. Une consommation importante entraîne des flatulences, ballonnements et diarrhées. À la suite de nombreuses évaluations de sécurité, les experts du Comité mixte FAO/OMS ont conclu que les polyols étaient sûrs pour la santé humaine.

• Les édulcorants intenses (3)

  Ce sont par exemple la saccharine E954, l’aspartame E951, l’acésulfame K E950, le sel d’aspartame-acésulfame E962, les cyclamates E952, le sucralose E955, la thaumatine E957, le néotame E961, les rébaudiodides ou stéviol E960 a/b/d, etc.

  Ce sont des substances très diverses du point de vue chimique. Elles peuvent être obtenues de différentes manières, soit par extraction de plantes (les glycosides de stéviol, extrait du Stevia rebaudiana ou la thaumatine, extrait du fruit du katemfe), soit par voie synthétique (l’aspartame, la saccharine). Elles ont en commun de présenter un pouvoir sucrant très élevé, de plusieurs dizaines et même milliers de fois supérieur à celui du sucre de table. Ainsi le pouvoir sucrant de l’acésulfame K est 150 fois supérieur à celui du saccharose, celui de l’aspartame 200 fois, 600 fois pour le sucralose E955 et jusqu’à 7000 à 13000 pour le néotame. Cela permet de les utiliser en très faible quantité. Ces substances, en général très peu caloriques, ont donc été considérées comme très utiles dans un régime hypocalorique, dans un régime de maintien de poids ou pour les personnes diabétiques pour lesquelles la consommation de saccharose est déconseillée. Qu’en est-il ?

Édulcorants et sécurité alimentaire

Comme tous les additifs alimentaires, les édulcorants intenses sont soumis à une évaluation de l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation, de l’Environnement et du Travail (ANSES) en France et de l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) (4) (5) (6). L’évaluation repose sur les données toxicologiques publiées. On définit une dose journalière admissible (DJA) qui correspond à la dose de l’additif alimentaire qui peut être consommée quotidiennement toute une vie sans causer de problème de santé.

La consommation des édulcorants intenses a donné lieu à de nombreuses controverses, en particulier parce qu’un grand nombre d’études sur leur toxicité sont en partie financées par l’industrie agro-alimentaire.

Le cas de l’aspartame est exemplaire. C’est une molécule utilisée dans plus de 6000 produits alimentaires et boissons et dans environ 600 médicaments. Depuis sa découverte en 1965, l’aspartame (voir fig. 1), un dipeptide composé de l’acide L-aspartique et de l’ester méthylique de la L-phénylalanine (C₁₄H₁₈N₂O₅), 200 fois plus sucré que le saccharose, avec la même teneur en calories par unité de poids, fait l’objet de polémiques.

Figure 1 : formule de l’aspartame
 

Une étude italienne de 2010, menée sur des souris, a conclu à une augmentation du risque de cancer. Un autre article suggère une relation chez les femmes enceintes entre l’absorption de boissons sucrées à l’aspartame et un risque accru d’accouchement prématuré. Une réévaluation approfondie des données scientifiques des effets de l’aspartame et de ses produits de dégradation chez l’animal et chez l’homme a été conduite en 2013 par EFSA. Elle conclut que la DJA de 40 mg/kg de poids corporel par jour était sûre pour la population en général. Par contre il doit être évité pour les personnes souffrant de phénylcétonurie, maladie génétique due à un défaut de phénylalanine hydroxylase.

Les travaux menés par l’ANSES en 2015 n’ont montré aucun bénéfice de la consommation d’édulcorants intenses sur le contrôle du poids, ni sur la glycémie chez les sujets diabétiques. En effet, on soupçonne que la consommation de produits contenant des édulcorants maintient l’habitude de consommer des aliments sucrés et que les produits dits « allégés en sucre » entraînent une surconsommation. Les scientifiques de l’EFSA réévaluent actuellement la sécurité de tous les édulcorants dont l’utilisation dans les aliments a été autorisée avant le 20 janvier 2009.

D’autre part, la revue internationale de nutrition humaine, Nutrients (7), a recensé en 2023 l’ensemble des risques potentiels sur la santé liés à l’aspartame : effets neurologiques, cytotoxiques, cancers, effets sur la grossesse.

En conclusion, les données actuelles semblent indiquer que les édulcorants intenses soient sûrs aux doses recommandées. Néanmoins, dans le contexte de politique nutritionnelle où l’un des objectifs prioritaires est la réduction des apports en sucre, il est préférable de limiter la consommation d’aliments qui en contiennent, de limiter aussi la consommation de produits contenant des édulcorants et de privilégier les aliments peu transformés, les fruits, les légumes et les céréales complètes comme sources de glucides.

(i) Formule du saccharose : C₁₂H₂₂O₁₁

(ii) Un polyol ou polyalcool est un composé organique comportant un certain nombre de groupes hydroxyles –OH

(iii) Formules chimiques de ces édulcorants : mannitol C₆H₁₄O₆, xylitol C₅H₁₂O₅, sorbitol C₆H₁₄O₆, érythritol C₄H₁₀O₄.

(iv) L’indice glycémique, IG, permet de classer les aliments en fonction du pic de sucre qu'ils provoquent dans le sang. Pour en savoir plus sur l’Index Glycémique, consulter Indice glycémique sur le site Wikipedia et L’index glycémique, c’est quoi ? sur le site France Assos Santé.

(v) Édulcorants intenses : pas d’intérêt nutritionnel démontré pour les usages alimentaires ANSES 2015

Pour en savoir plus

(1) Les additifs alimentaires, quiz Mediachimie

(2) Le goût : de la molécule à la saveur, L. Briand, Colloque La chimie et les sens, Fondation de la maison de la chimie (2017)

(3) Les édulcorants intenses sur le site de l’ANSES

(4) Édulcorants sur le site de EFSA

(5) Les édulcorants sont-ils sans danger ? sur le site Santé.fr, Le Service Public d’information en santé

(6) Remplacer le sucre : l’édulcorant idéal existe-t-il ?, E. Barets et A. Lebrun, vidéo finaliste du Grand Prix des Jeunes Journalistes de la Chimie 2025

(7) Aspartame Safety as a Food Sweetener and Related Health Hazards, S.A.A. Shaher, D. F. Mihailescu, B.Amuzescu, Nutrients (2023) 15(16):3627.

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