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Moins de chimie = plus de pénurie
Rubrique(s) : Éditorial

Près d’un Français sur quatre s’est vu répondre par son pharmacien « désolé, pour votre médicament nous sommes en rupture de stock » ou « désolé, votre médicament n’est plus fabriqué ». Rien qu’en France sur les traitements jugés essentiels on est passé de 44 signalements de pénuries en 2008 à 871 en 2018, près de vingt fois plus ! Quelles sont les raisons de cette évolution qui menace la santé publique (1) ?
Elles sont multiples. La première raison est la décomposition et la délocalisation de la chaine de fabrication des médicaments (2). Une part croissante de la production des principes actifs est délocalisée dans les pays où la main d’œuvre est moins coûteuse et les normes environnementales moins contraignantes, comme la Chine et l’Inde. Cette part est passée de 20% à 80% entre les années 90 et 2018. La deuxième étape, le mélange avec les excipients, est souvent faite en Amérique du Nord et enfin la présentation en gélules et l’emballage en Europe (3). Comme tout ce processus se fait en flux tendu par mesure d’économie, le moindre incident sur une chaine peut bloquer une usine sur plusieurs semaines . Par ailleurs, les agences du médicament nationales ou européennes, soucieuses de la protection des consommateurs, durcissent les normes de fabrication et de traçabilité des composants chimiques, ce qui amène parfois à ne plus importer tel générique de ces pays asiatiques dont la fabrication a été jugée trop opaque.
Bien que la pénurie frappe la France mais aussi la Belgique, le Royaume Uni, l’Italie, des experts pointent du doigt l’attitude de certains grossistes européens revendeurs de médicaments. Ils les accusent de faire passer en dernier la France où les prix des médicaments sont les plus bas, imposés par convention avec la sécurité sociale, et dont les remboursements sont sous surveillance à cause d’un budget qui souvent explose ! Par exemple les prix en France sont inférieurs de 20% à ceux pratiqués en Allemagne N’oublions pas non plus que les entreprises pharmacochimiques ne sont pas des bienfaitrices ; la concurrence internationale et la financiarisation de la profession exigent des investissements que les actionnaires souhaitent rémunérer. C’est ainsi qu’elles abandonnent progressivement la production de génériques trop bon marché et non rentables au profit de molécules nouvelles, susceptibles d’apporter des bénéfices, et de médicaments innovants parfois vendus à des prix exorbitants.
Alors, quels remèdes ? La relocalisation en Europe : c’est ce que font en France les 86 PME (petites et moyennes entreprises, entre 50 et 250 salariés) et ETI (établissements de taille intermédiaire, entre 250 et 5000 salariés) de la chimie, producteurs sous-traitants de principes actifs (4) en insistant sur l’aspect qualitatif et transparent des fabrications malgré un coût salarial et une exigence environnementale plus élevés. Ces entreprises bénéficient d’un très bon positionnement des compétences et d’un chiffre d’affaires en progression qui devrait encore s’améliorer en développant les médicaments issus des biotechnologies, médicaments qui manquent encore trop à leur catalogue (5).
Il n’y a pas que la santé qui souffre de causes de pénurie par manque de chimie. La guerre quasi idéologique que se livrent le Japon et la Corée du Sud pourrait avoir des répercussions en Europe. Le Japon a jeté l’embargo pour la Corée sur les résines photosensibles, les films minces de polyamide et… l’acide fluorhydrique. Ces composés représentent entre 60 et 80% des importations de deux géants de l’électronique Samsung et LG. Cela handicape fortement le gravage des micro-circuits (6) intégrés (résines de photogravure), le nettoyage des circuits silicium (HF) et la fabrication des Oled pour téléviseurs plans et smartphones (polyimides).C’est l’électronique grand public mondiale qui risque de tousser si d’autres approvisionnements ne sont pas trouvés. Or ni l’Europe ni la France ne sont capables à court terme d’y remédier. La chimie de base (fluor) et la chimie de spécialité (résines et polyimides) (7) n’y sont pas développées, en raison d’un marché intérieur insuffisant et des normes réglementaires.
Cela impacte également la transition écologique, actuellement très médiatisée, dont les objectifs sont menacés faute de chimie des matériaux. On oublie que l’objectif zéro carbone en 2030 ou 2050 sera très gourmand en matériaux de haute technologie. Pour les milliards de cellules photovoltaïque (8), on n’est pas inquiet pour le silicium abondant, mais plutôt pour le cuivre, le tungstène et l’argent. Les millions d’éoliennes et de véhicules électriques vont consommer des millions de tonnes d’aimants riches en néodyme et dysprosium (l’éolienne de General Electric de 12 MW annoncée pour 2021 comporte une tonne d’aimant au néodyme - aimant NdFeB). Les véhicules électriques seront aussi bourrés d’aimants et les batteries exigeront des millions de tonnes de Cu, Co, Ni et Li. L’Agence internationale de l’énergie estime qu’il faudra multiplier par 10 la production, la transformation et le recyclage de ces matières premières, avec toujours l’épée de Damoclès d’un éventuel quota chinois.
Militons pour l’implantation en France de la « Megafactory » l’Airbus des batteries et du complexe des aimants à base de terres rares, nous avons chez nous les meilleurs spécialistes mondiaux en électrochimie et magnétisme et le leader mondial de la séparation des terres rares. Re-industrialisons l’hexagone,, implantons de nouvelles usines chimiques propres, nous créerons de la valeur ajoutée nationale et de l’emploi et nous sauverons peut-être la planète.
Jean-Claude Bernier et Catherine Vialle
Octobre 2019
Pour en savoir plus sur Mediachimie.org :
(1) La chimie dans la vie quotidienne : au service de la santé (Chimie et… junior)
(2) Les chimistes dans l’industrie pharmaceutique
(3) De la conception du médicament à son développement : l’indispensable chimie
(4) La fabrication d’un principe actif (vidéo)
(5) Bioraffinerie et biologie de synthèse
(6) La chimie au cœur des (nano)transistors
(7) Les chimistes dans l’aventure des nouveaux matériaux
(8) Les panneaux solaires (animation)
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Un Nobel de chimie populaire
Rubrique(s) : Éditorial

L’Académie suédoise vient de couronner les inventeurs des batteries ion-lithium (1). Voilà un prix Nobel de chimie qui va parler à tout le monde. Les utilisateurs de téléphones portables, de tablettes et d’ordinateurs, les conducteurs de véhicules hybrides et d’automobiles électriques se servent tous les jours de ces réservoirs de puissance électrique (2).
Ce sont trois chimistes qui ont permis il y a maintenant plus de trente ans la découverte, puis l’amélioration et enfin la commercialisation de ces batteries.
Stanley Whittingham, chercheur britannique, dirige l’institut des matériaux de l’université de Binghamton de l’État de New York. Il fut le premier à créer une cathode en sulfure de titane TiS2 dans une pile utilisant un sel de lithium, dans les années 1970.
John Goodenough, américain, est professeur de science des matériaux à l’université d’Austin au Texas. Il suggéra dans les années 1980 l’utilisation, à la cathode, d’oxydes mixtes de type LiCoO2 et ses dérivés Li(CONi)O2, Li(CoNiMn)O2. Il inventa également une nouvelle cathode Li FePO4.
Akira Yoshino, japonais, est professeur à l’université Meijo et membre de l’Asahi Kasei Corporation. Il est à l’origine de la commercialisation dans les années 1990 de ces batteries avec maintenant la forme cylindrique (D=1,8 H = 6,5cm) norme 18650, fabriquée à des milliards d’exemplaires.
Dans ces batteries, à la cathode, le lithium perd un électron qui passe dans le circuit extérieur et l’ion lithium Li+, issu de la cathode, rejoint l’anode en graphite à travers l’électrolyte. Avec la généralisation des objets portables et connectés, smartphones, tablettes, ordinateurs, outils, véhicules électriques, ce sont plus de 100 000 tonnes de lithium qui sont actuellement en usage dans les batteries ion-lithium. Les « mégafactories » construites ou en projet font craindre des cours élevés du carbonate de lithium et des métaux comme le cobalt ou le nickel (3). C’est dire l’incroyable succès de cette invention qui a mis vingt ans à se mettre au point avant commercialisation et moins de trente ans à devenir indispensable à notre quotidien.
Tous les chimistes du solide, les électrochimistes et spécialistes des matériaux se réjouissent de ce prix Nobel cher à leur discipline, spécialement en France où John Goodenough venait souvent discuter et faire des séminaires. Sa dernière venue en France, à 95 ans, lors de la journée hommage à Bordeaux le 26 mars 2018 à son grand ami le professeur Paul Hagenmuller, nous a permis de le rencontrer et de réécouter son rire légendaire et communicatif. Notons également que la communauté Française à Amiens, Bordeaux et Nantes est très active sur ce sujet et reconnue internationalement, sans oublier Michel Armand qui fut aussi l’un des novateurs sur ce sujet dans les années 1975.
Jean-Claude Bernier
Pour en savoir plus sur Mediachimie :
(1) Meilleurs matériaux pour batteries à ions Li. L’approche déductive et intuitive du chimiste (conférence vidéo)
(2) Le transport ou le stockage de l’énergie électrique (Chimie… et junior)
(3) Et si le cobalt manquait… quel serait l’avenir des véhicules électriques ?
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La vinification
Rubrique(s) : Zoom sur...

Retrouvez dans un Zoom sur... la vinification les processus, associés aux différentes étapes d’obtention d’un vin : fermentation, nature, inoculation et croissance des levures, importance du facteur température, rôle de l’aération, causes des arrêts de fermentation. Des données économiques chiffrées complètent de document.
Une fiche Réaction en un clin d'oeil : De la vigne au verre : tout un art ? vous donnera un éclairage historique sur la vinification.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération.
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Quiz Fête de la science 2019
Rubrique(s) : Événements

Dans le cadre de la Fête de la science, Mediachimie.org vous propose de rentrer dans le monde souvent surprenant et parfois magique de la chimie, de ses interfaces et de ses applications, au travers d’un quiz ludique et instructif.
La participation est close depuis le 5 novembre 18 h.
La correction du quiz est disponible en ligne.
Lots : Une tablette et 4 power banks.
Le vin est source de croyances profanes ou sacrées. Les Égyptiens l’auraient produit il y a 7 000 ans. Des peintures murales et des jarres trouvées dans les tombeaux l’attestent. Le vin est présent dans la région de Bordeaux depuis plus de 2 000 ans. […]
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération.
Les processus, associés aux différentes étapes d’obtention d’un vin, sont expliqués : fermentation, nature, inoculation et croissance des levures, importance du facteur température, rôle de l’aération, causes des arrêts de fermentation. Des données économiques chiffrées complètent de document.
Il a fallu attendre Louis Pasteur (1822-1895) pour comprendre le processus de la fermentation jusqu’alors auréolé de mystère. Pasteur a compris que la fermentation est déclenchée par un « microbe spécifique », un microorganisme, et que le vin « tournait » à cause de « microbes indésirables ».
La « pasteurisation » à 57 °C permettait de conserver le vin et de le transporter ; procédé généralement abandonné de nos jours. Pasteur est le père de l’œnologie scientifique.
La fermentation utilise des levures qui sont des organismes vivants ; il en existe un très grand nombre. Leur sélection fait partie de l’art de la vinification.
Le processus de la fermentation alcoolique (du moût de raisin)
Pasteur déamontra que la fermentation alcoolique est produite par des micro-organismes, levures qu’il observa au microscope, et que d’autres substances sont formées : acide lactique, glycérol, acétaldéhyde…
Les levures tirent leur énergie de deux phénomènes biochimiques.
En aérobiose (en présence d’oxygène), c’est la respiration :
En anaérobiose (en l’absence d’oxygène), c’est la fermentation
Les sucres du jus de raisin (glucose et fructose) sont transformés en éthanol (ou alcool éthylique) et gaz carbonique (bouillonnement des cuves de vinification). La fermentation alcoolique comprend une trentaine de réactions intermédiaires, mettant en jeu des enzymes et formant des produits secondaires (glycérol, acide succinique…). En cas d’ajout de sucre, le saccharose, celui-ci est transformé, par des enzymes, en glucose et fructose (sucres fermentescibles), ce qui augmente la teneur finale en alcool. Cette chaptalisation éventuelle est réglementée.
Nature des levures
Lors de la fermentation alcoolique, 90 % des souches sont représentées par une levure elliptique (Saccharomyces ellipsoideus ou cerevisiae) et une levure apiculée (Kloeckera apiculata). En fin de fermentation, on voit apparaître la levure Saccharomyces bayanus.
Dans le moût en fermentation, se trouvent aussi des levures de maladies : levures du genre Candida provoquant une oxydation ; levures du genre Brettanomyces produisant des éthyl-phénols qui donnent une odeur animale dans le vin fini.
Des travaux de recherche ont montré l’existence de levures non Saccharomyces (genres Hanseniaspora et Kloechera) accentuant la libération de précurseurs d’arômes. Récemment, des souches de levures ont été identifiées en analysant leur ADN mitochondrial.
Inoculation de levures
Pratique ancienne, le pied de cuve consiste à préparer un levain, à l’avance, avec des raisins choisis ou du moût. Cela est utile pour les premières cuves chargées, lors des vendanges. Actuellement, l’inoculation par un levain industriel sélectionné est recommandée ; le vinificateur utilise alors des levures sèches actives (LSA).
Croissance des levures
Le départ de la fermentation du moût de raisin par Saccharomyces cerevisiae nécessite un million de levures par millilitre. La croissance des ferments est maximale au bout du cinquième jour ; puis on observe une phase de déclin des levures viables. La cinétique de la fermentation est liée au cycle de croissance des levures. La vitesse de la transformation du sucre est maximale pendant une dizaine de jours.
En moyenne, pour 1 litre de moût, 109 levures ajoutées consomment 17 grammes de sucre et produisent 10 mL d’alcool éthylique.
Besoins nutritifs des levures et facteurs de survie
L’azote ammoniacal est le premier aliment azoté consommé par les levures. Avant le départ de la fermentation, le vinificateur ajoute donc dans la cuve, du sulfate d’ammonium (NH4)2SO4.
Pour leur croissance, les levures ont besoin d’autres substances, notamment de vitamines. Dans les moûts issus de raisins botrytisés (attaqués par le champignon Botrytis, provoquant une pourriture), on ajoute de la thiamine (vitamine B1).
D’autre part, les écorces de levures (enveloppes cellulaires) ajoutées en vinification, se comportent comme des facteurs de survie ; elles maintiennent plus longtemps l’activité de la population levurienne.
Influence de la température
Les levures ne se développent bien que de 15 °C à 30 °C. La vitesse de la fermentation s’accroît avec la température, mais la population des levures est plus faible à température élevée. Pour la vinification en rouge, la température critique (risque d’arrêt de fermentation) se situe de 30 à 35 °C ; mais, pour avoir une bonne extraction des composés phénoliques (anthocyanes et tanins présents dans la peau des raisins), la température doit être assez élevée (28 à 30 °C). Pour favoriser la qualité des arômes, la vinification en blanc et rosé doit être conduite entre 18 et 20 °C.
La fermentation dégage beaucoup de chaleur ; par exemple 400 kJ pour 1 kg de glucose. La régulation de la température est donc indispensable.
De nos jours, les températures des cuves de vinification sont maîtrisées avec des boîtiers automatiques reliées à des groupes produisant du froid ou du chaud (pompes à chaleur). Le coefficient d’échange thermique le plus favorable est pour l’acier inoxydable.
Influence de l’aération
Les levures ont besoin d’air pour se multiplier et pour synthétiser des stérols (protecteur des membranes cellulaires des levures).
Lors de la vinification en rouge, l’oxygénation du moût est pratiquée au bout du deuxième jour de fermentation, en pratiquant un remontage (faire couler du moût par un robinet du bas de la cuve dans un cuveau ; le moût aéré est remonté, avec une pompe, sur le chapeau de marc). Les effets du remontage sont multiples : aération ; homogénéisation ; répartition des levures ; accentuation de la macération. En moyenne, le vinificateur pratique deux à trois remontages (un tiers ou la moitié de la cuve, chaque fois).
Pour apporter de l’oxygène aux levures, on peut aussi utiliser le micro-bullage.
Les arrêts de fermentation
L’éthanol produit par la fermentation a un effet antiseptique sur la levure.
Les arrêts prématurés sont dangereux car les bactéries lactiques peuvent dégrader l’acide malique mais aussi les sucres en produisant de l’acide acétique (acidité volatile importante).
Certains acides gras ainsi que des résidus de pesticides ont aussi un effet inhibiteur. On sait aussi que le développement de Botrytis cinerea rend la fermentation plus difficile.
Les causes des arrêts sont multiples : température de fermentation trop élevée ; grande richesse en sucres ; manque d’aération ; levurage insuffisant ; choc thermique ; carence azotée du moût ; inhibition des levures ; moût blanc trop débourbé (ou clarifié ; concerne les vins blancs et rosés)…
Relancer une fermentation arrêtée est souvent une opération difficile. Il faut alors soutirer la cuve et ajouter des levures du commerce. On peut aussi ajouter des lies d’une cuve qui a fini sa fermentation.
Actuellement, avec le réchauffement climatique, les jus des cépages merlot mais plus surprenant de cabernet sauvignon et même de cabernet franc ont des teneurs naturelles élevées en sucres, dépassant parfois 15 % en vol. d’alcool « potentiel » (c’est-à-dire en éthanol qui serait produit si tout les sucres étaient transformés en alcool).
Cependant, les progrès de la technologie du vin (levures sélectionnées entre autres) permettent de mieux prévenir les arrêts de fermentation, mais des teneurs élevées en éthanol ne sont pas systématiquement recherchées car l’« équilibre » gustatif n’est plus assuré. C’est donc plutôt une désalcoolisation ou une réduction de la teneur en sucre qui est actuellement recherchée faisant suite au réchauffement climatique qui affecte sérieusement la viticulture.
Les ions sulfites (SO32-) et le dioxyde de soufre (SO2) ont des propriétés antiseptiques et antioxydantes. Des ajouts peuvent avoir lieu à différentes étapes de la vinification et varient selon le type de vin (rouge, blanc sec ou doux…). Ils empêchent entre autres, la formation de vinaigre par les bactéries acétiques.
Dans un vin commercialisé, les teneurs en dioxyde de soufre et sulfites (« SO2, total ») ne doivent pas dépasser des limites maximales autorisées par l’Union européenne. Les moyennes en France sont nettement inférieures à celles-ci. L'utilisation de dioxyde de soufre dans les vins « bio » n’est pas absente et est aussi réglementée.
Authentification des vins
On sait analyser les mille composés du vin ! Méthodes isotopiques, RMN permettent au vigneron de suivre la qualité de son produit. Ce commerce est l’objet de fraudes les plus invraisemblables. Contenu, contenant (verre), bouchon, étiquette, bois du fût font l’objet d’analyses spécifiques. Les méthodes de traçabilité deviennent de plus en plus sophistiquées ; code barre, QRCode, RFID …permettent de déterminer l’historique de la bouteille du chai au consommateur. Ce dernier devient de plus en plus exigeant ; de la vigne au verre il veut savoir comment la vigne a été traitée, quel a été le processus de fabrication. Les concepts bien connus de développement durable s’appliquent maintenant à cette industrie.
Les vins et spiritueux en quelques chiffres
La France est le second producteur de vin au monde derrière l’Italie avec de l’ordre de 36 millions d’hectolitres mais le premier au point de vue chiffre d’affaires. Le commerce des vins et spiritueux en France s’élève à environ 15 milliards d’euros (moitié vins, un quart Champagne) dont la moitié à l’export. C’est donc une activité considérable qui fait vivre 55 000 viticulteurs et vignerons.
L’OIV, Organisation Internationale de la vigne et du vin, a son siège à Paris
Cette organisation intergouvernementale à caractère scientifique, fondée en 1924, regroupe 47 pays représentant environ 80 % de la production mondiale, estimée à 240 millions d’hectolitres pour un chiffre d’affaire de l’ordre de 64 milliards d’euros. Son domaine d’action s’étend de la vigne au vin et aux produits issus de la vigne (raisin de table, raisins secs…).
Sont inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO
- huit villages de la Juridiction de Saint-Émilion, au titre de leur « paysage culturel » ;
- les Climats du vignoble de Bourgogne ;
- les Coteaux, Maisons et Caves de Champagne.
La seule Chaire UNESCO au monde portant sur les thématiques de la vigne et du vin, « Culture et Traditions du Vin », est hébergée à l’Université de Bourgogne dans l’Institut « Jules Guyot ».
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération.
Pour approfondir et illustrer ce sujet :
De la vigne au verre, tout un art ? Réaction en un clin d’œil de Bernard Médina, Jacques Gaye et Jean-Pierre Dal Pont
Traité d’œnologie (tome I : Maturation du raisin ; Fermentation alcoolique ; Vinification) de Jean Ribéreau-Gayon et Émile Peynaud (Dunod, 1969).
Traité d’œnologie (tome I : Microbiologie du vin ; Vinifications) de Pascal Ribéreau-Gayon, Denis Dubourdieu, Bernard Donèche et Aline Lonvaud (Dunod, 2017)
Connaissance et travail du vin de Émile Peynaud et Jacques Blouin (Dunod, 2012).
L’histoire de l’œnologie à Bordeaux, de Louis Pasteur à nos jours de Pascal Ribéreau-Gayon (Dunod, 2011)
Du sol au goût du vin de Serge Lécolier, Chimie Paris n°336 (2012) pp. 6-8
In vitrum veritas, vidéo sur une méthode de datation du vin, sans prélèvement (CNRS images, 2009)
Vous découvrirez pourquoi un corps peut apparaître coloré et quel est le lien entre la couleur d'un composé et la structure des molécules organiques qui le composent, à partir d’une jolie expérience sur un jus de tomate dont le déroulé, les conditions et l’interprétation vous sont présentés.
Un petit rappel de sécurité : ne reproduisez pas seul cette expérience et ne buvez pas le jus de tomate après l’expérience.
Cette vidéo peut être utilisée au lycée ou dans l’enseignement supérieur selon le niveau d’interprétation.
Pour les établissements scolaires ne disposant pas d’eau de brome, on peut reproduire l’expérience en utilisant à la place un mélange bromure/bromate que l’on acidifie.
Le protocole est le suivant (fourni par Xavier Bataille) : introduire dans l’éprouvette 90 mg de KBr, 20 mg de KBrO3, 3 mL d'H2SO4 (environ 3,5 mol/L), puis verser délicatement le jus de tomate. La solution aqueuse est très dense et reste au fond. Le dibrome est libéré in situ et piégé dans le jus de tomate. L’arc en ciel apparait petit à petit.
Nettoyage au thiosulfate (décimolaire ou molaire) obligatoire à la fin.
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Fête de la science à Saint-Véran
Rubrique(s) : Événements

La Maison du Soleil de Saint-Véran participe comme chaque année à la Fête de la science, les 11 et 12 octobre 2019.
Cette année, le thème choisi est celui des énergies renouvelables.
Le samedi 12 octobre à partir de 14 heures, l'entreprise Pragma Industries viendra spécialement de Biarritz présenter son vélo à hydrogène, le premier vélo à assistance électrique intégrant une pile à combustible et un stockage d'hydrogène.
Rendez-vous à la Maison du Soleil au pied des pistes de Saint-Véran.
Renseignements sur www.saintveran-maisondusoleil.com
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Un gaz pas très marrant
Rubrique(s) : Éditorial

Il y a pas mal de curiosités en chimie, les oxydes d’azote (1) en montrent une belle collection. Le monoxyde NO a une activité biologique importante et bénéfique pour notre corps, notamment dans la neurotransmission. Le dioxyde d’azote NO2 est beaucoup moins sympathique, il est caractérisé par des vapeurs rousses, irritantes et toxiques. Il se forme à haute température au-dessus de 1000°C par réaction entre l’azote et l’oxygène de l’air dans les brûleurs des centrales thermiques ou dans les moteurs à combustion interne (2). Le protoxyde d’azote N2O serait plus amusant car il est connu sous le nom de gaz hilarant. La description de la molécule N2O oscille entre 2 formes : N≡N+-O- et -N=N+=O.
Découvert par Joseph Priestley en 1772, les propriétés euphorisantes du protoxyde d’azote sont trouvées par Humphry Davy 25 ans après (3), mais c’est un dentiste Horace Wells qui découvre en 1844 qu’il peut être utilisé comme anesthésiant. Après quelques échecs en milieu médical, il fallut les études de William T. G. Morton en anesthésie pour que le protoxyde d’azote après le chloroforme soit utilisé en chirurgie après 1846. S’ensuivirent des progrès importants en médecine chirurgicale, la douleur et l’infection étant alors les deux grandes limites de la chirurgie.
C’est en réalité après 1960 puis 1980 que son usage médical s’est répandu et fut réglementé en associant le protoxyde d’azote à l’oxygène, ce qui élimine le risque d’asphyxie. La médecine utilise donc le MEOPA (mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote) depuis l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) en 2001 dans les établissements hospitaliers. L’AFSSAPS (devenue depuis l’ANSM) contrôle et régularise depuis 2010 son utilisation dans les établissements de santé dans le cadre du plan national de la gestion des risques. Pourquoi ? Car comme le disait une publication dans la revue Science « N2O pas de quoi rire ! » (Nitrous oxide: no laughing matter). En effet même si dès le XIXe siècle le protoxyde était utilisé dans les foires pour mettre en joie quelques joyeux lurons, ses propriétés ne sont pas très bénéfiques.
D’abord dans l’atmosphère le protoxyde d’azote est un gaz à effet de serre plus de 250 fois plus absorbant que la même masse de CO2 (4), sa concentration a atteint 330 ppb (parties par milliard) en 2018. Plusieurs articles scientifiques le mettent aussi en cause comme agent destructeur de la couche d’ozone (5) en haute atmosphère. Les principales sources sont l’agriculture avec l’utilisation des engrais azotés et la décomposition du lisier ainsi que l’industrie et les transports, les rejets de ces derniers diminuant, surtout depuis que la dépollution des échappements automobile a fait des progrès (6).
Un nouveau danger qui guette les jeunes adolescents est une nouvelle forme de toxicomanie : le protoxyde d’azote est utilisé sous forme de drogue (7), inhalé pur dans un ballon de baudruche. Il procure un effet euphorisant qui dure environ 5 minutes sans laisser de traces. Cependant une utilisation répétée ou chronique provoque des troubles cardiaques ou neurologiques et des asphyxies ont été signalées. Très peu coûteux, il remplit les cartouches des siphons à chantilly qui sont en vente dans les supermarchés ou sur internet. L’inhalation directe à partir de ces cartouches sous pression peut également provoquer des brûlures et embolies pulmonaires. Un regain de cette mode est constaté depuis 2016/2018 chez les groupes d’étudiants ou d’adolescents. Certains élus, notamment des Hauts de France, souhaitent interdire la vente libre de ces cartouches ménagères.
Pour ma part je souhaiterais que le protoxyde d’azote ne soit pas accessible au grand public mais il pourrait être utilisé à la place du 2-chlorobenzylidène malonitrile (gaz CS) des grenades lacrymogène (8) des forces de l’ordre. Lors des manifestations on assisterait alors à une réconciliation euphorique entre CRS et manifestants au cours d’affrontements sans violences.
Jean-Claude Bernier
Septembre 2019
Pour en savoir plus
(1) Oxydes d'azote, Les produits du jour de la Société chimique de France
(2) La chimie atmosphérique : contexte, récents développements et applications
(3) La découverte des propriétés du gaz hilarant par Humphry Davy (1778 – 1829)
(4) Nom de code : CO2
(5) Chimie, atmosphère, santé et climat, une histoire partagée
(6) La catalyse au service de l'automobile
(7) Outils et techniques de profilage des drogues
(8) Il y a cent ans : la guerre chimique