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Mots-clés : Édouard Grimaux, Léon Lefèvre, glycéraldéhyde, affaire Dreyfus

Léon Lefèvre, auteur d’un magistral Traité des matières colorantes organiques artificielles (1896), et fondateur de la Revue générale des matières colorantes, de la teinture, de l’impression et des apprêts, se forma à la recherche en chimie dans le laboratoire d’Édouard Grimaux (1835-1900).

C’est l’époque où le directeur de laboratoire, de savant admiré et lointain, se mue en « patron » se mêlant aux expérimentations de ses élèves et découvrant en même temps qu’eux les résultats : « il considérait ses élèves, dit Lefèvre, comme des amis, discutait avec eux et, chose rare, acceptait leurs avis et même leurs critiques ».

Au décès de Grimaux, Lefèvre le décrit « ardent à la besogne, il développait une activité prodigieuse partagée par ses collaborateurs. […] Je me rappelle encore sa préoccupation lors de son travail sur l’oxydation de la glycérine (glycérol ou propane-1,2,3-triol) qui lui fit découvrir le premier, un sucre synthétique fermentescible (le glycéraldéhyde, premier terme des aldoses). Le soir nous mettions en fermentation le précieux produit, et il fallait attendre le lendemain pour voir s’il y avait production de gaz carbonique. A sept heures du matin, le « patron » accourait au laboratoire : ô bonheur ! Il y avait plusieurs centimètres cubes de gaz. Toute la journée, ceux qui entrèrent au laboratoire furent salués de ces deux mots : « ça fermente ! » et chacun de rendre visite au tube à fermentation.

Le chimiste Édouard Grimaux (1835-1900) fut successivement pharmacien, médecin, professeur à l’Institut national agronomique et à l’École polytechnique, où, le premier, il introduisit dans ses cours la notation atomique. Sa thèse de médecine, préparée à Sainte-Hermine en Vendée dans sa pharmacie, portait sur le hachisch. Selon Georges Clemenceau (1841-1926), futur homme politique sous la IIIe république, qui était son ami et le voyait quotidiennement, pour mieux connaître son sujet il expérimentait sur lui et notait les effets de différents extraits : « Grimaux se « hachischait » en conscience et y gagnait de terribles maux d’estomac, sans cependant avoir les visions paradisiaques promises dans les livres ». Malgré son désespoir, Clemenceau s’est refusé à contribuer à l’expérimentation qu’il jugeait incompatible avec ses tâches de jeune médecin.

Grimaux est le premier biographe de Lavoisier.

En 1898 il fut l’un des chefs de file des intellectuels engagés en faveur du capitaine Dreyfus dans la crise politique majeure qui a affecté la France entre 1898 et 1900, et l’un des deux premiers vice-présidents de la Ligue des droits de l’homme avec Émile Duclaux (1840-1904), directeur de l’Institut Pasteur.

 

Pour en savoir plus :

  • notice Grimaux, in Itinéraires de chimistes (SCF-EDP Sciences) 2007
  • J. Fournier, Édouard Grimaux Un grand savant vendéen, édité par Les amis du temple protestant de Sainte-Hermine et Histoire et patrimoine du canton de sainte-Hermine, 2012, 46 p.


Édouard Grimaux
photo : A. Gerschel et fils, coll. École polytechnique

Auteur(s) : Josette Fournier
Niveau de lecture : intermédiaire
Nature de la ressource : article