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Mots-clés : éclairage, semiconducteur organique, LED monocouche, spiranne

L’éclairage participe à près de 20 % de la consommation mondiale d’électricité. L’ADEME prévoit une baisse d’environ 50 % de la consommation liée à l’éclairage vers 2030 [1].

Par ailleurs, l’arrêt des ventes des lampes à incandescence d’une part, des lampes et tubes fluorescents et lampes halogènes d’autre part est fixé pour 2023. La période des fêtes de Noël voit chaque année les rues et places de nos villes et villages s’illuminer. L’éclairage est assuré par des diodes électroluminescentes pour diminuer les dépenses dues à la consommation électrique associée.

Une diode électroluminescente (DEL en français ou LED pour Light-Emitting Diode) est un dispositif électronique et optique produisant, sous l’action d’un champ électrique, de la lumière, sans créer de la chaleur contrairement aux lampes à incandescence. Pour qu’il y ait émission de lumière, l’utilisation de semiconducteurs est nécessaire. L’objectif est d’améliorer la conversion de l’énergie électrique en énergie lumineuse. La couleur dépend de la nature chimique du semiconducteur [2a] [2b].

Les premiers résultats de production de lumière rouge ont été obtenus dès 1962 par la General Electric. Les LED ont été utilisées sur des appareils électriques pour indiquer s’ils étaient allumés ou éteints. Mais les puissances étaient très faibles [3].

Ce n’est que dans les années 90 que l’utilisation du nitrure de Gallium (alliage GaN) comme semiconducteur a permis d’obtenir des LED avec en particulier une émission de lumière bleue difficile à obtenir mais essentielle par le mélange des couleurs pour créer la lumière blanche. Cette découverte a permis aux trois chercheurs japonais Isamu Akasaki, Hiroshi Amano et Shi Nakurama de recevoir le Prix Nobel de Physique en 2014 [3]. Les LED éclairent avec une puissance de 1 watt maximum pour un éclairage de 130 lumens bien supérieur aux tubes fluorescents (100 lumens par watt) [4].

Depuis, l’optoélectronique s’est tournée vers les diodes organiques électroluminescentes (OLED en anglais pour Organic Light Emitting Diode). Les OLED utilisent des semiconducteurs organiques. Elles possèdent de nombreux avantages : leur consommation est plus faible que celle des LED classiques et peuvent être fabriquées sur des supports souples permettant notamment leur enroulage (utilisés pour éclairer des décors ou des chantiers de construction par exemple). Elles sont utilisées principalement pour l’affichage électronique : smartphones, tablettes, téléviseurs [5].

Elles sont constituées d’une superposition de couches de matériaux organiques semiconducteurs constitués de polymères insaturés conjugués (c’est-à-dire avec alternance de liaisons simples et doubles dans leurs structures moléculaires) dans laquelle se trouve la couche émissive de lumière (EML pour Emissive Layer). Ces couches sont déposées entre deux électrodes : la cathode est souvent en aluminium et l’anode en oxyde d’indium et d’étain (ITO pour indium tin oxide) qui est déposée sur une couche transparente de verre par exemple. Les charges positives à la cathode et négatives à l’anode se déplacent sous l’action du champ électrique appliqué et se recombinent avec émission de lumière par fluorescence ou depuis 1998 par phosphorescence [6-8].

Si le système multicouche donne de bons rendements le dispositif reste complexe et les fabrications des OLED sont énergivores. Aussi de nombreux travaux de recherche ont été effectués pour obtenir des systèmes monocouches (SL pour Single Layer en anglais) conduisant à des SL-OLED. Récemment des travaux publiés en septembre 2022 par une équipe de recherche du CNRS menée par Cyril Poriel (Directeur de Recherche CNRS) basée à l’Institut des Sciences Chimiques de Rennes ont permis d’obtenir une SL-PhOLED (Ph pour phosphorescence) très efficace (la plus efficace à ce jour !). La couche émissive est ici constituée d’une matrice hôte et d’un émetteur phosphorescent. La matrice joue un rôle primordial et permet de maximiser l’efficacité de l’émission de lumière. Elle est constituée d’une partie riche en électrons et d’une seconde pauvre en électrons reliées entre elles par une structure non plane de type spirannique (les spirannes sont en effet des molécules bien connues au sein du laboratoire rennais !) qui permet une séparation spatiale des charges pour réunir les propriétés souhaitée (figure 1).

 

Figure 1. SL-PhOLED verte utilisant la couche émissive la plus performante de la littérature (2022, EQE > 22 %)
Source : photo reproduite avec autorisation de Lucas. F., Brouillac. C., Fall. S., Zimmerman. N., Tondelier. D., Geffroy. B., Leclerc. N., Heiser T., Lebreton. C., Jacques. E., Quinton. C., Rault-Berthelot. J., Poriel C., Chem. Mater. 2022, 34, 8345 copyright 2022 American Chemical Society.

 

Pour augmenter l’efficacité de l’émission de lumière un émetteur phosphorescent est nécessaire, par exemple un complexe d’iridium pour une émission de lumière verte (voir note) avec une efficacité supérieure à celles obtenues antérieurement [9]. L’objectif ultime est de développer des SL-PhOLED à émission de lumière blanche pour l’éclairage !

La simplification électronique obtenue avec les SL-PhOLED permet un développement prometteur de cette technologie qui s’accompagne aussi d’une production moindre de déchets !

L’auteur remercie très sincèrement Cyril Poriel, pour son aide bienveillante à la rédaction de cette note bibliographique et son autorisation de publier la photo de la diode verte et des structures de la couche émissive (voir la note).

Jean-Pierre Foulon
Mars 2023

Références bibliographiques :
[1] Rapport ADEME 2016
[2a] EnLEDissez-vous !, J.C. Bernier, L’Actualité Chimique N°395 (avril 2015) pp. 9-10
[2b] La lumière électronique : du tube cathodique aux écrans plats, J.C. Bernier, Colloque Chimie et Lumière du 26 février 2020, vidéo et article (Mediachimie.org)
[3] De la lampe à huile aux LED : histoire physico-chimique de l’éclairage artificiel, L. Simonot, Colloque Chimie et Lumière du 26 février 2020, vidéo et article (Mediachimie.org)
[4] Un prix Nobel éclairé, J.C. Bernier, éditorial Mediachimie (octobre 2014)
[5] Chimie, lumière sur les écrans, J. Lefebvre, A. Harari et J.-C. Bernier, fiche Chimie et… en fiches (Mediachimie.org)
[6] Les diodes électroluminescentes organiques : des sources plates de lumière, L. Hirsch, Colloque Chimie et technologies de l’information du 6 novembre 2013, vidéo et article (Mediachimie.org)
[7] Les multiples contributions de la chimie dans la conception des tablettes et des smartphones, J.-C. Flores, Colloque Chimie et technologies de l’information du 6 novembre 2013, vidéo et article (Mediachimie.org)
[8] Un point sur Les nouvelles générations d’OLED phosphorescentes, C. Poriel, L’Actualité Chimique N°454 (septembre 2020) p. 75
[9] Un point Les OLED à couche unique : vers des dispositifs électroniques simplifiés pour la transition écologique, C. Poriel, L’Actualité Chimique N°481 (février 2023) p. 55

 

Crédits : La SL-PhOLED verte : photo reproduite avec autorisation de Lucas. F., Brouillac. C., Fall. S., Zimmerman. N., Tondelier. D., Geffroy. B., Leclerc. N., Heiser T., Lebreton. C., Jacques. E., Quinton. C., Rault-Berthelot. J., Poriel C., Chem. Mater. 2022, 34, 8345 copyright 2022 American Chemical Society.
 


 

Auteur(s) : Jean-Pierre Foulon
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