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Qu'entend-on par biochar ?

Biochar est un mot résultant de la contraction en anglais de « biocharcoal » qui désigne un charbon d’origine végétale. Le biochar est proposé pour l’amendement des sols afin d’en augmenter les qualités et les rendements
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Biochar est un mot résultant de la contraction en anglais de « biocharcoal » qui désigne un charbon d’origine végétale.

Le biochar est proposé pour l’amendement des sols afin d’en augmenter les qualités et les rendements des productions agricoles.

Le biochar est issu de la biomasse provenant de déchets de bois formulés sous forme de pellets et non issue de la coupe de bois, ce qui évite les déforestations provoquées pour l’obtention traditionnelle du charbon de bois.

Le biochar est produit par pyrolyse de ces déchets, procédé qui consiste en un chauffage modéré entre 250°C et 650°C en l’absence de dioxygène. Il en résulte la production de produits gazeux (méthane et dihydrogène utilisables comme combustibles) mais aussi des produits liquides (hydrocarbures à usage de biocarburant) et d’un composé solide noir qui est le biochar. C’est un procédé sans émission de CO2, qui a été mis au point depuis une douzaine d’années à la suite des travaux de l’équipe Lehmann de l’Université Cornell à Ithaca dans l’état de New York.

La pyrolyse lente vers 350°C conduit à une formation à 35 % de biochar et 10 % de gaz (i). Ainsi il faut presque 4 tonnes de déchets de bois à 75 % de matière sèche pour produire 1 tonne de biochar avec une pureté pouvant atteindre 90 %, qui dans ce cas est appelé le biochar premium.

L’entreprise Pronatura a mis au point une technologie permettant aux machines actuelles de fonctionner 7 jours sur 7 et 24h sur 24 et de produire de 1 à 5 tonnes de biochar par jour. Le rendement (masse de biochar / masse de la biomasse à 15 % humidité) peut atteindre 45 %.

La porosité du biochar obtenu lui confère une surface spécifique (ii) de 420 m2/g qui conduit à de grandes capacités d’adsorption : c’est en quelque sorte un réservoir qui peut stocker jusqu’à deux fois et demie son volume en eau ! Quand la plante a besoin d’eau, pendant les périodes de sécheresse, elle ira la chercher dans ce que le biochar a stocké. Par ailleurs le biochar, en présence d’eau, donne un pH basique (entre 7 et 10) ce qui peut permettre de rééquilibrer l’acidité des sols.

Les effets de l’utilisation du biochar sur les augmentations de rendement concernant les cultures dans les zones tropicales comme celles des zones tempérées sont considérables : tomates +177 %, coton +100 %, maïs +150 %, blé +170 % par exemple !

Des startups sont actives sur ce secteur, en particulier « NetZero » cofondée par le climatologue Jean Jouzel.

La société Terra Fertilis à Argentan, dans l’Orne, est la seule entreprise en France à bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché délivrée par l’ANSES : plusieurs villes en achètent pour leurs espaces verts, tout comme des pépiniéristes ainsi que des maraîchers et de nombreuses coopératives agricoles qui manifestent de plus en plus d’intérêt pour la culture du maïs et de la betterave.

Mais le biochar est aussi une solution pour la séquestration à long terme du carbone : une tonne de biochar stocke jusqu’à 3 tonnes de CO2. Actuellement le prix de revient du biochar varie entre 500 et 1000 € la tonne. La valorisation en crédits carbone peut alors être estimée à 300 € /ha. Ceci montre que l’intérêt économique dépend essentiellement du montant des crédits carbone (actuellement fixé à 40 € la tonne de carbone).

Les perspectives de l’utilisation du biochar sont nombreuses en dehors de l’agriculture. Par exemple les producteurs de silicium remplacent le charbon par du biochar dans la réduction industrielle de la silice, SiO2 + C = Si + CO2, ce qui conduit à un bilan carbone neutre car le carbone du biochar provient du bois.

Enfin, la Société Soler qui a deux usines dans l’Aube et une autre en Gironde est le leader en France de la production de biochar avec plus de 50 000 tonnes dans un marché national de 130 000 tonnes.

Il ne faut pas confondre le biochar avec le noir de carbone qui sert actuellement essentiellement à l’industrie des pneumatiques.

Et ne broyez pas du noir !

Jean-Pierre Foulon et l’équipe question du mois

 

(i) Il s’agit de pourcentage en masse.
(ii) La surface spécifique d’un matériau traduit sa capacité à fixer à l’échelle microscopique des molécules à sa surface. Exprimée en m²/g, c’est la surface disponible par unité de masse du matériau.

 

Pour en savoir plus :
Site Pleinchamp : Tout savoir ou presque sur le biochar (2023)
Site de Pro-Natura International : le biochar est un intrant qui augmente les rendements agricoles de manière écologique en séquestrant du carbone (2019)
Rapport du GIEC (2022) : Mitigation of climative change (chapitre 7)

Pour rappel
Un charbon très tendance, Jean-Claude Bernier, éditorial du 23 mai 2016 (Mediachimie.org)
 

Crédit illustration : Biochar après production, Oregon Department of Forestry FlickR, CC BY 2.0, Wikimedia commons

- Éditorial
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La transition énergétique ne tient qu’à un fil : les réseaux électriques

Le dernier rapport de l’agence Internationale de l’Energie (AIE) attire notre attention sur le problème des réseaux électriques (1) qui sans nouveaux investissements et développements de réseaux intelligents vont bloquer
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Le dernier rapport de l’agence Internationale de l’Energie (AIE) attire notre attention sur le problème des réseaux électriques (1) qui sans nouveaux investissements et développements de réseaux intelligents vont bloquer les transitions énergétiques. En effet, les transitions énergétiques en Europe et dans le monde s’appuient entre autres sur une électrification bas carbone. L’électricité va remplacer le gaz, elle va propulser les voitures particulières et les camions, les projets hydrogène vont multiplier les électrolyseurs, les champs d’éoliennes off-shore en mer et les fermes photovoltaïques dans les déserts exigent des liaisons et de longs réseaux fiables et intelligents (2).

Il existe au niveau mondial 80 millions de kilomètres de lignes dont 7% pour le transport longue distance (THT 400 kV et HT 225 kV)* et 93% pour la distribution (MT 15 à 30 kV et BT 400 et 240 V)* au total cela représente plus de 100 allers -retours terre – lune ! Pour la France on identifie environ 100 000 km de lignes HT et environ 580 000 km de lignes MT et 650 000 km de lignes BT dont à peu près 213 000 km souterraines.
La transition énergétique va augmenter l’électrification bas carbone du chauffage, de l’industrie, du transport (3). Dans la consommation finale d’énergie mondiale, l’électricité qui représentait 21% en 2022, devrait monter jusqu’à 35% en 2050. D’où le risque de ne pouvoir faire face à ces progressions si on ne peut relier par un conducteur la production d’électricité au consommateur. L’Allemagne s’est trouvée dans ce cas où sa production éolienne basée prioritairement dans le nord ne pouvait être acheminée dans les zones de consommation du sud. On peut ajouter que, dans les pays européens où la densité de population est plutôt forte, l’implantation d’une ligne haute tension (225 kV) peut prendre 6 à 12 ans pour obtenir les permis et être construite. C’est bien plus rapide en Chine et en Inde.

Les conducteurs

L’AIE estime vital de construire et rénover environ 80 millions de kilomètres de réseau, c’est-à-dire l’équivalent du réseau actuel qui serait doublé d’ici 2040. C’est demander le doublement des investissements actuels et aussi des ressources en matériaux.

En effet, quels sont les matériaux nécessaires pour acheminer l’électricité de la centrale à votre prise de courant ? Les grands spécialistes des câbles font appel à deux bons conducteurs : le cuivre Cu de conductivité ρ  = 59 106 S.m-1 l’Aluminium Al ρ = 37 106 S.m-1. L’aluminium est moins bon conducteur mais il est plus léger d=2,7 que le cuivre d= 8,9 et d’autre part les prix sont nettement différents 8 €/kg pour le cuivre et 2 €/kg pour l’aluminium. C’est pourquoi les alliages d’aluminium comportant comme additifs Mg et Si, parfois renforcés acier, sont utilisés pour les lignes aériennes HT, dites de transport, alors que le cuivre est plus utilisé pour les lignes basse tension (BT) dites de distribution et les lignes enterrées ou sous-marines (4).

Y aura-t-il suffisamment de métaux pour conduire cette (r)évolution ?

Le calcul est complexe : plus la tension est forte moins la section du câble est grande pour une puissance délivrée et donc le poids de conducteur par kilomètre est plus faible (5).

Pour le transport en haute tension par voie aérienne en fil d’aluminium il faut : 11 kg/Mw/km alors que pour la distribution en basse tension il faut 65 kg/Mw/km. Pour des conducteurs en cuivre il faut entre 101 kg/Mw/km et 438 kg/Mw/km suivant le transport ou la distribution de l’électricité. Une extrapolation sur les 88 millions de km de lignes à doubler dont 7% pour le transport et 93% pour la distribution donne respectivement 62 000 tonnes et 4,86 Mt d’aluminium et si la moitié de la distribution en basse tension est faite avec le cuivre il en faut 16,3 Mt.

Rappelons que les productions mondiales sont 67 Mt pour Al et 26 Mt pour le Cu. Pour la France on compte 100 000 km de lignes haute tension gérée par RTE, 586 000 km de moyenne tension (15-30 kV) et 650 000 km de basse tension (400 et 230 V) dont 230 000 km enterrées gérées par EDF. L’estimation des besoins en conducteur conduit à environ 40 000 tonnes d’Al et 286 000 tonnes de Cu s’il fallait doubler le réseau. Notons que dans l’infrastructure d’un réseau il y a aussi les pylônes (6) qui supportent le poids des lignes, ils sont environ 100 000. Ils peuvent atteindre 90 mètres en acier avec une dizaine d’isolateurs en céramique pour la THT. Ils relient entre eux les nœuds de connexion et surtout les postes de transformateurs HT /BT qui comportent des tonnes d’acier spéciaux fer silicium (3%) à grains orientés et à forte perméabilité magnétique, leur nombre est d’environ 4000 en France. D’ailleurs Enedis envisage de doubler ses investissements à 5,5 Mrds € par an comme RTE d’ici 2040 approchant des 10 Mrds € annuels pour le réseau électrique, coûts cachés de la transition.

Et la chimie où est-elle ?

Elle est déjà bien présente dans la chimie métallurgique de préparation de l’aluminium et du cuivre de qualités électriques, mais si vous avez déjà épluché un fil électrique vous avez constaté qu’autour de l’âme en cuivre une enveloppe plastique (7) jouait un rôle de protection et d’isolant. On utilise le polyéthylène pour les THT et HT, il peut être réticulé si on cherche une bonne résistance au froid (lignes de montagne). Les copolymères éthylène /propylène sont plus utilisés pour les moyennes et basses tensions. Les couches de caoutchouc et silicones qui ont de très bonnes résistances aux basses et hautes températures sont souvent présentes pour les câbles enterrés ou sous-marins.

Dans les transformateurs, outre les papiers siliconés de l’isolation, on trouve les huiles isolantes qui servent aussi de fluide caloporteur jusqu’aux radiateurs externes pour éliminer la chaleur due aux effets Joule et aux pertes par courants de Foucault. Ces huiles autrefois à base de PCB (polychlorobiphényle) remarquablement stables mais toxiques pour l’environnement ont été remplacées par des huiles mélangeant naphtènes (aromatiques) et alcènes à haut point éclair pour éviter les incendies.

Le prix des conducteurs, des isolants plastiques, des aciers à grains orientés (GO), des pylônes, des moyens de construction a explosé en 10 ans. Alors que les investissements dans les énergies renouvelables ont doublé en 10 ans, ceux en faveur des réseaux électriques sont restés stables. On a augmenté le volume du liquide dans le réservoir mais on n’a pas changé le petit robinet. Faute de prévision et dans un contexte de sous-investissement dans les réseaux s’est créé un goulot d’étranglement et on entre en dépendance du gaz et du charbon à la merci de coupures de courant dont l’impact économique est encore bien plus grand.

Jean-Claude Bernier
novembre 2023

 

*Très Haute Tension THT, Haut Tension HT, MT Moyenne Tension, BT Basse Tension

 

Pour en savoir plus
(1) Electricty grids and secure energy transitions (AIE) Octobre 2023
(2) Réseaux de transport de l’électricité et transition énergétique de S. Henry, article et conférence, Colloque Chimie et enjeux énergétiques, Fondation de la Maison de la chimie (2012)
(3) Le transport ou le stockage de l’énergie électrique, de C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie, l’énergie et le climat, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2014), ISBN : 978-2-7598-2098-6 (2014)
(4) Câble High-Tech en PACA (vidéo, Des Idées plein la tech’) Virtuel / Universcience / Fondation Internationale de la Maison de la Chimie
(5) Les métaux stratégiques pour l’énergie, de B. Goffé, article et conférence, Colloque Chimie et enjeux énergétiques, Fondation de la Maison de la chimie (2012)
(6) Zoom sur quelques aspects de la corrosion des ouvrages d’art, de J.-P. Foulon, Zoom sur… Mediachimie.org
(7) Polymères stratégiques, sensibles pour l’industrie : bioressources, recyclage, quelle stratégie ?, de D. Bortzmeyer, article et conférence, Colloque Chimie et matériaux stratégiques, Fondation de la Maison de la chimie (2022)

 

Crédit illustration : Lignes à haute tension (Sagy, Val d'Oise), France, Spedona/JH Mora, travail personnel / Wikimedia Commons (licence CC BY-SA 3.0)

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Un prix Nobel de Physique avec un petit parfum chimique

Le prix Nobel de Physique 2023 a été décerné à trois chercheurs Anne L’Huillier, franco-suédoise, professeur à l’université de Lund, Pierre Agostini, professeur émérite à l’université d’Ohio et Ferenc Krausz du Max Planck
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Le prix Nobel de Physique 2023 a été décerné à trois chercheurs Anne L’Huillier, franco-suédoise, professeur à l’université de Lund, Pierre Agostini, professeur émérite à l’université d’Ohio et Ferenc Krausz du Max Planck Institute de Garching. Les deux premiers lauréats d’origine française ont démarré leurs recherches au CEA à Saclay. Ils ont ouvert la voie aux spectroscopies ultrarapides pour traquer les électrons et les molécules (1) lors de réactions chimiques. Ils ont pratiquement réussi à traquer les électrons par arrêt sur image lors d’un « flash » d’une durée ultra courte de l’ordre d’une attoseconde qui est d’un milliardième de milliardième de seconde (10-18 s). Lorsque l’on sait que la vitesse des électrons libres autour du noyau de l’atome est proche de la vitesse de la lumière soit 300.000 km/s (3.105 km/s) soit 3.1011 mm/s ou encore 3.1017 nm/s, une séquence de 10-18 s permet donc de « photographier » un électron avec une résolution de moins d’un nanomètre. Nous avons tous vu les images qui décomposent le saut d’un danseur étoile lors d’un ballet, c’est une succession de photos prises par une caméra à défilement rapide d’environ un millième de seconde.

Peut-on faire la même chose pour décrire le parcours d’un électron ?

Les prix Nobel répondent oui à condition d’avoir un flash tous les 10-18 secondes. Ce fut la découverte en 1988 par Anne L’Huillier d’opérer avec un laser au xénon (2) et de constater qu’il va émettre de la lumière sous forme « de génération d’harmoniques d’ordre élevé » très courtes, c’est-à-dire des émissions faibles de très hautes fréquences. C’est Pierre Agostini qui trouva le moyen de produire et de mesurer ces impulsions laser ultra courtes au Laboratoire d’Optique Appliquée du CEA en 2001. Les mesures donnaient alors un temps de 250 attosecondes à ces impulsions. Ferenc Krausz à Vienne, à cette même époque, mesura aussi quelques centaines d’attosecondes à ces impulsions similaires.

Quelles applications sont alors possibles ?

En observant et en contrôlant la présence d’un électron dans un matériau dans une molécule il serait possible d’en changer son état ou ses propriétés. Déjà fin 2020 des chercheurs de Rennes utilisant un laser rayons X ultra rapide avec des impulsions de la femtoseconde (10-15 s) avaient pu observer un transfert d’électron entre le fer et le cobalt dans une molécule de « bleu de Prusse » mixte (FeCo)4[Fe(CN)6]3 qui en changeait les propriétés magnétiques.

Avec des impulsions mille fois plus courtes la précision de la position de l’électron doit encore être meilleure. On peut aussi avec ces impulsions ultra courtes savoir près de quel atome se trouve l’électron et sans violer le principe d’Heisenberg le transférer sur un autre pour par exemple transformer un diélectrique en semi-conducteur (3). On peut ainsi avec l’imagination rendre plus efficace certaines réactions chimiques ou catalytiques. Cette nouvelle forme de spectroscopie ultra précise pourrait être utilisée pour déceler les prémices d’un cancer sur un échantillon sanguin (4). Elle devrait aussi permettre de mieux étudier l’état électronique de molécules biologiques comme l’ADN.

Cette nouvelle physique des temps ultra courts nous ouvre un domaine encore inexploré celui des mouvements électroniques autour des atomes et des molécules (5) que de nombreux chimistes aimeraient maitriser avec des retombées immenses en recherche fondamentale et appliquée.

Jean-Claude Bernier
octobre 2023

 


Les mouvements des électrons dans les atomes et les molécules sont si rapides qu’ils sont mesurés en attosecondes. Une attoseconde est à une seconde ce qu'une seconde est à l’âge de l’univers. © Johan Jarnestad/The Royal Swedish Academy of Sciences.

 

Pour en savoir plus
(1) L’atome boite à électrons (video, La Physique Autrement)
(2) Nouvelles techniques d’imagerie laser, M. Blanchard-Desce, Colloque La Chimie et la santé, Fondation de la Maison de la chimie (2010)
(3) La chimie à la lumière du laser : un intérêt réciproque, S. Forget, conférence et article, Colloque Chimie et lumière, Fondation de la Maison de la chimie (2020)
(4) Nano-diagnostic (vidéo, Des idées plein la Tech)
(5) Voir l’infiniment petit : les outils pour le nanomonde (vidéo CEA)

 

Crédit : Pierre Agostini, Ferenc Krausz et Anne L'Huillier. Prix Nobel de Physique 2023. Ill. Niklas Elmehed © Nobel Prize Outreach.

 

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Fête de la science 2023

Pour sa 32e édition, du 6 au 16 octobre, la Fête de la science mouille le maillot et s’intéresse aux sports. Organisée chaque année par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, la Fête de la science
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Pour sa 32e édition, du 6 au 16 octobre, la Fête de la science mouille le maillot et s’intéresse aux sports. Organisée chaque année par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, la Fête de la science est devenue un rendez-vous incontournable pour tous les publics. Pendant une dizaine de jours, familles, scolaires, étudiants, amateurs ou passionnés de sciences échangeront lors de milliers d’événements gratuits proposés partout en France.

Rendez-vous sur le site de la Fête de la science

Le thème de cette édition 2023, sciences et sport, s’inscrit dans un cadre sportif dense sur cette année scolaire 2023-2024 : Coupe du monde de rugby 2023, championnat d’Europe de football 2024 et bien sûr les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.

C’est pourquoi Mediachimie.org met à disposition de tous, des ressources en relation avec le sport. Au travers de cette sélection vous allez découvrir et comprendre pourquoi la chimie occupe une place si importante dans le domaine du sport de haut niveau. Visitez la page 2023-2024 : Sports et chimie de Mediachimie.org

Crédit : llustration : Capture écran site fetedelascience.fr

- Éditorial
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Le sport, c’est de la chimie

Cette année la Fête de la science, année préolympique oblige, est consacrée au sport. La Fondation de la Maison de la Chimie et Mediachimie.org ont déjà largement étoffé le sujet. Rappelons le colloque « La Chimie et le
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Cette année la Fête de la science, année préolympique oblige, est consacrée au sport. La Fondation de la Maison de la Chimie et Mediachimie.org ont déjà largement étoffé le sujet. Rappelons le colloque « La Chimie et le sport » de mars 2010 qui va être renouvelé et actualisé par le prochain colloque en février 2024 « Chimie et sports olympiques ». En effet, le sport par ses multiples facettes fait appel à la chimie. C’est d’abord dans notre corps avec tous nos systèmes biologiques, puis dans notre cerveau où des hormones sont libérées, le tout avec une alimentation équilibrée et sans dopage. Mais si les performances s’améliorent c’est aussi grâce aux nouveaux matériaux.

La machine biologique

Quand on a une activité sportive nos muscles ont besoin d’énergie (1) (2). Cette énergie est stockée et transportée dans nos cellules sous forme de molécules d’ATP (adénosine triphosphate) qui par hydrolyse va donner un phosphate inorganique Pi et l’ADP (adénosine diphosphate) avec surtout de l’énergie libérée utilisable par l’organisme. L’ATP nous est fournie à chaque fois que nous respirons par l’oxygène transporté dans nos milliards de cellules et par le glucose ou les acides gras qui viennent de notre alimentation et sont transformés en ATP. Nos muscles sont composés de fibres où se juxtaposent deux types de protéines, l’actine et la myosine. Lorsque le cerveau commande un mouvement, le message acheminé vers le muscle comporte l’ATP mais aussi des ions calcium qui vont agir sur ces deux protéines et commander la contraction ou le relâchement. Pour que notre corps marche bien pour pratiquer un sport retenons qu’il faut de l’oxygène et donc bien respirer et des sucres et des protéines, donc bien s’alimenter.

Le cerveau

Ces molécules ne sont pas seules motrices pour la pratique du sport, il y a aussi des hormones qui sont fabriquées dans le cerveau (3) surtout par deux glandes, l’hypophyse et l’hypothalamus. C’est par exemple l’endorphine qui donne une sensation de bien-être. Notons aussi que pour les grands champions qui dépassent leurs limites les endorphines comme toute morphine a une capacité analgésique qui masque la douleur d’un effort intense (4). Une autre hormone, la dopamine, procure une sensation de plaisir et diminue la fatigue. On voit souvent son action lorsqu’un grand champion a gagné une course : son bonheur efface un peu les séquelles de son effort final. N’oublions pas non plus l’adrénaline que procure toujours un challenge que l’on se donne : elle augmente notre résistance au stress. Enfin une dernière sécrétion, celle de la sérotonine qui a une action sur la détente et le sommeil. Ce sont évidemment des libérations exacerbées par des entrainements intenses de nos grands champion. Mais nous en bénéficions lorsque nous pratiquons à notre niveau (5) un sport, des molécules qui ont des effets bénéfiques sur notre santé mentale et notre santé tout court !

Les matériaux de la performance

Usain Bolt est recordman du 100 m grâce à ses capacités naturelles et à son entrainement, mais aussi grâce aux super-chaussures (6) avec au moins 4 couches : une semelle externe élastique avec des crampons légers, une semelle interne rigide en composite carbone – carbone, une couche de mousse polyester, une tige et un tissu qui maintiennent le pied en PTFE. Les records en demi-fond le doivent aussi aux nouvelles pistes d’athlétisme en polyuréthane disposant en sous-couches de granulés de caoutchouc ménageant de petites poches d’air. La piste absorbe l’énergie mais le renvoie au coureur avec un effet « trampolino ».

Si Armand Duplantis a franchi 6,23 mètres au saut à la perche en septembre, c’est bien sûr dû à ses aptitudes acrobatiques et à son entrainement, mais aussi à sa perche fabriquée en matériau composite (7) avec des fibres de carbone noyées dans des polyesters. S’il avait eu un bambou ou une perche en aluminium il aurait plafonné à 4 ou 5 mètres.

Oui l’entrainement est essentiel mais la chimie des matériaux booste les performances en athlétisme mais aussi en ski, en canoé kayak, en voile et en vélo.

Pour courir il faut de l’essence

Vous avez déjà entendu ces commentaires de reporters sportifs concernant un battu à l’arrivée : « oui il n’avait plus de jus ». En effet il y a a nécessité pour les sports qui demandent un effort de longue durée, vélo, tennis, marathon…, d’avoir une bonne alimentation avant, durant et après l’effort : une bonne hydratation, des protéines légères ou des sucres assimilables rapidement durant l’effort et avant la compétition des sucres lents ou au contraire un aliment hyper protéiné et sans sucres. Eviter les boissons vitaminées et surtout les aliments dits « dopants ». Il y a toujours suivant les disciplines des soupçons de dopages, souvent avec des molécules de médicaments que l’on détourne de leur usage. Heureusement de plus en plus les fédérations internationales augmentent le nombre de substances interdites et les contrôles. La chimie analytique a développé pour cela des moyens de détection.

Bougez, courez, pédalez, sautez, lancez, jouez, vous allez déjouer le stress, vous éloignerez les maladies cardiovasculaires, l’obésité, l’ostéoporose et le « mal de dos ». En un mot vous vivrez mieux !

Octobre 2023
Jean-Claude Bernier

 

Pour en savoir plus
(1) Quelle chimie dans le sport ? épisode 1 : le métabolisme énergétique aérobie (video), R. Blareau, Blablareau au labo / Mediachimie
(2) Quelle chimie dans le sport  ? épisode 2 : les métabolismes énergétiques anaérobies (vidéo), R. Blareau, Blablareau au labo / Mediachimie
(3) Sport et cerveau, C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie dans le sport, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2014), isbn : 978-2-7598-1238-7
(4) La fabrique des champions, C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie dans le sport, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie (2014), isbn : 978-2-7598-1238-7
(5) Effets de l’exercice physique et de l’entrainement sur la neurochimie cérébrale : effets sur la performance et la santé mentale Ch.-Y. Guezennec Colloque La chimie et le sport, Fondation de la Maison de la chimie (2010)
(6) Chimie et pluie des records aux jeux de Tokyo, J.-Cl. Bernier, éditorial Mediachimie.org
(7) Les matériaux dans le sport, (r)évolutionnaires !, P. Bray, O. Garreau et J.C. Bernier, Fiche Chimie et… en fiches Mediachimie.org

 

Crédit : Image par Vectorportal.com, CC BY