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Mots-clés : phosphorescence, fluorescence, photographie, radioactivité, sels d’uranium

La dynastie des Becquerel et leur intérêt pour la phosphorescence

Antoine César Becquerel (1788-1878), fondateur de la dynastie des Becquerel au Muséum, a été nommé professeur titulaire de la chaire de Physique appliquée aux sciences naturelles, à sa création en 1838 à l’initiative de Joseph Gay-Lussac. Au cours d’un voyage à Venise, Antoine César avait observé que la nuit, la mer devenait phosphorescente et il a commencé à s’intéresser à ce phénomène.

Son fils Edmond Becquerel (1820-1891) a succédé à son père comme professeur en 1878. On lui doit la découverte de l’effet photovoltaïque (1839) et la réalisation de la première photographie en couleur représentant le spectre solaire sur plaque argentée (1848). Mais ses recherches ont principalement porté sur les différentes formes de luminescence (*), fluorescence et particulièrement la phosphorescence des sels d’uranium. Pour mesurer la durée de phosphorescence, il a inventé le phosphoroscope (1857), appareil permettant de mesurer le temps qu'il faut à un matériau phosphorescent pour cesser de briller après avoir été excité par de la lumière.

Enfin, Henri Becquerel (1852-1908), fils d’Edmond qui lui a succédé comme professeur en 1892, a porté un intérêt scientifique, entre autres sujets, à la phosphorescence de sels d’uranium. Tous ont été polytechniciens, sauf Edmond reçu à cette Ecole, mais qui a préféré travailler dans le laboratoire de son père. Tous ont été membres de l’Académie des sciences.

La découverte des rayons X par Röntgen et sa présentation par Henri Poincaré à l’Académie

En novembre 1895 Wilhelm Conrad Röntgen, professeur à l’université de Würzburg, découvrit les rayons X alors qu’il faisait fonctionner un tube de Crookes dans l'obscurité. Ayant placé ce tube dans l’obscurité, il observa une fluorescence sur un écran en papier recouvert de platinocyanure de baryum. Il a noté que cette fluorescence accompagne la production des rayons X et que si les rayons X ne sont pas visibles par l’œil, ils impressionnent les plaques photographiques, même protégées par du papier noir.

Peu de temps après, le 20 janvier 1896, Henri Poincaré présenta devant ses collègues de l’Académie des sciences, la découverte de Röntgen et attira l’attention d’Henri Becquerel dont il connaissait l’intérêt pour la phosphorescence des sels d’uranium, lui suggérant de voir si elle ne s’accompagnait pas de l’émission de rayons X.

La découverte des rayons uraniques d’Henri Becquerel

Après plusieurs expériences négatives avec différents corps phosphorescents, Becquerel a utilisé des cristaux de sulfate double d’uranyle et de potassium « qu’il avait préparé une quinzaine d’années avant ». Il les déposa sur une plaque photographique « Lumière » soigneusement enveloppée dans du papier noir pour la protéger de la lumière, puis exposa le dispositif plusieurs heures au soleil.

Ensuite, il développa la plaque et observa qu’elle est impressionnée, malgré sa protection par le papier noir. Il en déduisit que les sels d’uranium émettaient des rayons X après excitation par la lumière du soleil et présenta ce résultat à l’Académie dans une note le 24 février 1896 (1).

Puis, il voulut recommencer l’expérience, mais, pendant plusieurs jours, le soleil ne se montra pas. Dans l’attente de son retour, il rangea le dispositif expérimental dans un tiroir à l’obscurité. Quand le 28 février le soleil revint, il reprit son expérience et prépara un nouveau dispositif. Mais il ne jeta pas le dispositif préparé auparavant, pensant que faute de soleil et donc de phosphorescence, la plaque ne serait pratiquement pas impressionnée. Il la développa normalement, et à sa grande surprise l’impression de la plaque restée dans le noir fut beaucoup plus intense que celle de la première expérience. Il en conclut que le sel d’uranium émettait donc spontanément des rayons pénétrants, qu’il ait été ou non exposé à la lumière du soleil et nomma ce rayonnement « rayons uraniques ». Il présenta ce nouveau résultat à l’Académie le 1er mars 1896 (2). C’était là, la découverte capitale d’Henri Becquerel, celle des « rayons uraniques », fruit du hasard dans un esprit préparé d’un expérimentateur rigoureux.

Pierre Curie et son frère Jacques (**), un autre élève de l’Ecole de Chimie d’Edmond Frémy au Muséum, réalisèrent un appareil (quartz-piézzo électrique) qui permettra de faire des recherches quantitatives sur les substances radioactives, les travaux de Becquerel étant purement qualitatifs. Cette possibilité a permis à Marie Curie de découvrir en 1898 dans la pechblende des substances plus radioactives que l’uranium : le polonium et le radium (3) (4). Le nom de « radioactivité » a été donné au phénomène par Marie Curie.

Pour leurs travaux sur la découverte de la radioactivité, le prix Nobel de physique de 1903 a été décerné à Henri Becquerel, Pierre Curie et Marie Curie.

 


Pierre et Marie Curie dans leur laboratoire parisien, avant 1907

 

Notes
* Les phénomènes de luminescence, fluorescence ou phosphorescence, apparaissent lorsqu’un corps absorbe la lumière visible ou ultraviolette, puis la réémet à une longueur d’onde plus grande (décalée vers la partie rouge du spectre). Les deux phénomènes de phosphorescence et fluorescence sont quasiment identiques. La différence est que le matériau phosphorescent continue d'émettre de la lumière dans le noir même si on arrête de l'éclairer. Après exposition à la lumière un matériau phosphorescent diffuse la lumière dans le noir alors qu’un matériau fluorescent n'émet pas de lumière dans l'obscurité, mais produit une couleur vive si on l'éclaire.

** Pierre Curie et Jacques, âgés de 21 et 25 ans, découvrent en 1880, la piézoélectricité. L’effet piézoélectrique est une propriété de certains cristaux, comme le quartz, d’émettre de petites quantités d’électricité lorsqu’ils sont comprimés ou étirés. En 1885, ils font construire un instrument pour leur laboratoire, qu’ils appellent tout simplement “quartz piézoélectrique”. Cet instrument, permet de faire des mesures quantitatives de la radioactivité d’échantillons. Cet instrument est introduit par Marie et Pierre Curie dès 1898 dans leur méthode de mesure de la radioactivité, appelée aujourd’hui « méthode Curie ». Lors de cette mesure, les deux scientifiques compensent la charge électrique inconnue produite par l’échantillon radioactif, avec la charge électrique connue générée par le quartz. La méthode de compensation leur permet de mesurer, en utilisant un électromètre à quadrant, des courants très faibles, de l’ordre de 10-13 ampères. Ces mesures, très précises, leur permettent de détecter dès 1898, dans les minerais d’uranium, la présence de quantités infimes de deux nouveaux éléments chimiques radioactifs : le polonium et le radium. « Pour mesurer les courants très faibles que l’on peut faire passer dans l’air ionisé par les rayons de l’uranium, j’avais à ma disposition une méthode excellente étudiée et appliquée par Pierre et Jacques Curie. » Marie Curie, Pierre Curie, 1923.

Bibliographie
1 - Henri Becquerel. Sur les radiations émises par phosphorescence. C.R. Acad. Sci. 122 (1896) p. 420-421.
2 - Henri Becquerel. Sur les radiations invisibles émises par les corps phosphorescents. C.R. Acad. Sci. 122 (1896) p. 501-503.
3 - Pierre Curie et Marie Curie, Sur une substance nouvelle radio-active (polonium), contenue dans la pechblende. C.R. Acad. Sci. 127 (1898) p.175-178.
4 - Pierre Curie, Marie Curie et Gustave Bémont, Sur une nouvelle substance fortement radio-active (radium), contenue dans la pechblende. C.R. Acad. Sci. 127 (1898) p. 1215-1217.

 

Illustration : Pierre et Marie Curie dans leur laboratoire parisien, avant 1907. Source : Wikimedia commons

Auteur(s) : Bernard Bodo
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Mots-clés : phosphorescence, fluorescence, photographie, radioactivité, sels d’uranium

La découverte de la radioactivité par Henri Becquerel, Pierre et Marie Curie remonte à plus d’un siècle (1896-1898) et a conduit à leur décerner le prix Nobel de physique en 1903. Toutefois, des énigmes marquent le début de cette découverte.

Quand des élèves de Frémy discutent entre eux

Gabriel Bertrand dans un article publié en 1946 aux Comptes Rendus de l’Académie des Sciences, rapporte une histoire intrigante « Sur l’origine de la découverte de la Radioactivité » lorsqu’il travaillait encore au Muséum (1).

Mais qui était Gabriel Bertrand (1867-1962) ? Après avoir suivi les cours de l’École de chimie d’Edmond Frémy au Muséum, il s'inscrit à l'École supérieure de pharmacie et devient pharmacien en 1894. Il reste au Muséum, d'abord comme préparateur de Léon Maquenne (1889), au laboratoire de Physiologie végétale appliquée à l’agriculture de P.P. Dehérain, et ensuite, à 23 ans il est nommé préparateur à la chaire de Chimie appliquée aux corps organiques dirigée par le professeur Albert Arnaud successeur de Chevreul au Muséum. Puis en 1897, Émile Duclaux, qui avait succédé à Pasteur à la direction de l'Institut Pasteur, l'appelle au poste de chef de service. Gabriel Bertrand soutient sa thèse de doctorat en 1904, sur la biochimie de la bactérie du sorbose, ce qui lui vaut d'être nommé chargé de cours à la Sorbonne en 1905. Titulaire de la chaire de chimie biologique de cette l'université, il restera simultanément chef de service à l'Institut Pasteur.

Dans cet article de 1946 mentionné en préambule, Gabriel Bertrand rapporte un échange qu’il a eu avec Henri Becquerel en 1893 (1) (2). Rappelons que ce dernier a découvert et publié les propriétés des rayons uraniques trois ans plus tard, au début de 1896. Bertrand écrit : « Notre illustre Confrère vint un jour me voir au laboratoire que j’occupais dans la rotonde de l’amphithéâtre du Muséum, à quelques pas de la maison qu’il habitait et du laboratoire où il travaillait (maison de Cuvier). Il me présenta un petit bloc noir que je reconnus immédiatement à son aspect et à sa densité pour de la pechblende. Il avait enfermé dans un tiroir une plaque photographique, enveloppée dans du papier à aiguilles, après avoir posé dessus le morceau de pechblende. Lorsque, après quelques jours, il se servit de la plaque, une grande tache apparut au développement, tache qu’il reconnut de la grandeur et de la forme du morceau de pechblende. Pouvez-vous, ajouta-t-il en terminant, me donner comme chimiste une explication de ce phénomène ?

J’avais eu l’occasion d’étudier la pechblende quelques années avant dans le laboratoire de Frémy et d’en faire une analyse aussi complète que possible. Je répondis à Henri Becquerel que ce minerai était ordinairement très complexe, pouvait contenir des sulfures, que sous l’influence de l’air humide son échantillon avait peut-être dégagé des traces d’hydrogène sulfuré, imperceptibles à l’odorat, mais auquel la couche de gélatino-bromure d’agent était très sensible. Etant donnée la compacité de la pechblende, je ne tenais pas cette explication pour très probable, mais elle n’était pas impossible.

Quelques jours plus tard, H. Becquerel revint me voir et m’informa que mon explication n’était pas exacte mais, ajouta-t-il, j’en ai trouvé une. Je n’eus pas l’indiscrétion de lui demander en quoi elle consistait…. C’est la première observation qui fut faite par Becquerel de la radioactivité (rayons uraniques). L’impression fortuite d’une tache provoquée par la pechblende sur une plaque photographique. A quelle date se situe cette observation mémorable ? Elle est très notablement et même curieusement antérieure aux publications de 1896. Alors Becquerel n’était plus mon voisin. La chaire de chimie avait quitté le grand amphithéâtre et s’était installée au 63 rue Buffon (dans les locaux de l’école de Frémy, puis fermée en 1894). Ce devait être avant la fin de 1893. Mais on ne saura avec certitude ce qui s’est passé dans le laboratoire de physique du Muséum, entre 1893 et 1896 ».

Niépce de Saint-Victor : de la photographie aux rayons invisibles émis par les sels d’uranium ou une énigme peut en cacher une autre

De quelles informations H. Becquerel avait-il connaissance en 1893 ? Connaissait-il les travaux de Niépce de Saint-Victor, cousin de Nicéphore Niépce l’inventeur de la photographie. Ses expériences dans les années 1857-1867 utilisaient la photographie et recherchaient si la lumière pouvait se stocker dans des corps, autrement que par la phosphorescence ou la fluorescence (*). Niépce de Saint-Victor avait observé, par ce qu’il nommait une « photographie de l’invisible », qu’il ne s’agissait pas d’une phosphorescence, mais d’un rayonnement invisible ne traversant pas le verre. Niépce exposait à la lumière solaire une feuille de carton imprégnée d’une solution de sel d’urane formant un dessin, après insolation il l’appliquait sur une feuille de papier sensible et disposait le tout dans un tube métallique bouché, à l’obscurité. Le dessin se reproduisait en impressionnant le papier sensible. Bref, il avait observé un rayonnement particulier de l’uranium et ses observations avaient été transmises à l’Académie des Sciences par Eugène Chevreul.

En 1861, Niépce avait remarqué que le carton conservé à l’obscurité est encore actif six mois après son insolation. Une substance très efficace pour ces expériences était une solution aqueuse d’acétate d’uranium dont il imprégnait la feuille de papier. Cette activité à distance n’était donc pas due à la phosphorescence. Les travaux décrits dans les mémoires de Niépce de Saint-Victor sur la lumière, ses causes et ses effets étaient connus d’Edmond Becquerel. Il avait également remarqué que ce ne pouvait être dû à un phénomène de phosphorescence, dont la durée n’est pas aussi longue.

Niépce de Saint-Victor avait-il découvert l’activité des rayons uraniques avant Henri Becquerel ? Ce n’est pas clair, mais les Becquerel connaissaient très vraisemblablement les travaux de Niépce. Paul et Josette Fournier (3) ont bien mis en évidence la complexité des filiations pour aboutir à la découverte de la radioactivité, en particulier dans les recherches sur la photographie et la luminescence* qui préoccupaient physiciens et chimistes dans la deuxième moitié du XIXe siècle.


Photographie de Henri Becquerel par Paul Nadar

 

Note
* Les phénomènes de luminescence, fluorescence ou phosphorescence, apparaissent lorsqu’un corps absorbe la lumière visible ou ultraviolette, puis la réémet à une longueur d’onde plus grande (décalée vers la partie rouge du spectre). Les deux phénomènes de phosphorescence et fluorescence sont quasiment identiques. La différence est que le matériau phosphorescent continue d'émettre de la lumière dans le noir même si on arrête de l'éclairer. Après exposition à la lumière un matériau phosphorescent diffuse la lumière dans le noir alors qu’un matériau fluorescent n'émet pas de lumière dans l'obscurité, mais produit une couleur vive si on l'éclaire.

Bibliographie
1 - Gabriel Bertrand. Sur l’origine de la découverte de la Radioactivité. C.R. Acad. Sci., 223 (1946) p. 698-700.
2 - Michel Genet. La découverte des rayons uraniques : un petit pas pour Henri Becquerel, mais un grand pas pour la science. L’Actualité chimique, n° 220 (1998) p. 34-41.
3 - Paul Fournier et Josette Fournier. Hasard ou mémoire dans la découverte de la radioactivité. Rev. Hist. Sci., 52 (1999) p. 51-79. - Paul Fournier et Josette Fournier. Découverte de la radioactivité. Mediachimie.org. Petites histoires de la chimie.

Illustration : Photographie de Henri Becquerel par Paul Nadar / Adam Cuerden, Wikimedia Commons. Source de l'image : gallica.bnf.fr / BnF
 

Auteur(s) : Bernard Bodo
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Mots-clés : luminol, fluorescéine, UV, émission de lumière, bioluminescence, investigation policière, sang

Modes opératoires, liste produits et matériels ; conseils et notions à développer, explications.

Les modes opératoires proposés permettent de mettre en évidence l’interaction lumière matière et tout particulièrement l’excitation de molécules par l’absorption du rayonnement UV puis l’émission de lumière colorée par ces mêmes molécules lors de la désactivation.

Objets de ces 3 expériences

Acquis préalables et notions générales à faire comprendre au cours des expériences

Rappeler que la lumière blanche est composée de lumières colorées et présenter un spectre obtenu par décomposition de la lumière blanche.


Spectre de la lumière visible

Rappeler que la lumière blanche est la superposition intégrale de toutes ces lumières (synthèse additive).

Observer que lorsqu’on va du rouge vers le bleu on va vers des rayonnements de plus en plus énergétiques.
Les UV sont des rayonnements de forte énergie (juste à gauche du violet sur le graphe) mais invisibles à nos yeux (ils nous paraissent incolores).

Faire comprendre la notion de niveau d’énergie et d’excitation des molécules puis de retour à un état plus stable.
Accompagner éventuellement le discours d’une représentation graphique des niveaux d'énergie.

Faire comprendre que s’il y a émission de lumière colorée par une molécule cela diffère de la couleur des objets qui nous entourent, qui elle résulte de l’absorption d’une partie de la lumière blanche provenant du soleil (absorption sélective ou synthèse soustractive).

Faire observer que le phénomène de fluorescence n'est observable que durant l'exposition à une source d’énergie (UV ou libération d’énergie provoquée par une réaction chimique) et que cela cesse dès qu'on arrête l'excitation.

 

Expérience 1 - Émission de lumière colorée par une molécule fluorescente soumise aux UV

Matériel

  • 2 récipients au choix (éprouvette, bécher de 150 ou 200 mL, fiole jaugée ….) le plus photogénique !
  • 1 lampe UV 365 nm

Produits

  • Fluorescéine : en faire une solution bien jaune
  • Schweppes® tonic (seul le tonic contient de la quinine)
  • Papier blanc
  • Surligneurs « fluos » de diverses couleurs

Mode opératoire

  • Introduire dans le récipient choisi la solution de fluorescéine. Observer la couleur jaune à la lumière du jour (cette couleur jaune résulte de l’absorption sélective du bleu par la fluorescéine).
  • Éclairer par la lampe UV et observer la lumière verte « flashie » (ou vert brillant) qui apparait sous UV et disparait sans UV.
  • Insister ici sur le fait qu'il y a émission de lumière par la molécule (c’est ce qui donne l’aspect brillant).
  • Puis arrêter les UV et retrouver la couleur jaune mat (sans émission de lumière).
  • Faire de même avec du Schweppes® tonic. On observe une lumière bleue.
  • Faire de même avec papier blanc. On observe une lumière bleue.
  • Faire de même avec des encres de surligneurs préalablement étalées sur un papier.

Explications à adapter selon le public, élèves de lycée ou grand public

La fluorescéine est une molécule qui présente en son sein des électrons qui peuvent acquérir de l’énergie, cad monter à un niveau supérieur instable. Les électrons sont dits dans un état excité et tendent à revenir à un état stable. Lors de ce retour à l’état stable, ils émettent de l’énergie sous forme lumineuse. Ici il s’agit de la lumière verte.

Ce phénomène s’arrête si on éteint la lampe UV. Ce phénomène est appelé fluorescence. Et la fluorescéine est dite une molécule fluorescente.

On peut proposer un résumé du type :


Source : Le laboratoire des couleurs – Anne Guillerand - BUP vol. 104 ( Déc. 2010)

 

Avec du Schweppes® on observe une lumière brillante bleue sous UV. Elle est dû à la molécule fluorescente de quinine présente dans le Schweppes®.


formule de la quinine

Avec du papier blanc

Pourquoi observe-t-on que le papier blanc émet du bleu quand on l’éclaire par la lampe UV  ?

Dans la composition du papier il a été ajouté des produits fluorescents dits azurants (comme l’azur : bleu).

Pour faire un lien avec la vie de tous les jours, on trouve aussi ces additifs dans les lessives pour améliorer la sensation de blanc des tissus (« plus blanc que blanc » comme disent certaines publicités ou comme le caricaturait Coluche). Cette impression est due au fait que la lumière du soleil contient aussi des UV qui excitent les électrons des azurants.

C’est le même effet que l’on observe avec les chemises blanches dans les boites de nuits où l’on danse en lumière dite noire (qui sont en réalité des UV proches du visible).

Le phénomène est le même avec les traces de surligneurs qui ont été étalées sur du papier. Leur encre visible et résistante à la lumière sans pour autant masquer le texte lui-même,contient des agents fluorescents.

On peut citer d’autres composés fluorescents connus :

  • Nombreux minéraux : fluorites (à l’origine du nom de la propriété), quartz, topaze…
  • Monde végétal et vivant : chlorophylle, certains champignons, scorpions…
  • Produit pharmaceutique : éosine
  • Tubes d’éclairage fluorescents
  • Utilisation de cette propriété dans l'art,  aussi bien dans des peintures utilisant des  pigments fluorescents que pour analyser les constituants des couches supérieures de peintures
  • Utilisation pour certains diagnostics médicaux

 

Expérience 2 - Chimiluminescence : émission de lumière provoquée par une réaction chimique réalisée avec le luminol

Matériel

  • 1 balance au 1/100e avec capsules plastiques pour pesées + spatules
  • 2 grandes éprouvettes de 500 mL
  • 1 très grande éprouvette de 1000 mL
  • 2 éprouvettes de 5 mL ou pipettes graduées de 5 mL
  • 1 pipette graduée de 3 mL ou 5 mL
  • 1 propipette
  • 1 cristallisoir

Produits

  • luminol 0,1 g (le nom du luminol en nomenclature est la 5-amino-1,2,3,4-tétrahydrophtalazine-1,4-dione)
  • solution d’hydroxyde de sodium NaOH (soude) à 10% 5 mL
  • eau distillée (1 L)
  • ferricyanure de potassium (ou (hexacyanoferrate(III) de potassium) solide 1,5 g
  • eau oxygénée (ou solution aqueuse de peroxyde d’hydrogène) à 30% (3 mL)

Mode opératoire

  • Préparer sous hotte devant le public ou avoir préparé à l’avance (sauf l’ajout de l’eau oxygénée qui doit se faire au dernier moment)
  • Éprouvette A (ou fiole jaugée A facile à boucher si réalisée à l’avance) : dissoudre 0,1 g de luminol dans 400 mL d’eau et ajouter 5 mL de soude à 10%.
  • Éprouvette ou fiole jaugée B : dissoudre 1,5 g de ferricyanure de potassium dans 400 mL d’eau. Ajouter à la dernière minute 3 mL d’eau oxygénée à 30%
  • Rendre sombre la pièce, verser simultanément le contenu des 2 éprouvettes A et B dans un grand entonnoir déposé sur la grande éprouvette à pied : il se produit une magnifique lumière bleue !

On peut aussi dans l’éprouvette B ne mettre que l’eau et l’eau oxygénée et le mode opératoire est alors le suivant.

Introduire quelques cristaux de ferricyanure de potassium solide dans la grande éprouvette où aura lieu l’expérience. Rendre sombre la pièce, verser simultanément le contenu des 2 éprouvettes A et B via un grand entonnoir dans la grande éprouvette à pied : il se produit une magnifique lumière bleue !

Notions à développer sous forme de commentaires et à adapter selon le public pendant la démonstration

Présentation préalable des produits présents dans les éprouvettes :

Éprouvette B :
L’eau oxygénée : que tout le monde connait et a dans sa pharmacie ; mais ici elle est beaucoup plus concentrée. C’est un produit très réactif et oxydant, surtout si elle est concentrée.
Le ferricyanure est un composé contenant du fer à l’état oxydé [Fe (III)] C’est ici un catalyseur c’est à dire un produit qui va accélérer la réaction que l’on veut observer.

Éprouvette A :
La soude : elle créé un milieu basique propice à la réaction (on peut dire que tout le monde connait la soude soit sous ce nom soit sous forme de Destop par exemple et en a dans sa cuisine sous les lavabos !! ce qu’il ne faut pas faire pour protéger les enfants !!!).
Le luminol est une molécule complexe fragile en présence d’oxydant telle que l’eau oxygénée.

Si le public est un peu plus averti on peut ajouter que la fragilité concerne une partie seulement de la molécule, là où il y a 2 atomes d’azote liés entre eux. On peut aussi montrer le dessin de la molécule ou un modèle moléculaire et montrer les 2 atomes d’azote concernés.


formule du luminol

Explications

Quand les 4 produits sont mis en contact, le luminol et l’eau oxygénée en milieu basique, en présence de ferricynanure de potassium (comme catalyseur) réagissent vivement (ce qui libère une forte énergie) et il se forme du diazote, de l’eau et un di-anion aminophtalate dérivé du luminol, dans un état excité. Cet état résulte de l’énergie libérée par la réaction. Puis ce di-anion se désactive et émet une lumière bleue. La réaction chimique a ainsi créé de l’énergie que l’on observe sous forme lumineuse.

On peut proposer un résumé du type :


Source : Le laboratoire des couleurs – Anne Guillerand - BUP vol. 104 ( Déc. 2010)

Exemples dans la vie courante

  • Cette expérience est réalisée par la police scientifique pour rechercher des traces de sang. En effet l’hémoglobine du sang contient du fer à l’état oxydé Fe(II) qui en présence de l’eau oxygénée passe à l’état de Fer(III) qui joue alors le rôle de catalyseur (à la place du ferricyanure que nous avons utilisé). Ce procédé a été repris dans un certain nombre de séries TV policières !
  • Dans le monde animal, tout le monde a eu l’occasion de voir, lors de promenades nocturnes, des vers luisants ou des lucioles émettre des petites lumières jaunes à verdâtre. Cette lumière résulte d’une réaction chimique, propre à l’animal, dans le corps de la luciole. On parle aussi de bioluminescence. Ces émissions de lumière permettent aux couples de se trouver pour assurer la reproduction.
  • Certains planctons et phytoplanctons sont aussi bioluminescents. Ce processus pouvant à la fois servir selon l’espèce pour le camouflage, l’attraction sexuelle, mais aussi la répulsion ou la communication.

Si on est en présence d’un public un peu plus averti, on peut préciser que dans les réactions de bioluminescence observées dans divers organismes vivants, le composé chimique à l'origine de la luminescence est presque toujours la luciférine. Celle-ci émet de la lumière en subissant une oxydation par le dioxygène grâce à l'intervention d’une enzyme, la luciférase qui joue le rôle de catalyseur.


formule de la luciférine

 

Expérience 3 - Expérience combinée de chimiluminescence et de fluorescence réalisée avec du luminol et de la fluorescéine

  • Même matériel et mêmes produits qu’en 2 + solution de fluorescéine ou fluorescéine en poudre.
  • Même mode opératoire qu’en 2, mais ajouter dans la solution A initiale de la fluorescéine en poudre ou en solution, de manière à obtenir une solution bien jaune.
  • On peut sans doute utiliser pour cette derrière expérience les produits en quantités divisées par 2.
  • Observer alors une lumière verte

Explications

La même réaction chimique du luminol et de l’eau oxygénée conduit au di-anion qui en se désactivant excite la molécule de fluorescéine. Celle-ci en se désactivant à son tour donne la couleur verte qu’elle émettait sous UV (rappel de la 1ère expérience).

Cela peut avoir lieu avec tout autre molécule fluorescente ajoutée. On obtiendra l’émission de la couleur caractéristique de la molécule ajoutée.

Exemples dans la vie courante

Les bâtons lumineux festifs que l’on peut acheter lors de concerts ou fêtes et que l’on doit casser délicatement. Lors de la fracture du petit tube de verre intérieur, qui séparait les produits, les réactifs sont mis en contact et il se produit une réaction comparable à celle que nous venons d’observer, avec l’eau oxygénée, le luminol et la fluorescéine.
Il y a différentes couleurs selon les réactifs fluorescents introduits dans chacun des bâtons.
Le phénomène s’arrête quand tous les produits chimiques contenus dans le bâton ont été consommés.

 

Illustration : Capture d'écran vidéo Fluorescence © Mediachimie/Blablareau au labo

Auteur(s) : Francoise Brénon
Source : luminol, fluorescéine, UV, émission de lumière, bioluminescence, investigation policière, sang,
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Le colloque « Chimie, recyclage et économie circulaire » qui a eu lieu le 8 novembre 2023 au sein de la Fondation de la Maison de la Chimie, a mis en lumière certains enjeux du recyclage des matériaux dont les progrès à réaliser dans la  collecte des déchets mais aussi les objets usagés et la nécessité de sans cesse innover pour améliorer les procédés existants.

Tout cela s’inscrit dans la transition écologique nécessaire pour évoluer vers un nouveau modèle économique et social qui apporte une solution globale et pérenne aux grands enjeux environnementaux de notre siècle et aux menaces climatiques qui pèsent sur notre planète. La chimie est bien entendu très sollicitée pour y parvenir.

Dans ce dossier, après avoir défini les contours de l’économie circulaire, nous aborderons le recyclage de quelques familles de matériaux.

Chimie, recyclage et economie circulaire

  • Terminale générale, spécialité physique-chimie — Partie « Constitution et transformations de la matière » — 3. A et C : Prévoir l’état final d’un système, siège d’une transformation chimique — 4. Élaborer des stratégies en synthèse organique
  • Première STI2D et terminale STI2D, programmes de physique-chimie et mathématiques —Partie « Matière et matériaux » / Oxydo-réduction
  • Terminale STL, programmes de physique-chimie et mathématiques — Partie « Constitution de la matière » / Réactions d’oxydo-réduction
Auteur(s) : Éric Bausson
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Suite au tragique incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris le 15 avril 2019, un vaste chantier de rénovation a vu le jour, avec pour objectif ambitieux de reconstruire le monument à l’identique. Quatre ans et demi plus tard, et à un an de sa réouverture au public prévue le 8 décembre 2024, la charpente est achevée et la flèche qui vient tout juste d’être posée culmine à nouveau à 96 mètres de haut. Si le public se réjouit de voir la cathédrale renaître de ses cendres, la prochaine étape de reconstruction de la toiture ravive néanmoins des inquiétudes suite au choix de garder le plomb comme matériau de couverture. En effet, lors de l’incendie, plusieurs centaines de tonnes de ce métal à la toxicité avérée sont parties en fumée et se sont dispersées dans l’atmosphère parisienne.

Comment peut-on mesurer l’impact de l’incendie de Notre-Dame sur la pollution au plomb à Paris ?

Parties des programmes de physique-chimie associées

  • Radioactivité et datation
  • Terminale, spécialité physique-chimie — Thème « modéliser l’évolution temporelle d’un système, siège d’une transformation » partie B
  • Première, enseignement scientifique — Thème « Une longue histoire de la matière »
  • Terminale, spécialité SVT — Thème « À la recherche du passé géologique de notre planète »
Auteur(s) : Sandrine Steydli
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Mots-clés : énergie nucléaire, Goldhaber, Planck, Einstein, Rutherford, Chadwick, neutrino, spin

Maurice Goldhaber meurt le 11 mai 2011 à Setanket-East Setauket dans le comté de Suffolk situé dans l’état de New York à plus de cent ans puisqu’il était né le 18 avril 1911 à Lemberg dans l’Empire austro-hongrois. Cette ville est, de nos jours, en Ukraine et porte le nom de Lviv.

Après la première guerre mondiale, la famille s’installe à Chemnitz dans l'est de l'Allemagne. À Chemnitz, Maurice Goldhaber fréquente le lycée. Il apprend le latin, le français et l’anglais en plus des matières scientifiques. Il obtient l’abitur, équivalent du baccalauréat, en 1930 et décide d’entreprendre des études de physique à Berlin.

À cette époque, de nombreux physiciens de renom enseignent à Berlin comme Max Planck (1858-1947), Albert Einstein (1879-1955), Max von Laue (1879-1960), Walther Nernst (1864-1941), Erwin Schrödinger (1887-1961), Otto Hahn (1879-1968) et Lise Meitner (1878-1968). Il reste trois ans à l’université à Berlin et trouve le cours de Lise Meitner sur la physique nucléaire très stimulant. C’est dans le cours de von Laue qu’il rencontre Gertrude Scharff (1911-1998) qui deviendra son épouse.

En 1933, avec les recommandations d'Erwin Schrödinger et de Max von Laue, il est accepté par Ernest Rutherford (1871-1937) comme étudiant au laboratoire Cavendish. Ce laboratoire est le département de physique de l’Université de Cambridge, il a été fondé en 1874 et porte le nom d’un physico-chimiste anglais talentueux Henry Cavendish (1731-1810). Rutherford le dirige de 1919 à sa mort en 1937.

Maurice Goldhaber a rapidement apporté sa première contribution majeure lorsqu'il a suggéré à James Chadwick (1891-1974), qui avait découvert le neutron en 1932 que le deutéron pourrait être désintégré par des photons à haute énergie. Ils travaillent ensemble et ils publient en 1934 la première mesure précise de la masse du neutron. Grâce à Chadwick la structure de l’atome a été complétée, le noyau est constitué de charges positives les protons et de charges neutres les neutrons autour sur des trajectoires elliptiques se déplacent des charges négatives les électrons ; l’atome est neutre électriquement, il possède autant de protons que d’électrons. Le deutéron encore appelé deuton est le noyau du deutérium, isotope naturel de l’hydrogène. Il contient un proton et un neutron. Les isotopes d’un même élément chimique possèdent le même nombre de protons et un nombre de neutrons différents.

Ces travaux lui permettent d’obtenir le doctorat en physique à l'Université de Cambridge en 1936. Dans le journal Le Temps du 15 septembre 1936, on peut lire dans la rubrique Causerie scientifique : « Or, tout dernièrement Chadwick et Goldhaber ont ouvert une nouvelle voie en montrant qu’un deuton frappé par les rayons gamma se dédouble en donnant un proton et un neutron. » Les rayons gamma sont un rayonnement électromagnétique d’un photon, ils ont une grande énergie et sont de nos jours utilisés en médecine nucléaire ainsi qu’en imagerie médicale.

N’obtenant pas de poste, il part aux États-Unis en 1938 et accepte un poste de professeur à l'Université de l'Illinois. Il est reconnu comme un expérimentateur créatif dans le domaine nucléaire. Mais Il va quitter l’Illinois car sa femme, Gertrude Scharff Goldhaber ne peut pas obtenir un poste rémunéré. Il part, en 1950, au laboratoire national de Brookhaven car sa femme est embauchée. Ce laboratoire a été créé en 1947 sur le site d’une ancienne base militaire américaine Camp Upton sur Long Island. Il dépend du département de l’énergie des États-Unis et son domaine est la physique nucléaire.

Il détermine en 1968, l’hélicité du neutrino avec Lee Grodzins (1926- ) et Andrew Sunyar (1920-1986). Ils montrent que le neutrino a une hélicité gauche car son spin est orienté dans le sens opposé à son mouvement. Le neutrino est une particule élémentaire électriquement neutre. Le spin est une des propriétés des particules en physique quantique. Il caractérise le moment angulaire intrinsèque. Un électron se déplace autour du noyau de l’atome, il a un moment angulaire orbital, il tourne aussi sur lui-même, c’est le moment angulaire intrinsèque ou spin. Si le spin est entier ou nul, les particules portent le nom de bosons. Si le spin est demi-entier, les particules sont nommées fermions. Les électrons et les neutrinos sont des fermions.

Au nom de la commission de l’énergie atomique des États-Unis, en 1968, il dépose un brevet pour l’invention d’un composé hélium-néon permettant l’étude des interactions du neutrino dans les chambres à bulles. Il dirige le département de physique à partir de 1960 et en 1961, il est nommé directeur, poste qu’il conservera jusqu’en 1973. Avec Edward Teller (1908-2003), il propose le modèle dit Goldhaber-Teller qui décrit la résonance géante dipolaire, celle-ci est due à la vibration groupée des neutrons en opposition à la vibration groupée des protons. La société américaine de physique l’élit président en 1982.

Bien que retraité en 1985, il continue de travailler jusqu’à plus de 90 ans. Sa dernière publication date de mai 2011, elle est écrite avec son fils Alfred. Il a obtenu de nombreux prix. En 1971, le prix Tom Wilkerson Bonner en physique nucléaire lui est attribué. Ce prix existe depuis 1964 en mémoire de Bonner (1910-1961). Il récompense des travaux en physique nucléaire et est décerné tous les ans.

Il reçoit le prix J. Robert Oppenheimer en 1982 attribué par le centre d’études théoriques de l’université de Miami depuis 1969. Robert Oppenheimer (1904-1967) est le père du projet Manhattan qui conduira à la fabrication de la bombe A qui a été utilisée à Hiroshima et à Nagasaki.

Puis en 1983, il reçoit la médaille nationale des sciences. Cette médaille est décernée par le président des États-Unis qui choisit les personnes à récompenser parmi une liste établie par la Fondation nationale scientifique. Elle récompense un travail important dans le domaine des sciences sociales, de la biologie, de la chimie, de l’ingénierie, des mathématiques et de la physique ainsi que des sciences du comportement.

Il obtient le prix Wolf en physique en 1991. Ricardo Wolf (1887-1981) est un inventeur d’origine allemande qui a été ambassadeur de Cuba en Israël et qui a créé une fondation. Depuis 1978, la Fondation Wolf attribue tous les ans en Israël six prix à des personnalités pour des réalisations dans l’intérêt de l’humanité et des relations pacifiques entre les peuples sans considération de nationalité, de religion, de couleur, de sexe ou d’opinion politique. Les prix Wolf récompensent des travaux en agriculture, mathématiques, médecine, chimie, physique et art, ils ne sont pas remis tous les ans. En physique et en chimie, les prix sont justes un peu moins prestigieux que le prix Nobel, souvent les lauréats du prix Wolf obtiennent le prix Nobel dans les années qui suivent.

Enfin, en 1999, le prix Enrico Fermi lui est attribué. Ce prix, décerné par les États-Unis à des scientifiques ayant œuvré dans le domaine de l’énergie, est administré par le département de l’énergie des États-Unis. Une médaille en or à l’effigie d’Enrico Fermi (1901-1954) est remise à celui qui reçoit ce prix.

En 2001, le laboratoire national de Brookhaven crée les bourses Gertrude et Maurice Goldhaber en leur honneur. Ces bourses sont décernées à de jeunes scientifiques qui ont déjà des titres et aussi du talent ainsi que des compétences exceptionnelles et dont les recherches montrent une indépendance d’esprit et une curiosité pour des domaines proches de leur sujet.

En 2008, le laboratoire célèbre le 50e anniversaire de la découverte de l'hélicité des neutrinos en donnant une conférence. Maurice Goldhaber, qui a 97 ans, est présent et monte sur l’estrade afin de présenter son point de vue sur l'avenir de la physique.

En août 2009, il déménage près de son fils, Alfred, un professeur de physique à l'Université Stony Brook. Son travail, bien que plus lent, continue. Avec son fils Alfred, il s'est mis à démontrer l'impraticabilité de remarquer l'hélicité inversée des neutrinos, l’article est publié dans Physics Today en mai 2011.

Maurice Goldhaber décède après une courte maladie le 11 mai 2011. Il a formé de nombreux chercheurs et plusieurs de ses élèves ont obtenu le prix Nobel.

 

Pour en savoir plus

Maurice Goldhaber, P. D. Bond et L. Grodzins, Physics Today (2011) 64 (10), 65
Maurice Goldhaber - A biographical memoir
(PDF), R. P. Crease and A. S. Goldhaber, sur le site de National Academy of Sciences
Revue Scientifique 1/01/1939 p. 122 sur Gallica (BNF)

 

Illustration : Maurice Goldhaber probablement en 1937 GFHund — Travail personnel / Wikimedia, CC BY 3.0

Auteur(s) : Catherine Marchal
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Mots-clés : garance, alizarine naturelle, alizarine synthétique, Jean-Henri Fabre (1823-1915)

Dans la région provençale, la garance est cultivée pour donner la couleur garance utilisée en teinture. À Avignon, la chambre de commerce propose un concours en 1858 sur la garance : Trouver un procédé usuel propre à reconnaître d’une manière sûre et facile, dans la Garance et les divers produits qui en dérivent, toute espère d’altération ou de mélange ayant un caractère frauduleux. Jean-Henri Fabre (1823-1915), professeur de physique et de chimie au lycée impérial d’Avignon, entreprend des travaux sur la garancine qui est de la poudre de racine de garance. Ces derniers sont récompensés par la chambre de commerce car il obtient le premier prix.

Dès 1826, Pierre-Jean Robiquet (1780-1840) et Jean-Jacques Colin (1784-1865) étudient la racine de garance et isolent deux colorants l’alizarine et la purpurine.

De 1859 à 1861, Jean-Henri Fabre dépose quatre brevets d'invention touchant à l'analyse des fraudes, mais surtout à l'alizarine pure, qu'il a réussi à extraire. Le 30 juillet 1859, le brevet porte le titre de L’obtention d’une garance épurée, au pouvoir tinctorial accru : la paludine.

Mais, en 1868, alors qu’ils travaillent chez BASF, Carl Graebe (1841-1927) et Carl Liebermann (1842-1914) découvrent l’alizarine synthétique qu’ils obtiennent à partir de l’anthracène tiré du goudron de houille. Un brevet est déposé et l’alizarine est commercialisée dès 1871. À un jour près, William Henry Perkin (1838-1907) réalise la même synthèse. L’alizarine est la 1,2-dihydroxyanthraquinone de formule C14H8O4 et de formule développée :

alizarine

Cette découverte est catastrophique économiquement pour les régions où la garance est cultivée comme la Provence, l’Alsace et la Hollande car l’alizarine synthétique est peu chère et les quantités obtenues sont très importantes. En 1885, l’Allemagne produit en 20 jours autant d’alizarine que le département du Vaucluse et ses environs en une année entière.

Pour Jean-Henri Fabre aussi, c’est une catastrophe car il vient de passer pratiquement dix années à trouver des procédés pour améliorer l’obtention de l’alizarine naturelle et tout ce travail n’aura servi à rien.

C’est ainsi que les soldats français sont partis au combat en août 1914 avec des képis et des pantalons rouges, colorés non plus par la garance issue des cultures françaises mais par l’alizarine produite par l’Allemagne !

Cette tenue historique, nécessaire à la visibilité du soldat sur le champ de bataille enfumé par la poudre noire, devenait un handicap après l’invention de la poudre sans fumée en 1884. Après des tergiversations politiques et idéologiques, il fut décidé qu’il s’agissait maintenant de combattre sans être vu. Ce n’est que fin 1915 que l’intégralité des soldats français a pu disposer de la tenue « bleu horizon » dont le colorant provenait de l’indigo synthétique produit par les Britanniques.

 

Pour en savoir plus

 

Illustration : Soldat français de la Première Guerre mondiale en 1914 (in coll. Mémorial de Verdun) Image retouchée (Antonov14)/Wikimedia, licence CC BY-SA 3.0

Auteur(s) : Catherine Marchal
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Mots-clés : intelligence artificielle, synthèse chimique, cinétique chimique

L’intelligence artificielle est un des domaines de l’informatique qui prend une place de plus en plus importante dans notre quotidien (moteurs de recherche, itinéraires routiers...) mais aussi dans la recherche depuis quelques décennies. En doublant tous les dix-huit mois, la puissance des ordinateurs n’a cessé d’augmenter de façon très significative au fil des ans. Ceci a permis d’accroître les capacités de ces machines à exécuter des tâches normalement associées à l’être humain pour résoudre, entre autres, des problèmes complexes en analysant des données en nombre de plus en plus colossal. Depuis les années 1960, les chimistes utilisent ces machines capables de traiter des données et les applications liées à leur utilisation permettent d’optimiser la recherche et le développement de nouvelles molécules.

Parties des programmes de physique-chimie associées

  • Programme d’enseignement scientifique de terminale, thème 3 :Une histoire du vivant, partie 5 : De la machine de Turing à l’intelligence artificielle
  • Programme de la spécialité physique-chimie de terminale générale, partie « Constitution et transformations de la matière », 2.a : Suivre et modéliser l’évolution temporelle d’un système, siège d’une transformation chimique, 4. : Élaborer des stratégies en synthèse organique
  • Programme de physique-chimie de terminale STL : partie « Chimie et développement durable » / Synthèses chimiques
  • Programme de physique-chimie et mathématiques de première STL : partie « Transformation chimique de la matière » / Cinétique d’une réaction chimique
Auteur(s) : Éric Bausson
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Les mers et océans représentent 71 % de la surface totale de notre planète pour un volume de près de 1,33 milliard de km3 (soit 98 % des eaux de la planète) et une profondeur moyenne de 3 700 mètres. Contrairement aux écosystèmes terrestres, les écosystèmes marins restent encore très peu explorés : on estime que seulement 5 % des espaces marins ont à ce jour fait l’objet d’études approfondies. Il est vrai que c’est seulement au XXe siècle que l’on a commencé à disposer de technologies et d’équipements adaptés pour explorer les grands fonds (jusqu’à près de –11 500 m dans la fosse des Mariannes). L’extrême diversité de sa faune, sa flore, ses ressources, son potentiel énergétique… font de l’espace marin une réserve de richesses dont on a du mal aujourd’hui à en évaluer l’étendue.

Auteur(s) : Françoise Brénon et Gérard Roussel
Source : Série Les chimistes dans
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Mots-clés : Jars, métallurgie, mines, École royale des Ponts et Chaussées

Lorsqu’en 1774 paraît le premier tome des Voyages métallurgiques entre 1757 et 1769, son auteur Antoine Gabriel Jars, dit le Jeune, est mort depuis 1769. C’est son frère ainé Gabriel Jars (1729-1808) dit l’Ancien, qui fait imprimer l’ouvrage en trois tomes, les deux derniers tomes seront publiés jusqu‘en 1781. Le premier tome est consacré à la houille et au fer, les deux autres à la métallurgie non-ferreuse. L’ensemble est constitué de mémoires.

Gabriel Jars le Jeune est né en 1732 à Lyon. Son père est Directeur des mines et Jars le Jeune s’intéresse très tôt à la métallurgie. Remarqué par ses professeurs, il entre à l’École royale des Ponts et Chaussées à Paris en 1752 dans une classe spéciale réservée aux mines. Cette école fondée en 1747 par Daniel Charles Trudaine (1703-1769), a pour mission de former les techniciens et les ingénieurs. Trudaine comme Jean Hellot (1685-1766) veut faire avancer le bien-être de la société grâce au progrès technique par l’éducation, la formation et l’apprentissage. Le jeune Gabriel est envoyé en stage dans les mines de plomb argentifères de Poullaouen en Bretagne. Puis sur d’autres sites comme les mines d’argent de Sainte-Marie aux Mines en Alsace.

Ses études terminées, il revient dans l’exploitation familiale où il met en œuvre un four à réverbère où la chaleur du four est réfléchie par la voute du four, ainsi qu’un four à cuivre.

Grand ingénieur d’Etat, sa réputation lui vaut dans les années 1750-1760 de devenir membre correspondant de l’Académie royale des Sciences de Paris en 1761 puis d’être élu, simultanément à Antoine Laurent Lavoisier (1743-1794), au fauteuil de chimie laissé vacant en 1768 par le Théodore Baron d’Hénouville (1715-1768). Gabriel Jars est ainsi récompensé pour son apport.

Gabriel Jars voyage dans une grande partie de l'Europe Centrale et en Grande-Bretagne, afin de rapporter en France le meilleur des pratiques techniques qu’il croise et relève en chemin. Trois années durant, de 1757 à 1760, accompagné de Jean-Pierre-François Guillot-Duhamel (1730-1816), il visite des mines et des fonderies dans de nombreuses régions : Saxe, Autriche, Bohême, Hongrie, Tyrol, Carinthie et Styrie. Puis, de nouveau à la demande du gouvernement, il part l’année 1765 complète en Angleterre. À peine revenu en France, il repart vers les pays du nord en compagnie de son frère. Ils commencent leur périple par la Hollande et ses manufactures, puis le Hanovre, séjournent quatre mois dans les montagnes du Harz, parcourent une partie de la Saxe puis se rendent à Hambourg, de là à Copenhague, puis aux mines d'argent de Kongsberg en Norvège et enfin en Suède.

Ensuite, il réalise des missions en France afin d’étudier les mines près de Langeac, actuellement en Haute-Loire. Mais la forte chaleur le rend malade et il est ramené à Clermont-Ferrand où il meurt d’insolation le 20 août 1769.

Il a passé l’essentiel de sa vie à voyager à travers l’Europe et à observer les techniques employées dans les forges, pour les introduire sur le territoire français, avec le souci permanent de lier théorie et pratique. Son journal de voyage permet de recueillir des informations au jour le jour et ce travail devient au XIXe siècle, l’exercice obligé de tous les élèves ingénieurs des Écoles des Mines de Paris comme de Saint-Étienne.

Gabriel Jars le Jeune est un métallurgiste, créateur de la sidérurgie française et aussi un innovateur en introduisant des nouveaux procédés. On lui doit la fonte au coke ; le procédé de fabrication du minium, qu’il présente à l’Académie des Sciences en avril 1768. Pour lui, le charbon et le fer sont les éléments essentiels du développement technique. Enfin, il installe au Creusot un grand centre industriel qui existe toujours.

Son ami, Jean-Pierre-François Guillot-Duhamel continuera l’œuvre de Gabriel Jars en introduisant des procédés nouveaux comme la cémentation de l’acier. Il collaborera à l’Encyclopédie méthodique d’Antoine-François Fourcroy (1755-1809) en rédigeant les articles concernant les mines et la métallurgie.

 

Pour en savoir plus

 

Illustration : Un haut fourneau au temps de Jars, La Nature. Revue des sciences et de leurs applications aux arts et à l'industrie (1935)  deuxième semestre, Cnum - Conservatoire numérique des Arts et Métiers, oeuvre du domaine public http://cnum.cnam.fr

Auteur(s) : Catherine Marchal
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