Mediachimie | Les batteries sodium–ion

Date de publication : Vendredi 11 Mars 2016
Rubrique(s) : Éditorial
© Pierre JACQUET/CEA

Des chercheurs français du réseau RS2E qui groupe des laboratoires publics du CNRS et du CEA avec des industriels ont dévoilé fin 2015 les premiers prototypes de batteries sodium-ion sous le format standard 18650 utilisé notamment dans les ordinateurs portables. Cette information ne vous dit peut-être rien, mais sachez que dans le monde, de nombreux chercheurs planchent sur cette technologie alternative aux batteries lithium–ion (1). Ces dernières (2), fabriquées sur une invention française au Japon, en Corée et en Chine, à des centaines de millions d’exemplaires ont ce même standard sous la forme d’un cylindre de 1,8 cm de diamètre et de 6,50 cm de longueur.

Les batteries sodium–ion fonctionnent sur le même principe : les ions sodium comme le lithium migrent à travers un électrolyte d’une électrode à l’autre au gré des cycles de charge et de décharge, et s’insèrent en douceur dans les structures cristallines de l’anode et de la cathode (3).

Plusieurs années ont été nécessaires pour innover et miniaturiser les électrodes en films très minces qui s’enroulent les uns sur les autres. Des polyanions ont été essayés, phosphates-titanates ou phosphates-vanadates fluorés. De nouvelles anodes capables d’absorber le maximum de sodium et un nouvel électrolyte polymère (4) qui transporte les ions Na+ ont été trouvés. Les solutions retenues restent évidemment secrètes car la concurrence mondiale est féroce. On sait cependant déjà que la densité d’énergie de ces prototypes est de 90 Wh/kg, comparable à celle de certaines batteries au lithium (5) et que leur durée de vie dépasse 2000 cycles de charge–décharge.

La technologie sodium (6) qui avait été écartée au tout début des années 90, à cause d’une meilleure tension par cellule pour le lithium, qui, de plus, était plus léger, revient en force pour deux raisons :

  • le lithium est relativement rare et ses ressources sont limitées à quelques pays comme la Colombie, le Chili, la Chine, alors que le sodium est abondant dans la croûte terrestre et dans l’eau des océans (NaCl) (7) ;
  • le coût de cette technologie est bien plus faible, le carbonate de sodium est 50 fois moins coûteux que le carbonate de lithium et les batteries sodium ont un créneau superbe celui du stockage statique de l’énergie renouvelable (8).

Espérons que les industriels français et européens (9) sauront saisir l’opportunité, car c’est un marché potentiel de 80 milliards de dollars qui s’offre à eux.

Pr Jean-Claude Bernier
mars 2016

Quelques ressources pour en savoir plus :

1) Meilleurs matériaux pour batterie à ions Li. L’approche déductive et inductive du chimiste
2) Des batteries au lithium plus puissantes (vidéo, 8 :36)
3) La chimie dans les batteries
4) Les polymères se réveillent pour l’électronique !
5) Lithium–ion : de nouvelles batteries antiaériennes ?
6) Le sodium (produit du jour de la société chimique de France)
7) Les ressources minérales du futur sont-elles au fond des océans ?
8) Stockage de l’électricité : élément clé pour le déploiement des énergies renouvelables
9) Où travaillent les chimistes ?