Mediachimie | La chimie s’invite dans la guerre des télés

Date de publication : Jeudi 30 Mars 2017
Rubrique(s) : Éditorial

On connait la complexité des écrans sur les téléviseurs plats. Les dalles LCD sont de véritables mille-feuilles qui comptent des transistors, des polariseurs de lumière, des cristaux liquides, des filtres de couleurs et des LED pour le rétroéclairage (1). La concurrence des grandes marques, Samsung, LG, Sony… pour ne citer que les majeures, a fait progresser les définitions, HD, Full HD, UHD, 4K…, en multipliant le nombre de pixels et aussi la technologie en passant du néon aux LED puis OLED et maintenant QLED. Le résultat soutenu par le marketing nous offre des téléviseurs aux diagonales de plus en plus grandes et aux épaisseurs de plus en plus fines.

Dans cette guerre commerciale la chimie est omniprésente : les polymères cristaux liquides (1), les filtres de couleurs avec les pigments micronisés (2), les LED qui ont amélioré le rétro éclairage, les verres ITO à base d’indium, les nano-transistors (3) sans oublier les revêtements antistatiques. Mais depuis deux ans et particulièrement vues lors du salon IFA de septembre 2016, deux stratégies opposent deux grands constructeurs.

Les téléviseurs OLED utilisent des diodes électroluminescentes, encapsulées dans des résines ou déposées en gouttes sur un support (4). Ce sont des polymères (5) semi-conducteurs où alternent les simples et doubles liaisons carbone-carbone dites π conjuguées sous l’influence d’un courant elles émettent de la lumière. L’astuce des chimistes organiciens a été de varier les formulations pour obtenir des couleurs différentes de base ; Rouge, Vert, Bleu. Elles constituent directement des pixels de couleur et il n’y a plus nécessité d’avoir des filtres ni de rétroéclairage, les noirs sont profonds et les images fluides car le temps de réponse est de l’ordre de 0,1 milliseconde. La fiabilité et la longévité des OLED sont maintenant assurées mais ces téléviseurs restent un peu coûteux.

Les téléviseurs QLED utilisent des nanoparticules de semi-conducteurs, au départ CdTe ou CdSe mais aussi PbSe et ZnSe. Le savoir-faire des chimistes à partir de précurseurs organométalliques et d’un réducteur doux (6) permet d’obtenir des suspensions colloïdales et d’arrêter la croissance des particules à quelques nanomètres ou dizaine de nanomètres. Ces « quantum dots » éclairés par des LED bleues ont la propriété d’émettre par fluorescence du rouge et du vert purs en fonction de la taille de ces particules. L’espace colorimétrique est élargi, la luminosité est meilleure, les fréquences parasites sont éliminées et l’énergie nécessaire est abaissée. Les quantum dots sont fabriqués par BASF et Dow, car ils peuvent aussi servir en imagerie médicale, 3M associé à Nanosys produit des films de quantum dots pour les téléviseurs. La recherche vise à remplacer les LED bleues source de lumière des filtres à boîte quantique par une excitation électrique, chaque sous-pixel émettrait alors sa propre lumière comme une OLED (7). Cette technologie n’est pas encore prouvée.

Jean-Claude Bernier
Mars 2017

Quelques ressources pour en savoir plus :
(1) Exploser un smartphone
(2) Les multiples contributions de la chimie dans la conception des tablettes et des smartphones
(3) La chimie au cœur des (nano)transistors
(4) Les diodes électroluminescentes organiques : des sources « plates » de lumière
(5) Les polymères se réveillent pour l’électronique
(6) Des chimistes au service des nouveaux objets intelligents
(7) Les matériaux avancés moteur de l’innovation en électronique