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Colloque Chimie et Matériaux Stratégiques - mercredi 9 novembre 2022

Le cycle des Colloques “Chimie &…” s'enrichit d'un nouvel opus : Chimie et Matériaux StratégiquesMercredi 9 novembre 2022 Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris   Les métaux et matériaux stratégiques
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Le cycle des Colloques “Chimie &…” s'enrichit d'un nouvel opus :

Chimie et Matériaux Stratégiques
Mercredi 9 novembre 2022

Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris

 

Les métaux et matériaux stratégiques sont le plus souvent relativement rares ou difficilement accessibles, inégalement répartis sur la planète, mais mondialement indispensables dans des utilisations industrielles stratégiques, notamment la décarbonation de l’Énergie dans toutes ses applications industrielles et environnementales.

Les conflits géopolitiques actuels ne font qu’amplifier l’importance de ce thème, car ces matériaux sont indispensables à la vie d’un État et leur manque entraine des impacts industriels et économiques négatifs importants, liés à un approvisionnement ou à une exploitation difficile.

Dans le cadre de notre mission de formation des jeunes et d’information des citoyens, il nous est apparu important de faire un point scientifique objectif sur les différentes facettes de ce thème transdisciplinaire au cœur de l’actualité, dans lequel la chimie joue et jouera un rôle important. Les conférenciers ont été choisis parmi les meilleurs experts de la recherche, de l’industrie, de la politique et de l’économie, dans les différents domaines concernés.

Ce colloque est ouvert sur inscription à un large public avec une attention particulière aux jeunes et à leurs enseignants. Pour que ce colloque puisse être accessible au plus grand nombre, il sera diffusé en direct sur la chaine YouTube de Mediachimie. Le niveau se veut accessible à tous pour permettre un large débat.

Danièle OLIVIER | Vice-Présidente de la Fondation internationale de la Maison de la Chimie

 

Voir le direct sur Mediachimie ou sur Youtube.

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Inscription gratuite et obligatoire : INSCRIPTIONS

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L’hélium, l’autre gaz indispensable

Depuis plusieurs semaines on entend parler de la crise du gaz, le conflit avec la Russie mettant les nations européennes dans une situation énergétique délicate du fait d’une dépendance non maîtrisée aux importations du
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Depuis plusieurs semaines on entend parler de la crise du gaz, le conflit avec la Russie mettant les nations européennes dans une situation énergétique délicate du fait d’une dépendance non maîtrisée aux importations du gaz russe. Il s’agit bien évidemment du méthane CH4 (1) utilisé comme combustible et aussi matière première pour l’industrie chimique. Il y a un autre gaz dont on parle peu mais qui est tout aussi indispensable, non dans le domaine de l’énergie, mais dans celui de la santé, de la soudure, de l’électronique, de la recherche et de la défense, c’est l’hélium.

Un gaz rare très curieux

L’hélium (symbole He) de numéro atomique 2 et de masse molaire 4 g/mol est un gaz plus léger que l’air (0,138 g/L), très bon conducteur de la chaleur. Il a une température de liquéfaction très basse – 269°C (4K). C’est, après l’hydrogène, l’élément le plus répandu dans la croute terrestre provenant des particules α (He2+) issues de la désintégration d’éléments radioactifs (2). L’hélium liquide est incolore et subit un changement de phase à son point lambda à – 271°C où il devient « superfluide » c’est-à-dire qu’il n’a pas de viscosité mesurable, qu’il passe à travers des capillaires quasi nanométriques et rampe le long des surfaces. 1000 fois plus conducteur thermique que le cuivre, ses propriétés sont expliquées en le classant comme un fluide quantique. Curiosité de laboratoire, il est très utile pour l’exploration du domaine proche du zéro absolu, des propriétés des « atomes froids » et bientôt des nouveaux calculateurs quantiques.

Un gaz industriel

L’hélium est un sous-produit de l’extraction du gaz naturel qui peut en contenir de 0,3% à 7%. C’est en 1927 que l’un des premiers gisements d’Hugoton Basin fut exploité aux États-Unis. D’autres réserves gazières naturelles comme celui du CO2 dans le Wyoming sont exploités depuis 1986.

Toute une série d’opérations est effectuée pour obtenir un gaz pur. On le débarrasse d’abord des impuretés comme l’eau, le mercure et le sulfure d’hydrogène (H2S) par adsorption sur du charbon actif puis on sépare le méthane par cryogénie. On refroidit ensuite à – 196°C pour éliminer l’azote et les restes de méthane. Enfin on brûle le gaz avec de l’oxygène sur catalyseur pour éliminer l’hydrogène (3). Enfin on brûle l’hydrogène restant en présence de l’hélium avec de l’oxygène sur catalyseur (4).

Une dernière purification donne un gaz hélium pur à 99,99% qui peut être stocké.

Les États-Unis sont les principaux producteurs, viennent ensuite le Qatar, l’Algérie, l’Australie, la Russie et la Pologne. La production mondiale est de l’ordre de 160 millions de m3 dont 50% aux États-Unis.

La saga de la production d’hélium est assez intéressante. Dans les années 1970 les États-Unis sont en situation de quasi-monopole. Le gouvernement fédéral a financé avec un partenariat privé un pipe-line de 600 km reliant les installations de production aux cavités de stockage texanes. Les volumes extraits de l’ordre de 4000 tonnes sont multipliés par 5 pour atteindre 20 000 t en 1970. Le gouvernement juge que les stocks sont suffisamment importants et la production diminue largement.

Le processus est accéléré avec la fin de la guerre froide dans les années 90 et compte tenu de la dette des sociétés fédérales de maintenance des infrastructures et de stockage, la loi de privatisation de l’hélium en 1996 précipite l’écoulement du milliard de m3 stockés mais fait baisser les prix qui n’encouragent pas les nouveaux investissements US. La forte demande internationale qui s’accélère pour l’électronique et la fibre optique en Europe et en Asie va multiplier le prix au m3 qui passe de 2 $ à plus de 6 $, l’hélium devenant un produit critique. La production va alors s’internationaliser d’abord en Algérie où une alliance Air Products – Air liquide – Sonatrach va mieux exploiter l’extraction à partir des ressources gazières. Puis c’est le Qatar, avec les entreprises allemande Linde et française Air liquide, qui voit sa production sera multipliée par trois. Le tableau indique la production mondiale internationalisée actuelle maintenant en millions de m3 :

paysUSQatarAlgérieRussieAustraliePologne
M m3835114541

Un gaz très utile

Sa faible température d’ébullition (4K) le fait abondamment utiliser en cryogénie. Les bobines des aimants en NbTi (nobium, titane) ou NbSn (nobium, étain) des supraconducteurs des IRM en contiennent chacun plusieurs dizaines de litres, le grand collisionneur de Hadrons (LHC, Large Hadron Collider) du CERN en contient 120 t et les bobines des aimants du projet ITER en contiendront des milliers de litres (5); dans nos laboratoires les spectromètres RMN sont également refroidis à l’hélium liquide (6).

Gaz inerte et ininflammable il est utilisé pour purger les réservoirs d’hydrogène liquide et aussi pour pressuriser les réservoirs d’oxygène liquide utilisé comme propergol (7) pour les moteurs Vulcain des fusées Ariane. La NASA pour sa part utilise plusieurs millions de m3 par an. Son inertie le fait utiliser dans la soudure à l’arc pour l’inox, le cuivre et l’aluminium ; il protège les métaux de l’oxydation et il est moins couteux que l’argon. Il protège sous pression le tirage des monocristaux de silicium ou germanium et celui des fibres optiques. Plus léger que l’air il sert à gonfler les ballons et dirigeables, à la place de l’hydrogène ; rien que pour les ballons sondes la météo en utilise près de 4 millions de m3 annuellement.

Du fait de sa moindre solubilité dans les solutions aqueuses et notamment dans le sang il remplace l’azote dans les bouteilles servant à la respiration des plongeurs et évite ainsi les embolies gazeuses par dégagement d’azote dans les artères lors de la décompression.

Bien plus fluide que l’air il est utilisé dans les disques durs scellés des serveurs du « cloud » : on peut ainsi empiler plus de disques durs et l’hélium favorise la vitesse de lecture des données. Il peut les garder en température à 4 ou 5°C améliorant leur longévité.

Enfin il permet de faire la fête : on gonfle facilement les ballons multicolores (8) des anniversaires et en inspirant l’hélium à la place de l’air sa faible densité change la voix vers les aigus pour amuser l’assistance.

Plus sérieusement, l’Europe avait déclaré en 1994 l’hélium produit critique et stratégique compte tenu de sa production géographiquement centrée et de son utilisation indispensable pour certaines industries. En 2020 sa criticité a été annulée. En France il y a une capacité faible de production au Blanc-Mesnil et une société 48-Energy a déposé un permis de recherche dans la Nièvre.

Jean-Claude Bernier
Juin 2022



Pour en savoir plus
(1) Le biogaz, une énergie d’avenir ? de Jean-Claude Bernier, éditorial Mediachimie.org
(2) Les réactions nucléaires dans les étoiles, par Lucien Ransinangue, dossier pédagogique Nathan / Mediachimie.org
(3) Gaz de schistes : pour aujourd’hui ou pour demain ? de Julien Lefebvre, Noël Baffier et Jean-Claude Bernier, une fiche Chimie et…en fiches, cycle 4, Mediachimie.org
(4) Zoom sur les derniers résultats de la production d’hydrogène « décarboné » de Jean-Pierre Foulon et Françoise Brénon, Zoom sur, Mediachimie.org
(5) Quelle échéance dans la disponibilité pour l’option « fusion de l’hydrogène » ?, de Bernard Bigot, Colloque Chimie et énergies nouvelles (10 février 2021)
(6) La résonance magnétique nucléaire au service de la biologie structurale, de Nicolas Birlirakis et al.,  L’Actualité Chimique n°353-354 (juin-juillet-août 2011) p. 100-109
(7) La propulsion des fusées et des futurs avions chez Air Liquide, de Pierre Crespi, Colloque Chimie, aéronautique et espace (8 novembre 2017)
(8) Pourquoi mon ballon s’envole ? Question du mois, Mediachimie.org

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Palmarès des 38e Olympiades de la Chimie

Cette année, 36 lycéen(ne)s parmi près de 2 500 jeunes de toute la France et des lycées de l’étranger, avec l’aide de l’AEFE, ont participé aux épreuves finales du concours national des 38e Olympiades de la Chimie à
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Bernard Bigot un chimiste manager

Bernard Bigot, directeur général du programme ITER, est décédé la semaine dernière. Les milliers de chercheurs, d’ingénieurs, d’ouvriers des centaines d’entreprises qui travaillaient sur ce projet mondial « le réacteur
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Bernard Bigot, directeur général du programme ITER, est décédé la semaine dernière. Les milliers de chercheurs, d’ingénieurs, d’ouvriers des centaines d’entreprises qui travaillaient sur ce projet mondial « le réacteur thermonucléaire expérimental international » de Saint-Paul-lez-Durance sont bouleversés. Bernard Bigot avait pris la direction d’ITER en 2015 alors en pleine crise existentielle et en avait relevé le défi en lui donnant un nouvel élan.

Mais Bernard n’était pas qu’un super manager, c’était aussi un vrai chimiste, élève de l’École Normale Supérieure de Saint-Cloud et agrégé de sciences physiques option chimie. Il prépare une thèse en chimie théorique à l’Université d’Orsay dans l’équipe brillante dirigée par Lionel Salem au milieu des années 70. Docteur d’État ès sciences physiques, c’est en 1985 qu’il participe à la création de l’École normale supérieure de Lyon où il occupera diverses fonctions de directeur des études (1986-1993) tout en dirigeant un laboratoire de recherche en chimie théorique. Lyon et l’École Normale Supérieure resteront toujours privilégiés dans son cœur. On se rappelle avec quelle fierté et amour il conduisait un soir d’été en 1998 une délégation scientifique venue de Chine sur les hauteurs de Fourvière.

Hélas pour Lyon ses qualités le font remarquer à Paris et il est nommé en 1993 au Ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche à la Mission scientifique et technique (MST) puis directeur général de la recherche et de la technologie (DGRST) jusqu’en 1997. Il montre là sa vision de la recherche internationale et active l’évolution des équipements et des laboratoires des grands organismes de recherche pour faire face à la concurrence internationale. C’est lui qui impulse notamment la dotation en spectromètres de RMN à haut champ en biochimie, à Grenoble et Gif-sur-Yvette, équipements dont la France était sous-dotée. Il montre aussi sa puissance étonnante de travail. Il n’était pas rare de le rencontrer lors d’une réunion à 22 h rue Descartes et d’en trouver ses conclusions dans la boite mail à 7 h du matin.

En 1998 il accepte la direction de l’Institut de recherche sur la catalyse du CNRS à Lyon où il avait déjà plusieurs années auparavant encouragé l’implantation d’une équipe de théoriciens brillants, puis en 2000 la direction de l’ENS de Lyon qui lui était restée chère. Il y montre encore là ses capacités d’organisation aidé par un travail remarquable des enseignants et aussi sa préoccupation constante d’attirer vers la science les jeunes collégiens et lycéens en favorisant les contacts des chercheurs avec les lycées et collèges.

Il doit à nouveau quitter Lyon en 2002 comme directeur du cabinet du ministre Claudie Haigneré jusqu’en 2003, date où il est nommé Haut-commissaire à l’énergie atomique puis en 2009 administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique jusqu’en 2013. Sous sa direction le CEA change de nom en y ajoutant à l’énergie nucléaire les énergies alternatives. Il y imprime sa marque en mettant l’accent sur la chimie nucléaire, les procédés bas carbone et les futures bases de l’énergie nucléaire. Cette préoccupation de l’énergie future va le conduire à prendre en 2015 la direction générale du projet international de « fusion nucléaire » alors en plein doute. Comment gérer et animer cette entreprise de coopération internationale sans équivalent au monde. Dans les conseils siège l’Europe mais aussi la Chine, l’Inde, le Japon, la Corée, la fédération de Russie, le Japon et les Ėtats-Unis. Il réforme les processus de décisions, les chaines de fabrication, le management. Sept ans après, plus de 75% du génie civil est réalisé et en ordre de marche. Des pièces de très haute technologie acheminées par voie maritime ou terrestre venant des partenaires du bout du monde sont montées en Provence. Il fallait voir son enthousiasme lorsque dernièrement les super aimants de plusieurs centaines de tonnes avaient rejoint leur logement au 1/10 de mm près. Il avançait avec optimisme sûr que le premier plasma serait produit en 2025 !

Pour nous à la Maison de la chimie il a accepté en 2006 d’être président du conseil d’administration de la Fondation (internationale). C’est sous son impulsion que se sont développées les actions en direction des jeunes et du grand public visant à mieux faire connaître la chimie. Citons les colloques « Chimie et … » qui ont connu à presque chaque fois (hors pandémie) plus de 1000 à 1200 participants dont 1/3 de lycéens et dont il a présidé le 18e « Chimie et Notre-Dame » en février dernier.

Citons aussi le site « Mediachimie.org » qui contient plus de 1800 références sur la chimie à destination des professeurs de lycées et de collèges mais aussi des élèves, des étudiants et de tout public s’intéressant à la science et à la chimie. C’est avec l’approbation de Bernard Bigot que des coopérations avec Nathan et la Fondation La main à la pâte, création de l’Académie des sciences, ont été réalisées élargissant le champ visé à un nombre encore plus grand d’internautes et d’élèves.

Oui nous sommes tristes, nous avons perdu un collègue chimiste, un professeur, un président internationalement respecté, un entraineur d’hommes et de femmes, mettant toute son énergie au service de la nation et à œuvrer pour un monde meilleur en participant activement au sein d’ITER, à la réalisation d’une source d’énergie propre et inépuisable telle que la fusion nucléaire comparable à celle qui alimente le Soleil et les étoiles.
Sa grande préoccupation des générations futures nous a tous poussé à diffuser largement la science et la technique, nous lui devons tous de nous avoir entrainés dans cette belle aventure collective… Merci Bernard.

Nos pensées vont à sa famille et les équipes de Mediachimie s’associent à leur profond chagrin.

Mai 2022
les équipes de Mediachimie.org

 

Voir aussi la page d'hommage à Bernard Bigot sur le site de la Fondation de la Maison de la chimie

Crédit photo : ITER Organisation iter.org.

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Le méthanier au secours de l’Europe

Les contraintes géopolitiques et le conflit ukrainien ont mis en lumière la dépendance de l’Europe vis-à-vis du gaz russe importé via des gazoducs traversant plusieurs pays à partir des champs d’extraction de la Russie.
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Les contraintes géopolitiques et le conflit ukrainien ont mis en lumière la dépendance de l’Europe vis-à-vis du gaz russe importé via des gazoducs traversant plusieurs pays à partir des champs d’extraction de la Russie. Plusieurs pays sont directement impactés dont la Hongrie, la Bulgarie et l’Allemagne. La France qui n’a plus de gisement national (1) et a diversifié ses sources est moins concernée. Sa consommation en baisse depuis plusieurs années est cependant de l’ordre de 390 tWh/an dont 37% pour le résidentiel, 25% pour le tertiaire et 33 % pour l’industrie dont l’industrie chimique qui est « gazo-intensive » puisque le gaz dont le méthane est non seulement une source d’énergie mais une matière première, comme le pétrole (2). Les importations hexagonales de gaz se font pour 60% par gazoducs et pour 40% sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL) transporté par des méthaniers.

Qu’est -ce qu’un méthanier ?

C’est un navire de conception et de structure adaptées à la matière transportée, soit ici un gaz comportant de 70 à 95% de méthane (CH4) mais liquéfié à basse température – 162°C (3). Six cents fois moins volumineux qu’à l’état gazeux, son transport maritime permet une souplesse d’approvisionnement sur de très grandes distances en variant les sources : Qatar, Algérie, Nigéria, États Unis. Plus souple qu’un gazoduc dont les infrastructures traversent plusieurs pays avec des risques géopolitiques et des blocages comme vécus pour gaz Stream 2, le méthanier peut se fournir dans n’importe quel pays qui dispose de terminaux cryogéniques de liquéfaction et l’acheminer en quelques jours à la vitesse moyenne de 19 nœuds vers les terminaux de gazéification. La France dispose de 4 terminaux : Fos Tonkin et Fos Cavaou (13), Dunkerque (59) et Montoir de Bretagne (44). Un cinquième est en projet au Havre. Ces terminaux permettent d’accueillir chacun de 8 à 13 milliards de m3 annuels.

Quels sont les types de méthaniers ?

De façon générale ils comportent de 4 à 5 cuves isolées thermiquement avec des dispositifs très perfectionnés de détection de fuites. Ils disposent d’une double coque pour qu’en cas d’échouage ou de collision les cuves ne soient pas fissurées et sont prioritaires sur les voies maritimes compte tenu de leur dangerosité.

On en distingue trois types :

  • les méthaniers à membrane - soit d’inox (acier inoxydable Fe, Ni, Cr) enveloppant des blocs de mousse de polyuréthanne dont l’enveloppe de 1,2 mm d’épaisseur gaufrée permet d’encaisser les variations de dilatation lors du refroidissement – soit d’invar (Fe64Ni36) ayant un très faible coefficient de dilatation recouvrant en 2 couches de 0,8 mm des caissons isolants en contreplaqué comportant de la perlite ou de la laine de verre (4)
  • les méthaniers à sphères – les cuves sont sphériques au nombre de 4 ou 5 en aluminium enfermant un isolant de type polystyrène en double couche. Ils sont reconnaissables grâce à une partie des sphères visibles sur le pont. Ces navires sont moins soumis au ballotage lorsque les cuves ne sont pas remplies et que la mer ou le vent rend la navigation plus difficile.
  • les méthaniers prismatiques – les cuves sont directement posées sur la coque intérieure du navire. Elles sont en aluminium avec une seule couche d’isolant. Ils exigent cependant une forte couche d’isolant entre la cuve et la quille pour éviter les fuites à – 162°C qui gèleraient la coque du navire.

Il y a plus de 550 méthaniers en service dans le monde avec en moyenne des capacités de 160 000 m3 de gaz liquéfié. Le plus grand le Rasheeda peut transporter 266 000 m3 de gaz liquéfié (soit 160 millions de Nm3 gaz ou 1,76 tWh). Les méthaniers sont peu polluants car souvent de propulsion diésel aménagé, comme les fuites de gaz sont de l’ordre de 0,15% par jour, le méthane est réinjecté dans les moteurs pour améliorer le rendement énergétique.

Quel chemin pour le GNL ?

Sur les plateformes d’extraction il faut d’abord le désulfurer puis le gaz purifié est liquéfié par cryogénie, stocké dans des réservoirs refroidis puis ensuite chargé dans les cuves du méthanier. Sur les terminaux gaziers le GNL du méthanier est transféré dans des cuves de stockages et peut prendre plusieurs directions ; le transport vers des stations de carburants au moyen de camions citernes réfrigérés, le « regazéifieur »où il est réchauffé puis mis sous pression pour rejoindre le réseau de distribution après avoir été odorisé.

Face à la décision pour les pays européens de diminuer drastiquement leur dépendance au gaz russe, les commandes d’approvisionnement au Moyen-Orient, en Afrique et aux États-Unis (5) se développent. Ce ne sont pas les méthaniers qui feront défaut ce sont plutôt les terminaux gaziers pour accueillir, stocker et gazéifier le GNL qui manqueront. L’investissement pour un port d’accueil et les infrastructures de traitement dépasse le milliard d’euros et prend un à deux ans de construction. Il faut donc s’attendre à une augmentation du prix de l’énergie. Déjà en juin 2021 le prix du GNL en Asie avait eu un coup de chaud et en Europe depuis janvier 2022 l’augmentation en avril approche les  80%.

Oui la politique d’indépendance énergétique coute cher et les économistes montrent que s’y ajoute le prix de la transition écologique c’est la « Greenflation » qui nous atteint durablement.

Jean-Claude Bernier
Mai 2022

Pour en savoir plus
(1) Une stratégie industrielle payante, deJean-Claude Bernier, L’Actualité chimique (2014)
(2) L’extraction du pétrole et du gaz, une animation issue de la série "Les incollables" (CEA)
(3) L’encyclopédie du gaz, un site proposé par la société Air Liquide
(4) Isolation dans l’habitat : la chimie pour ne pas gaspiller de calories, de Jean-Claude Bernier, in La chimie et l’habitat (EDP Sciences 2011)
(5) Gaz de schistes : pour aujourd’hui ou pour demain ?, de Julien Lefebvre, Noël Baffier et Jean-Claude Bernier, une fiche Chimie et…en fiches, cycle 4, Mediachimie.org
 

Crédit illustration : LNG Tanker Energy Progress at Wickham Point in March 2016 - Ken Hodge – Flickr - Licence CC BY-NC-N 2.0