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Mots-clés : Lecoq de Boisbaudran, Bunsen, Kirchhoff, spectroscope, gallium, Mendeleïev

Paul-Emile Lecoq de Boisbaudran (1838-1912) reprend le négoce des spiritueux à Cognac où il est né. Il est passionné par la chimie. À ses frais, il installe un laboratoire, achète du matériel, fait preuve d’une grande habileté manuelle et d’une ingéniosité remarquable.

Il connaît les travaux d’analyse spectrale de Robert Wilhelm Bunsen (1811-1899) et de Gustav Kirchhoff (1824-1887). Comme chaque élément a un spectre caractéristique, il se procure une bobine de Ruhmkorff, des fils de platine et un spectroscope à prisme avec micromètre et réalise les spectres des soixante-deux éléments connus à l’époque.

Dans la blende de zinc, il découvre un nouvel élément le 27 août 1875. Il le nomme gallium en hommage à la France, car en latin, la Gaule se dit Gallia. Il s’est défendu de l’avoir choisi en référence à son propre nom car Lecoq en latin se dit gallus.  Il le prépare à l’état pur en électrolysant du chlorure de gallium et étudie ses propriétés. Il vient à Paris présenter ses expériences et les réalise en septembre 1875, dans le laboratoire de Charles Adolphe Wurtz (1817-1884) à l’école de médecine devant des membres de la section de chimie de l’Académie des sciences. Le 6 décembre 1876, un échantillon de gallium est présenté à l’Académie des sciences.

Lecoq de Boisbaudran connaît aussi les travaux de Dimitri Mendeleïev (1834-1907) et en particulier la classification parue en 1869. Dans ce travail, Mendeleïev laisse libre des places prévues pour des éléments inconnus à l’époque. Lecoq de Boisbaudran compare ses résultats expérimentaux aux prévisions de Mendeleïev. Le gallium est bien l’un des éléments envisagés. Ce métal correspond par sa masse atomique et ses propriétés chimiques à l’éka-aluminium Ce résultat confirme la pertinence de la classification de Mendeleïev.

Lecoq de Boisbaudran découvrira aussi en 1880, le samarium et, en 1886, le dysprosium. Les travaux de Lecoq de Boisbaudran en spectroscopie font autorité et il est connu de l’Europe savante bien que n’étant qu’un chimiste amateur.


Spectroscope de Bunsen et Kirchhoff (E. Fremy, Encyclopédie chimique 1882, p. 505), Source BIU Santé

 

Pour en savoir plus

Mendeleïev (1834-1907) de Chemicus, L’Actualité Chimique, Paris (déc. 1975) n°27, pp. 30-32

De l’analyse spectrale aux spectroscopies : Histoire et applications de C. Genin, BUP, Paris (fév.2006) n°100, pp. 235-246

Le Gallium de M. Lecoq de Boisbaudran et l’ekaaluminium de M. Mendeleef de G. Tissandier, La nature, Paris ( juin 1876) n°176, pp.310-311

Auteur(s) : Catherine Marchal
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Mots-clés : Friedrich Ferdinand Runge, café, caféine, Pierre Jean Robiquet, Hermann Emil Fischer

Le célèbre écrivain allemand Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832) était un amateur de café. Il en buvait beaucoup afin de rester éveillé et a souhaité savoir pourquoi le café avait cette propriété.

Il connaissait un jeune chimiste Friedrich Ferdinand Runge (1794-1867) à qui il demanda d’analyser le café. En 1819, Runge identifie la substance stimulante, l’isole et en détermine les propriétés chimiques. Cette substance est nommée caféine, c’est la 1,3,7-triméthylxanthine.

En France, c’est Pierre Jean Robiquet (1780-1840) qui, en 1821, extrait la caféine. Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle qu’Hermann Emil Fischer (1852-1919) détermine la structure de la caféine et réalise la synthèse totale de cette molécule. La caféine est une base faible, sa demi-vie d’élimination est de quatre à six heures chez l’adulte, elle entraine une stimulation mentale pendant plusieurs heures suivie parfois d’insomnie.

Runge isole aussi, en 1834, une substance qu’il appelle kyanol ou cyanol et qu’August Wilhelm von Hofmann (1818-1892) nommera quelques années plus tard aniline. Ce produit aura une importance capitale pour le futur développement de la chimie organique.

Un siècle plus tard, en 1936, Karl Aloys Schenzinger (1886-1962) écrit une biographie sur Runge qui a pour titre Anilin.

Runge a aussi travaillé sur les colorants et a réalisé une des premières chromatographies sur papier.

 


Caféine (source: wikimedia)

Fig. 17 : Caféier - Nouveau dictionnaire de médecine de chirurgie pratiques, illustré de figures intercalées dans le texte, sous la direction du Dr Jaccoud. Tome 5. BUI SantéRobiquet, Pierre (1740-1840). Professeur à l'Ecole de Pharmacie, BUI Santé
Caféier ( Nouveau dictionnaire de médecine de chirurgie pratiques, sous la direction du Dr Jaccoud. Tome 5, P. 370, Source BIU Santé)Robiquet, Pierre (1740-1840). Professeur à l'Ecole de Pharmacie (Source : BIU Santé)

 

Pour en savoir plus

Trois siècles d’histoire du café de M.-L. Dufrénoy  et J. Dufrénoy, Journal d’agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, Paris (1951) n°343-344, pp. 312-318

Contribution à l’étude de l’action physiologique et thérapeutique de la caféine de F. Giraud, Thèse de Doctorat de médecine, Lyon, 1881, 54 p.

Procès verbaux des séances de l’Académie, Académie des sciences, séance du 18 août 1823, Paris, t. 7, p.528

Recherches sur la composition élémentaire et sur quelques propriétés caractéristiques des bases salifiables organiques, de J.-B. Dumas et J. Pelletier, Annales de chimie et de physique, Paris (1823) t. 24, pp. 182-183

Observations sur un mémoire intitulé : monographie chimico-technique de la Garance, etc., par Runge, publié en 1835 dans le Bulletin de la Société d’Encouragement de Berlin de P. Robiquet, Annales de chimie et de physique, Paris (1836) t. 63, pp. 282-296

 

Auteur(s) : Catherine Marchal
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Au début du XVIIIe siècle, la seule teinte bleue stable est le bleu outremer obtenu à partir d’une pierre précieuse, le lapis-lazuli. Cette couleur bleu est donc très chère. Entre 1704 et 1709, selon les sources, à Berlin, Heinrich Diesbach et Johann Conrad Dippel (1673-1734) veulent préparer un colorant rouge mais ils obtiennent accidentellement une nouvelle couleur bleue. Ce bleu fut obtenu par l’action du sulfate de fer (II), (FeSO4) sur un carbonate de potassium (K2CO3) qui contenait malencontreusement un cyanure jaune.

Diesbach et Dippel commercialisent ce nouveau pigment en gardant le secret de fabrication afin d’en conserver le monopole. Ce bleu porte alors le nom de Bleu de Prusse ou Bleu de Berlin. Le procédé de fabrication est dévoilé seulement en 1724 par John Woodward (1655-1728).

Tout au long du XVIIIe siècle, les chimistes vont s’intéresser à ce bleu. En 1756, Pierre Joseph Macquer (1718-1784) publie « Examen chymique du bleu de Prusse » (écriture de l’époque). Puis Carl Wilhelm Scheele (1742-1786) fait réagir du bleu de Prusse avec de l’acide sulfurique à chaud et obtient le cyanure d’hydrogène. Joseph Louis Proust (1754-1826) expose ses « Recherches sur le bleu de Prusse » en 1799 et c’est Louis Joseph Gay-Lussac (1778-1850) qui détermine sa composition en 1811. Le bleu de Prusse est au final un ferrocyanure de fer (III), hydraté : [Fe(III)]4[Fe(II)(CN)6]3 ,(H2O)x.

Ce pigment est le premier créé artificiellement. Les peintres européens l’utilisent dès 1710. Comme il a un pouvoir colorant élevé, il sert aussi en teinture. Lors de lessives de linges blancs jaunis, il est ajouté à l’eau de lavage afin d’obtenir à nouveau des linges blancs. De nos jours, il a de nombreuses applications. En mécanique, on vérifie l’ajustage de pièces plates au marbre. En chaudronnerie, il est utilisé comme couche de marquage car il résiste à l’eau et aux solvants. En chimie analytique, il sert à l’identification des ions cyanures. En médecine, il est très efficace pour éliminer le césium 137 et le thallium du corps humain et utilisé en cas d’irradiation.


T. Grison, La Teinture du Dix Neuvième Siècle en ce qui concerne la laine et les tissus, Paris, 1884 (Collections SEIN). Cliché G. E.

 

Pour en savoir plus

Fer : curiosités ; Bleu de Prusse, bleu de Turnbull, sur le site de l’UdPPC (Union des professeurs de physique et de chimie)

De la teinture des laines au moyen du Bleu de Prusse, de P. Raymond fils, Annales de chimie et de physique (Paris), 1828, t.39, pp. 44-77

De la teinture du bleu de Prusse, de Homassel, in Cours théorique et pratique sur l'art de la teinture en laine, soie, fil-coton, fabrique d'indienne en grand et petit teint, (1807), Edit. Courcier, Paris, pp. 277-278

Mémoire sur la composition de la matière colorante du bleu de Prusse, de J.-F. Clouet, Annales de chimie (Paris), (1791/10) t.11, pp.30-35

Auteur(s) : Texte : Catherine Marchal
Vidéo : Réalisation : François Demerliac ; Auteur scientifique : Catherine Marchal et Françoise Brénon ; Production : Fondation de la Maison de la Chimie / Virtuel
Mots-clés : Dippel, Diesbach, ferrocyanure de fer (III), césium 137, thallium
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Une pile : quel nom étrange ? Quelles sont donc les « choses empilées » dans cet objet ? Pour cela, il faut remonter à la fin du 18e siècle et aux observations de Galvani sur ce qu’il appelait alors « l’électricité animale ».

Luigi Galvani (1737 - 1798) était professeur d’anatomie à l’université de Bologne en Italie, ville pionnière pour l’enseignement de cette science. Au cours de la dissection d’une grenouille dans un laboratoire où étaient présentes des machines électrostatiques, l’un des assistants de Galvani, en touchant avec son scalpel le nerf crural de la grenouille, constata la contraction du muscle de la cuisse, en même temps qu’une étincelle éclatait dans une machine électrostatique à proximité.

Très intrigué par cette découverte, et après de nombreux autres essais, Galvani s’aperçu que cette contraction pouvait aussi être obtenue lorsque l’on mettait en contact deux fils constitués de deux métaux différents, reliés l’un au nerf crural et l’autre au muscle de la cuisse (l’« arc galvanique »). Il en tira la conclusion que les contractions seraient dues à une « électricité animale » qui proviendrait de l’animal et se déchargerait lorsque nerf et muscle seraient reliés par les métaux.

Alessandro Volta (1745-1827) était, lui, professeur de physique à l’université de Pavie. Très intéressé par les expériences de Galvani, il les reproduisit mais eut rapidement des doutes sur l’origine animale de l’électricité. Il lui est venu l’idée, pour amplifier l’effet, d’empiler alternativement des disques de métaux différents, d’abord du zinc et de l’argent, puis du zinc et du cuivre, séparés par des rondelles de carton imprégnées d’une solution saline, par analogie avec les « humeurs » au sein des organismes animaux. Il observa que cette pile pouvait le « frapper » quand il touchait les deux extrémités avec les mains nues, de façon analogue à une bouteille de Leyde (1). Mais, contrairement à cette dernière, déchargée après le premier contact, et à sa surprise, le « choc » était renouvelé à chaque fois qu’il touchait la pile. La pile électrique était donc née.

Les chimistes vont s’approprier cette invention, présentée par Volta, en 1800, à Paris, à l’Académie des Sciences devant Bonaparte, puis à Londres. Davy, à Londres, l’utilise pour isoler le sodium et le potassium, en 1807. Ensuite Gay Lussac et Thenard, isoleront en 1810, à leur tour, ces deux métaux, en utilisant « la grande pile », installée à l’école Polytechnique et construite grâce à un financement de l’empereur Napoléon. C’est la naissance de l’électrochimie.

(1) La bouteille de Leyde, connue depuis 1745, est constituée par une bouteille en verre d’où sort par le goulot une tige métallique, remplie de feuilles d’étain chiffonnées et entourée d’une feuille métallique. Elle était utilisée comme curiosité dans les foires pour donner des chocs électrostatiques.

 

Pour en savoir plus
Ressources issues du site Histoire de l’électricité et du magnétisme (CNRS) :


 


Gravure de U. Parent, extraite de L. Figuier, Les Merveilles de la science, 1867, p. 669 (collection privée)


Expérience de Galvani sur une grenouille (image : Archivist Adobe Stock)

Auteur(s) : Texte : François Nief et Françoise Brénon
Vidéo : Réalisation : François Demerliac ; Auteur scientifique : François Nief et Françoise Brénon ; Production : Fondation de la Maison de la Chimie / Virtuel
Mots-clés : pile, Galvani, Volta, grenouille, électrodes, électrolyte, solution saline, électrolyse, électrochimie
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Mots-clés : Rilsan®, polyamide technique, biosourcé, matériaux

L'’huile de ricin est un laxatif connu depuis l’Antiquité, mais cette réputation ne doit pas faire oublier que l’huile de ricin est à la base, aujourd’hui, du plus grand tonnage mondial de fabrication d’un polymère biosourcé avec plus de 500 000 tonnes par an ! […]

Auteur(s) : Jean-Pierre Foulon pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : métathèse, alcènes, catalyseur carbène-métal, Yves Chauvin

C'est une découverte révolutionnaire passée inaperçue, une grande avancée en catalyse homogène qui donnera une réaction majeure utilisée en pétrochimie. Tout commence en 1964, avec R.L. Banks et G.C. Bailey, de la Phillips Petroleum, qui transforment du propène en éthène et butène par chauffage en présence d’un catalyseur au molybdène. Mais cette belle découverte restait inexpliquée. […]

Auteur(s) : Jean-Pierre Foulon pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : ammoniac, nitrate, dihydrogène, diazote, Haber, Bosch

Depuis l’Antiquité, les hommes ont cherché à amender la terre pour améliorer le rendement des cultures. Les excréments ont fait partie de ces nombreux agents fertilisants. Ceux des oiseaux marins se sont accumulés aux cours des siècles au point de constituer des gisements très riches en nitrates et composés azotés, connus sous le nom espagnol guano, dans des îles proches du Pérou. Épuisés vers 1870, la relève est venue des nitrates de sodium, présents dans le désert d’Atacama, devenu chilien en 1884, à l’issue de la guerre des nitrates opposant le Pérou, le Chili et la Bolivie. En 1900, 2/3 des besoins mondiaux en nitrates étaient assurés par le Chili. […]

Auteur(s) : Françoise Brénon pour la série Une réaction en un clin d'oeil (Mediachimie.org)
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Mots-clés : santé, dilutions, dosages, molécules, médicament

Un certain nombre de personnalités ont déposé une pétition  pour demander le non-remboursement des médicaments homéopathiques. L’article rappelle l’histoire de l’homéopathie et son opposition à l’allopathie, avec les précurseurs S. Hahnemann et S. N. Korsakov. La définition des dilutions (notée CH), avec à chacune d’elle une division par 100, montre qu’après plusieurs dilutions le nombre de molécules de l’actif tend vers zéro. D’où la polémique de charlatanisme dont se défendent les homéopathes. Intervient alors pour les millions de patients qui se soignent de cette façon, l’effet placebo, auquel d’après des recherches sur le cerveau certaines populations de malades sont très sensibles.

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Auteur(s) : Jean-Claude Bernier
Source : L’Actualité chimique n° 437 (février2019) pp. 5-6
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Mots-clés : guerre, chlore, gaz toxiques, nitrates, explosifs, industrie chimique

L’article montre comment en 1914 la chimie en France était faible devant celle de l’Allemagne. Il a fallu les premières attaques, sur le front, de gaz toxiques comme le chlore ou l’ypérite pour que se développe une industrie chimique de guerre qui conduira après l’armistice à un renouveau d’une industrie moderne qui deviendra européenne. À côté de l’industrie, de nombreux chimistes chercheurs et universitaires se distinguent pour la défense de la nation ou le soin aux soldats et aux blessés : Marie et Irène Curie, G. Bertrand, A. Haller, A. Behal … sans être exhaustif. Les entreprises chimiques se sont développées dans la ligne dynamique des années de guerre en réorientant leur production pour le temps de paix comme l’on fait les industries métallurgiques et mécaniques. Ce fut aussi le temps ou devant la saignée de jeunes hommes, l’emploi féminin s’est incontestablement développé.

Un encart développe la plupart des molécules constituants les explosifs les plus courants ou sophistiqués.

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Auteur(s) : Jean-Claude Bernier
Source : L’Actualité chimique n° 434 (novembre 2018) pp. 6-10
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Mots-clés : bioéthanol, biodiesels, procédés, hydrogénation, biomasse

Sont d’abord définis les types « d’agrocarburants », le bioéthanol pour l’essence et les esters d’huiles végétales pour le diesel. Devant la concurrence américaine et brésilienne, le procédé français HVO (Hydrotreated Vegetable Oil) appliqué à l’huile de palme est tout à fait performant en qualité de carburant. On passe alors en revue les diverses utilisations des biocarburants qui sont critiquées par la Cour des comptes et une dernière enquête européenne qui montre le peu de gain en terme d’économie de gaz à effet de serre compte tenu du facteur CAS (changement d’affectation des sols). D’autres procédés de transformation de la biomasse cellulosique ou des microalgues sont mis en avant ainsi que la production de molécules biosourcées à plus haute valeur ajoutée pour la chimie plutôt que pour les biocarburants.

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Auteur(s) : Jean-Claude Bernier
Source : L’Actualité chimique n° 433 (octobre 2018) pp. 5-6
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