Anton von Schrötter (1802-1875) mit au point en 1848 la préparation du phosphore rouge, permettant une fabrication sûre des allumettes. Le prix Montyon de l’Académie des sciences de Paris lui a été décerné en 1857.
Anton von Schrötter, Chevalier de Kristelli, est né à Olmütz en Moravie (actuellement Olomouc en République tchèque) le 26 novembre 1802. Son père est pharmacien et son grand-père maternel a été maire d’Olmütz. Il a bien défendu cette ville durant la guerre de sept ans, c’est pourquoi l’Impératrice Marie-Thérèse l’a fait chevalier.
Après une enfance à Olmütz, Anton part à Vienne en 1822 afin de commencer des études de médecine. Mais, il rencontre Friedrich Mohs (1773-1839), professeur de minéralogie, et sous son influence, abandonne alors la médecine pour entreprendre des études de sciences naturelles. Friedrich Mohs est connu pour son travail sur la dureté des minéraux, pour lesquels il a conçu une échelle de dureté en 1812, encore utilisée de nos jours.
En 1827, Anton von Schrötter devient assistant à l’Université de Vienne et en 1830, il est nommé professeur de physique et de chimie à l’institut technique Joanneum à Graz. En 1838, il prend un congé de six mois afin de visiter des laboratoires universitaires et s’arrête entre autre à Göttingen, Heildelberg et Paris. À son retour à Graz, il crée un laboratoire.
En 1843, il revient à Vienne comme professeur de génie chimique à l’Institut polytechnique, et c’est en 1845 qu’il est enfin nommé à la chaire de chimie générale.
En 1848, il découvre le procédé pour préparer du phosphore rouge ce qui conduira à l’allumette de sûreté. Le phosphore se présente sous plusieurs formes. Dans la nature, le phosphore est blanc, transparent lorsqu’il est pur, luit dans l’obscurité et brûle en donnant de la lumière. Il a été utilisé pour la fabrication des allumettes mais il est très toxique. Les vapeurs inhalées par les ouvriers des fabriques d’allumettes entrainent une nécrose des os de la mâchoire. Des empoisonnements au phosphore ont eu lieu. Anton von Schrötter découvre que le phosphore blanc se transforme en phosphore rouge sous l’influence de la chaleur vers 250°C. Ce phosphore n’est pas toxique et est peu inflammable, c’est pourquoi sa découverte est importante, il n’est pas dangereux pour les ouvriers et ne peut donner lieu à des empoisonnements.
Pour la fabrication des allumettes, des essais sont réalisés en utilisant du phosphore rouge. Le phosphore est mélangé avec du chlorate de potassium puis des améliorations sont apportées, le chlorate est mis sur la tige et le phosphore sur le frottoir.
En 1873, lors de l’exposition universelle de Vienne, l’industrie des allumettes est représentée par l’Autriche, la France et la Suède. En France, c’est la Compagnie générale des allumettes chimiques qui a le monopole. Au début des années 1870, la Compagnie utilise 360 tonnes de phosphore rouge par an et fabrique 70 milliards d’allumettes, elle exporte au Japon, au Guatemala, au Pérou et en Argentine.
En France, dès 1850, Antoine Bussy (1794-1882) teste sur un chien le phosphore rouge et constate qu’il n’a aucune action toxique.
L’Académie des sciences de Paris décerne le prix Montyon le 2 février 1857 à Anton von Schrötter pour sa découverte de l’état isomérique du phosphore rouge. Le prix Montyon est un ensemble de trois prix, l’un de ces prix est décerné par l’Académie des sciences. Ce prix a été créé par Jean-Baptiste Auget de Montyon (1733-1820) entre 1780 et 1787, il a été supprimé par la Révolution et rétabli en 1815. Ce prix est de 2500 francs.
À Vienne, l’Académie des sciences est fondée le 14 mai 1847 par le roi Ferdinand 1er d’Autriche et Anton von Schrötter en est le secrétaire général dès 1851.
L’expédition Novara (1857-1859) est une expédition scientifique à laquelle participe les membres de l’Aca- -démie des sciences de Vienne. La frégate Novara a fait le tour du monde en 551 jours de navigation. Les rapports de ce voyage ont été publiés dans un ouvrage de 21 volumes et traduits en plusieurs langues, les résultats concernent de nombreux domaines scientifiques comme l’océanographie, la botanique ….
En 1873, une autre expédition donne le nom de Franz Josef Land à un archipel situé à l’extrême nord de la Russie et un cap est nommé cap Schrötter. Son nom est aussi associé à la Schrötterhorn de l’Ortlergruppe dans les Alpes.
Il meurt à Vienne le 15 avril 1875 où il est enterré au cimetière central.
Les solutions colloïdales ont été le principal sujet d’étude du chimiste autrichien, Richard Adolf Zsigmondy (1865-1929). Il a mis au point un ultramicroscope afin d’observer les émulsions. Il obtient, en 1925, le prix Nobel de chimie pour l’ensemble de ses travaux.
Richard Adolf Zsigmondy est un chimiste autrichien né le 1er avril 1865 à Vienne et mort le 23 septembre 1929 à Göttingen en Allemagne. Il commence des études de médecine qu’il abandonne pour la chimie, d’abord à Vienne puis à Munich en 1887. C’est là qu’il obtient le doctorat en 1889. Il revient à l’université de Graz en Autriche en 1893 comme professeur assistant. À partir de 1897, Il travaille à Iéna, en Allemagne, dans un laboratoire de recherches sur les verres où il étudie les verres colorés qui sont d’origine colloïdale.
Un colloïde est une suspension d’une ou plusieurs substances qui forme un système à deux phases séparées. Les particules constituant un colloïde sont très petites et ne peuvent être observées à l’aide d’un microscope.
En 1902, Zsigmondy met au point un ultramicroscope qui lui permet d’observer les solutions colloïdales grâce à la diffusion de la lumière par effet Tyndall. En 1907, il est professeur de chimie et directeur de l’institut de chimie inorganique de Göttingen, en Allemagne tout en poursuivant ses recherches sur les colloïdes.
Son ultramicroscope est utilisé aussi en médecine.
Il obtient le prix Nobel de chimie en 1925 pour sa démonstration de la nature hétérogène des solutions colloïdales ainsi que pour les méthodes qu'il a utilisées, lesquelles sont devenues fondamentales dans ce domaine d’étude. Son traité de chimie colloïdale est traduit en français en 1926.
En son honneur, un cratère lunaire porte son nom.
La cellulose, l’amidon, la pectine, l’ovalbumine, le lait, le plasma sanguin sont des suspensions colloïdales comme les peintures. Certains métaux comme l’or et l’argent peuvent être mis en suspension colloïdales.
Les détergents sont des composés tensio-actifs qui forment des suspensions colloïdales micellaires. Au niveau alimentaire, il y a de nombreux colloïdes comme les mousses, les crèmes glacées, les yaourts…
La bauxite est un minerai qui tient son nom du village des Baux-de-Provence dans les Bouches-du-Rhône. Il contient 50 % d’oxyde-hydroxyde d’aluminium AlO(OH), de la silice SiO2 et de l’oxyde de fer Fe2O3 qui lui donne sa couleur rouge. Broyé et traité à la soude par le procédé Bayer, on purifie la bauxite après précipitation et calcination afin d’obtenir l’alumine Al2O3 qui va servir à préparer le métal. L’aluminium est un métal léger de faible densité (2,7) et reste brillant grâce à une couche très fine transparente de son oxyde Al2O3 stable qui le protège de la corrosion. C’est pourquoi on l’utilise pour faire des ustensiles de cuisine, des canettes et même des avions et automobiles. [...]
L es premiers fabricants de verre étaient peut-être des marins phéniciens qui avaient établi leur camp sur une plage de méditerranée et utilisaient comme pierre pour leur foyer des briques de « natron » (Na2CO3). Ils avaient constaté que le sable et le natron produisaient des coulées de verre à l’épreuve du feu. Puis ce sont les égyptiens qui non seulement utilisaient des compositions pour la glaçure (émail) des céramiques mais aussi pour mouler des gobelets et petites bouteilles. En –250 ans av. J.-C., les babyloniens inventèrent le soufflage en cueillant la paraison (boule de verre) dans le four au bout d’une canne creuse et fabriquèrent ainsi de la vaisselle en verre. Ils laissèrent leur savoir-faire aux romains. Mais après la chute de l’empire romain, il faudra attendre, à l’exception des vitraux des cathédrales, les XIIIe et XIVe siècles et Venise, avec les verriers de l’île de Murano, pour retrouver l’art de fabrication du verre. [...]
La chimie analytique est ici le maître-mot. De la recherche au produit commercial, l’analyse est présente à toutes les étapes de la mise en oeuvre des produits chimiques pour en vérifier, la qualité, la pureté, la conformité, la stabilité. Elle sert aussi à mettre en évidence l’existence de contrefaçons… ou encore, comme dans les enquêtes policières popularisées par les séries télévisées, aider à retrouver les auteurs de crimes et délits.
Source : Série Les chimistes dans
Un matériau est fabriqué dans le but d’obtenir un objet fonctionnel doué de propriétés physico-chimiques particulières. De la recherche à la production, les chimistes jouent un rôle transversal central pour répondre à la demande en nouveaux matériaux dans de nombreux secteurs comme l’électronique, l’éolien, le photovoltaïque, les piles, le bâtiment, les transports, l’aéronautique, les industries du sport et des loisirs, les médicaments, le paramédical…
Source : Série Les chimistes dans
Transformer les matières premières de base en produits plus élaborés, pour toutes les industries, les produits finaux manufacturés sont des produits chimiques (minéraux ou organiques), destinés principalement à des clients industriels, représentants de très nombreuses activités. On dit parfois que l’industrie chimique est «l’industrie des industries ».
Source : Série Les chimistes dans
La catalyse hétérogène concerne des domaines importants tels que la dépollution ou la production d’énergie. Plus de 80 % des réactions catalytiques industrielle sont de type hétérogène.
Premier exemple : pour réduire les gaz émis par la combustion des carburants, les normes actuelles demandent de réduire de plus de 98 % les gaz émis (hydrocarbures non brûlés, CO et oxydes d’azote NOx) avec une efficacité durant plus de 160 000 km. Les pots catalytiques actuels sont capables d’atteindre ces objectifs avec des conditions de température supérieures à 1 000°C mais aussi dès les premières secondes après le démarrage du véhicule [1] !
Second exemple : on cherche à produire directement des carburants « propres ». Par exemple la synthèse de Fischer-Tropsch (FT) permet de produire à partir du gaz de synthèse CO + H2 des carburants à partir du gaz naturel, de la biomasse ou du charbon. Ainsi le gazole issu par cette réaction est dit propre car il ne contient ni soufre, ni composés aromatiques et a un excellent indice de cétane supérieur à 75 %. Des productions par FT d’hydrocarbures lourds (supérieurs à C20) utilisent le cobalt comme catalyseur [2a] et [2b].
L’étude de la catalyse a été entreprise avec succès comme en témoignent les prix Nobel suivants : Sabatier en 1912, Langmuir en 1932, Chauvin en 2006 et Erti en 2007. Mais beaucoup de catalyseurs industriels ont été mis au point selon des approches empiriques des phases actives qui sont déposées sur des supports [3a] et [3b].
Dans ce contexte, la simulation moléculaire par le modèle quantique connait un développement rapide depuis une vingtaine d’années. Cela permet de comprendre la structure du catalyseur, son rôle dans la réaction chimique mais aussi de prédire et concevoir de nouveaux catalyseurs. Les méthodes classiques de mécanique quantique utilisant des solutions approchées de l’équation de Schrödinger ne sont pas appropriées pour la modélisation des réactions sur des catalyseurs hétérogènes. La théorie de la fonctionnelle de densité (DFT) utilise non plus la fonction d’onde mais la densité électronique : une fonction plus simple qui dépend uniquement des coordonnées spatiales (x, y, z). La dépendance de l’énergie vis-à-vis de la densité électronique n’est pas non plus connue et nécessite aussi des approximations. La méthode est moins précise que celle utilisant la fonction d’onde mais permet d’étudier des systèmes de grande taille à plus de 1 000 atomes ! C’est donc la méthode de choix pour l’étude théorique des catalyseurs hétérogènes et de la réaction catalytique. En effet elle permet de suivre l’énergie au long de la réaction en calculant les minima d’énergie des états intermédiaires mais aussi les états de transition [4].
La sélectivité d’une réaction catalytique est essentielle en catalyse hétérogène. Ainsi, par exemple, l’hydrogénation sélective du buta-1,3-diène en but-1-ène, qui est une réaction d’intérêt industriel est un des premiers exemples étudiés. La simulation du chemin réactionnel avec le platine, catalyseur classique d’hydrogénation, ne conduit pas ici sélectivement au but-1-ène, alors que l’emploi d’un alliage Pt-Sn montre que le profil réactionnel conduit alors sélectivement au but-1-ène [5] !
La méthodologie des simulations des réactions de catalyse hétérogène est bien développée actuellement autour de trois points :
- la compréhension structurale avec des calculs de modèles pour les sites de surface et des caractéristiques spectroscopiques
- les calculs des profils d’enthalpie libre pour le chemin réactionnel
- les prédictions que l’on peut énoncer sur l’activité sélective, et la conception de nouvelles phases catalytiques ![6]
Les méthodes spectroscopiques in situ permettent l’observation des espèces adsorbées sur le catalyseur, mais il est parfois difficile d’observer les différents intermédiaires réellement impliqués.
- L’effet isotopique de remplacement d’un atome d’hydrogène par un atome de deutérium a été utilisé par exemple dans la synthèse de l’ammoniac. Il a ainsi été démontré que l’étape de dissociation de N2 est l’étape cinétiquement déterminante pour des catalyseurs au fer.
- La technique de substitution rapide et soudaine d’un réactif par son correspondant isotopique peut être observé en spectroscopie de masse et cela a permis d’étudier un grand nombre de réactions industrielles telles que la réduction catalytique des NOx, l’oxydation du méthane en CO et le vaporéformage.
- Il en est de même avec la spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier qui a montré par exemple les réactions d’échange sur des zéolithes des groupes OH avec une substitution isotopique de H par D [7].
Quelques structures de catalyseurs industriels © Alex.pin / Fotolia
Pour approfondir et illustrer ce sujet nous avons sélectionné les ressources suivantes :
[1] « Un exemple de matériau spécifique : pots catalytiques et dépollution automobile », jeu pédagogique en ligne Super Kimy, site Mediachimie.org : avec une belle image pédagogique illustrant les différentes étapes de fonctionnement d’un catalyseur en milieu hétérogène
[2a] « Matériaux catalytiques et catalyse hétérogène » de B. Coq et al., L’Actualité Chimique n° 338-339 (février-mars 2010) p. 64-73, qui présente clairement la synthèse de Fischer-Tropsch
[2b] « Comment fabriquer de l’essence avec du charbon ? La réaction de Fischer-Tropsch » (lien direct vers le PDF), Réactions en un clin d’œil sur le site Mediachimie.org, pour une approche historique
[3a] « Modélisation par théorie de la fonctionnelle de la densité de catalyseurs hétérogènes à base de silice-alumines amorphes » de C. Chizallet et al., L’Actualité Chimique n° 403 (janvier 2016) pp. 30-38
[3b] « La catalyse au service de l’automobile » Jean-P. Brunelle, Colloque Chimie et Transports 3/04/2013, Fondation de la Maison de la chimie, Chimie et transports (2014) EDP Sciences, ISBN : 978-2759810758, pp. 49-62. Article où de nombreux exemples de catalyseurs associés au produit créé sont cités dans des tableaux clairs.
[4] « La modélisation moléculaire s’invite dans l’industrie. Exemples de recherches pour le développement de matériaux, procédés et produits chimiques dans le domaine de l’énergie et de l’environnement », F. Bisquay et al., L’Actualité Chimique n°353-354 (juin-juillet-août 2011) pp. 66-73. On y trouve un bel encart résumant le principe de la méthode de la densité fonctionnelle.
[5] « La chimie théorique : une méthode clé pour une chimie durable », P. Sautet, L’Actualité Chimique n°382-383 (février-mars 2014) pp. 78-82. On y trouve un beau paragraphe (très clair) sur l’utilisation de la méthode de la fonctionnelle de densité, mais aussi les courbes des profils réactionnels avec toutes les valeurs d’enthalpie libre de la réaction sélective d’hydrogénation du buta-1,3-diène en but-1-ène.
[6] « Apport du calcul ab initio en physico-chimie des surfaces catalytiques complexes : exemple des catalyseurs métalliques à base de platine ultra-dispersés sur alumine » de C. Chizallet, L’Actualité Chimique n°417 (avril 2017) pp. 34-39. On trouve dans cet article une belle étude des effets de taille, de morphologie et d‘états de surface de catalyseurs.
[7] « Fiche catalyse n° 51 - Utilisation de marqueurs isotopiques pour l’identification des mécanismes réactionnels en catalyse hétérogène » de N. Bion et M. Richard, L’Actualité chimique n°425 (janvier 2018) pp. 63-64. On trouve dans ce petit article des exemples simples illustrant les marqueurs isotopiques qui permettent de caractériser des mécanismes réactionnels en catalyse hétérogène.
Socle :
- Les systèmes naturels et les systèmes techniques
- Les représentations du monde et l'activité humaine
Programme Cycle 4 :
- Organisation et transformations de la matière
- Des signaux pour observer et communiquer
Source : D’après l’article La chimie crée sa couleur sur la palette du peintre de Bernard Valeur publié dans l’ouvrage « La chimie et l’art », EDP Sciences, 2010, ISBN : 978-2-7598-0527-3
Socle :
- Les systèmes naturels et les systèmes techniques
- Les représentations du monde et l'activité humaine
Programme Cycle 4 :
- Décrire la constitution et les états de la matière
Source : D’après l’article La chimie au service du goût de Patrick Etiévant publié dans l’ouvrage « La chimie et l’alimentation », EDP Sciences, 2010, ISBN : 978-2-7598-0562-4