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69ᵉ Congrès national des professeurs de physique et de chimie

Lille, du 2 au 5 novembre 2022 Venez profiter des conférences plénières, ateliers et conférences à la carte, visites de laboratoires et d'entreprises, des exposants, du repas de gala, des visites touristiques… Le congrès
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Lille, du 2 au 5 novembre 2022

Venez profiter des conférences plénières, ateliers et conférences à la carte, visites de laboratoires et d'entreprises, des exposants, du repas de gala, des visites touristiques… Le congrès est toujours un moment exceptionnel de formation, de rencontres et d'échanges.

Toutes les informations, les détails et les inscriptions sur https://udppc-lille2022.sciencesconf.org/
Suivez les mises à jour et actualités sur @UdPPC_Lille.

Les inscriptions seront closes le 7 octobre.
Il ne sera pas possible de s’inscrire après la clôture des inscriptions : ne tardez pas à faire vos choix et à vous inscrire !

 

Focus sur une sélection d’activités

Une conférence plénière...

  • CP4 – Les batteries dans le contexte du développement durable
    par Jean-Marie Tarascon, Professeur au Collège de France, Chaire « Chimie du solide et de l’énergie », ancien Professeur à l’Université de Picardie Jules-Verne (1994-2013)
    Médaille d’or du CNRS 2022

Des ateliers à la carte…

  • A11 – WIMS, une plateforme de ressources interactives pour l'enseignement
  • A9 – Le premier principe de la thermodynamique : un outil efficace et rigoureux au service de la formation des élèves sur la thématique : « énergie »

Des conférences à la carte...

  • MC5 – Le mix électrique
  • MC13 – Les chiffres de l'énergie du numérique, et des quantités de calcul et de mémoire
  • MC16 – Physique et énergie de demain
  • MC17 – Véhicules autonomes pour la mobilité automatisée et connectée

Des visites d'entreprises et de laboratoires...

  • VE5 − Centrale thermique de Bouchain
  • VL1 − Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (INRIA)
  • VL3 − Service commun des laboratoires de Lille (DGDDI et DGCCRF)

Des visites touristiques...

VT3 – La Piscine de Roubaix (Musée d’art et d’industrie André Diligent, Roubaix), la Villa Cavrois (Croix), La Manufacture de Roubaix (Musée de la mémoire et de la création du textile, Roubaix)
VT8 – Arras : la carrière Wellington, la ville, le Beffroi, le Centre historique minier de Lewarde

- Événements

Chimique, vous osez dire chimique ?

C’est le titre du dernier livre de Bernard Meunier qui parait aux CNRS Editions. Voilà un ouvrage qui sans faire l’apologie du « tout chimique » met à mal de nombreuses idées fausses sur la chimie rencontrées trop souvent
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C’est le titre du dernier livre de Bernard Meunier qui parait aux CNRS Editions. Voilà un ouvrage qui sans faire l’apologie du « tout chimique » met à mal de nombreuses idées fausses sur la chimie rencontrées trop souvent dans les médias. Heureusement l’auteur les combat non avec des théories et des phrases toutes faites, mais avec l’exposé de faits scientifiquement et historiquement prouvés et bien plus convaincants.

L’histoire de l’eau de Javel par exemple est riche d’enseignements : ses propriétés désinfectantes ont sauvé des centaines de milliers de personnes, le rappel de son utilité pour arrêter les épidémies de choléra même récentes et l’usage du chlore essentiel à la distribution de l’eau potable en sont l’illustration. Le bannissement des désinfectants chlorés dans les hôpitaux est-il à mettre en parallèle avec l’augmentation des maladies nosocomiales ?

Le chapitre sur les insecticides, fongicides, etc. est bien plus brûlant ; l’histoire des organochlorés dans la lutte contre les moustiques porteurs de la malaria et les zones de reproduction des sauterelles souligne combien ils furent et sont encore utiles dans les zones du continent africain où des millions d’individus sont sous la menace mortelle du paludisme et de la famine. En passant, l’auteur tire à boulets rouges sur les fausses analyses relatives au glyphosphate menées sans rigueur scientifique et méthodes normatives, hélas reprises sans vérification par les media généralistes.

C’est ensuite un plaidoyer pour un usage raisonnable des plastiques et pour des méthodes innovantes de recyclage.

Dans son souci d’être utile à la vie quotidienne, Bernard Meunier insiste sur les compositions des lessives, des additifs pour l’alimentation, la nature des meubles et des encres de tatouages et des risques possibles engendrés. Il insiste ensuite sur les médicaments « chimiques » qui à 90% sont vendus en pharmacie. Il alerte sur les dangers de commander « n’importe quoi » par internet et sur la dangerosité des médicaments contrefaits trouvés souvent en Afrique. On peut avec l’auteur déplorer que les « bigpharma » ont en Europe abandonné la synthèse chimique des molécules de base et principes actifs ce qui nous confronte à des ruptures de livraison qui ont été multipliées par 10 en 20 ans.

Les derniers chapitres mettent l’accent sur les produits naturels très vantés de nos jours et mis souvent en opposition aux produits de synthèse. Lisez le paragraphe sur la composition chimique d’un fruit mise sur une étiquette énumérant composition sucres et additifs comme on a l’habitude de voir sur les emballages, c’est jubilatoire ! Bien sûr il fallait un chapitre sur les drogues douces et dures presque toutes issues de l’extraction de végétaux et les dangers qui accompagnent leur usage en tant que perturbateurs du système nerveux central (PSNC) et de l’addiction mortelle qu’ils provoquent.

L’auteur Bernard Meunier, directeur de recherches émérite du CNRS, membre de l’académie des sciences qu’il a présidé en 2015/16 et de l’Académie nationale de Pharmacie a su se mettre au niveau d’un lecteur généraliste. On y trouvera des informations fiables et des anecdotes instructives sur les produits « chimiques » que nous côtoyons tous les jours. Elles sont parfois surprenantes car « politiquement incorrectes » mais « scientifiquement correctes ». Je crois que tous les professeurs des écoles et professeurs de SVT et de physique chimie devraient avoir cet ouvrage de salut public qui devrait être remboursé sinon par la sécu mais par l’Éducation nationale.

 

Jean-Claude Bernier
septembre 2022

 

Livre : Chimique, vous osez dire chimique ?
Bernard Meunier
CNRS Editions (2022) 20 €
https://www.cnrseditions.fr/catalogue/chimie/chimique-vous-osez-dire-chimique/

 


 

- Éditorial
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H₂O, la molécule vedette de l’été

La sécheresse qui a sévi en 2022 et les vagues de chaleur estivales ont entrainé cet été des évènements extrêmes et des manifestations « hypohydriques » que nous n’avions pas souvent connus. La plus spectaculaire a été
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La sécheresse qui a sévi en 2022 et les vagues de chaleur estivales ont entrainé cet été des évènements extrêmes et des manifestations « hypohydriques » que nous n’avions pas souvent connus. La plus spectaculaire a été les nombreux départs de feux de forêts ou de broussailles facilités par une végétation asséchée mais aussi la faible croissance des cultures vivrières et le jaunissement des prairies que broutent les animaux, les coupures d’eau potables dans certains villages ruraux et les fissures apparues dans de nombreuses maisons individuelles bâties sur terrain argileux.

Tout ceci montre une fois de plus l’importance d’une molécule ; l’eau H2O indispensable à la vie quotidienne et à la vie tout court.

H2O l’indispensable

Notre corps est composé en moyenne à 65% d’eau (pour un adulte) (1). En cas de canicule il est indispensable de boire car si la teneur baisse de quelques % des troubles apparaissent. On peut être privé de nourriture pendant plusieurs jours mais pas d’eau. Toute activité physique nécessite une énergie chimique stockée dans notre corps sous forme d’une précieuse molécule l’ATP (2) qui se transforme en ADP en libérant de l’énergie PI utilisée par nos muscles. L’équation simplifiée dans un effort d’endurance (3) qui consomme du dioxygène est :

Glucose + O2 + ATP = PI +ADP + CO2 + H2O.

Lors d’un effort sportif on libère donc du CO2 mais aussi de l’eau. C’est pourquoi lors par exemple du tour de France les coureurs doivent boire beaucoup de litres d’eau car ils en perdent beaucoup sous forme de vapeur ou de sueur.

Cette eau essentielle à la vie combien en dispose-t-on ? Sur notre planète Terre, l’eau est essentiellement sous forme d’eau salée (97,5 %) et 70% de l’eau douce est sous forme de glace ou de neige. Pour l’humanité c’est bien sûr la ressource en eau douce qui est importante elle est de l’ordre de 35 millions de km3 dont la moitié est normalement accessible (4).

     

Peut-on craindre une pénurie ? Les experts de la FAO estiment les besoins à 14 000 km3/an soit moins de la moitié des ressources en eaux souterraines qui paraissent suffisantes surtout si on y ajoute une bonne fraction récupérable des 70 000 km3 eaux pluviales annuelles. Encore faut-il différencier la consommation de l’eau et son prélèvement. Pour faire tourner une turbine produisant de l’électricité l’eau prélevée à la rivière y retourne instantanément. En agriculture l’eau nécessaire à l’irrigation est consommée car elle passe dans la plante ou est évaporée.

Une végétation sans H2O

La photosynthèse utilisée par les plantes est une réaction d’oxydo-réduction utilisant l’eau et le dioxyde de carbone CO2 de l’atmosphère qui, sous l’action des photons venant du soleil, fabrique les réserves de la plante sous forme de molécules hydrocarbonées (ici le glucose).

La réaction globale peut s’écrire : 6 CO2 + 6 H2O + photons = C6H12O6 + 6 O2

La chlorophylle est le pigment de couleur verte des feuilles qui permet l’absorption des photons.

Lorsque l’eau vient à manquer les arbres avertis par leurs capteurs sécrètent de l’éthylène à partir d’un de leur acide aminé la méthionine et ne synthétisent plus la chlorophylle responsable de la couleur verte (5). D’où en cette période de sécheresse les couleurs jaunes des prairies et l’amoncellement de feuilles rouges ou marrons dans nos rues en pleine été plutôt qu’en automne.

Le manque d’eau limite également le rendement de la photosynthèse en diminuant les réserves de la biomasse en molécules hydrocarbonées sucres ou amidons d’où la maigreur des épis de blé et de maïs appauvrissant les récoltes de 2022.

H2O au secours des feux de forêts

Les végétaux asséchés sont des cibles choisies pour s’enflammer le plus souvent accidentellement. L’augmentation de la température et la pyrolyse des végétations entrainent l’émission de nombreux composés volatils. Sont présents des composés benzéniques et phénoliques et beaucoup de terpènes pour les pins sans compter l’émission forte d’éthylène en situation de stress hydrique et thermique qui transforme l’arbre en une torche enflammée (6).

Une fois de plus l’eau vient au secours de ces incendies. Lorsqu’on arrose les flammes avec de l’eau, celle-ci se vaporise en puisant des calories au foyer et grâce à sa chaleur latente de vaporisation élevée fait baisser la température de 750°C à 400°C. De plus la vapeur d’eau prive la combustion des composés carbonés de l’oxygène de l’air. Les célèbres Canadair© larguent sur le front de flammes 7 m3 d’eau avec des agents retardateurs tels que les polyphosphates ou argiles, des agents mouillants ou moussants comme l’hexylène glycol (ou 2-méthyl-2,4-pentanediol) qui isolent le végétal de l’air brulant environnant. La couleur rouge des largages est apportée par l’oxyde de fer (Fe2O3) en suspension pour que les avions suivants voient la trace de l’intervention précédente. Notons bien qu’une bonne pluie de 10 mm venue du ciel a bien plus d’efficacité car à elle seule elle représente 100 m3 d’eau par hectare.

Des conséquences du manque de H2O

Plus insidieux sont les effets de la sécheresse sur les réserves souterraines et les bâtiments. Lorsque les terrains souvent argileux sont très secs, ils deviennent durs et peu perméables car leur porosité diminue. En cas de pluie l’eau ruisselle et ne pénètre pas en profondeur pour rejoindre les nappes phréatiques et réserves souterraines qui s’épuisent ce qui entraine des coupures d’eau potable (7). Et comme souvent après les vagues de chaleurs surviennent des orages libérant des volumes de pluie importants en quelques heures qui provoquent par ruissellement des inondations en milieu rural comparables à celles des zones urbaines cimentées et bitumées. Plus grave aussi est la fissuration des habitations dont on dit que potentiellement 10 millions de foyers pourraient être touchés. Ceci est dû aux variations de volume de roches naturelles les argiles ou phyllosilicates lamellaires (8). L’exemple type est la montmorillonite Si4Al2O10(OH)2 où Al peut être partiellement substitué par Mg. La structure en feuillets s’équilibre électriquement alors avec des cations séparant les feuillets. Ces cations plus ou moins hydratés peuvent en fonction de l’hydratation faire varier les inter-distances entre 10 nm et 1000 nm. D’où une aptitude au gonflement et inversement au retrait lors d’une déshydratation qui peut provoquer des déplacements de terrain importants au gré des variations d’humidité. C’est ce qui arrive à nombre de maisons individuelles bâties sur des terres argileuses majoritaires en France.

Ces inconvénients et tracas ne sont rien comparés à ceux que subissent un milliard d’individus qui sur terre manquent d’eau potable et les 2 milliards qui en plus ne disposent pas d’installations de traitement des eaux usées… La chimie a encore beaucoup à faire !

Jean-Claude Bernier
Août 2022

Pour en savoir plus :
(1) Chez un nourrisson, l’eau représente 75 % de son poids total, chez l’adulte, elle descend à 65 % (soit par exemple 45 litres d’eau pour un homme de 70 kg).
(2) Optimisation des performances, complexité des systèmes et confrontation aux limites, in La chimie et le sport, collection Chimie et… junior (EDP Sciences) 2015
(3) Quelle chimie dans le sport ? Épisode 1 : le métabolisme énergétique aérobie , vidéo Blareaureau au labo - Mediachimie
(4) L’eau, un nouvel « or bleu », de J.-C. Bernier, L’actualité chimique n° 381 (janvier 2014) p. 4-5
(5) Pourquoi et comment les feuilles se colorent en automne et tombent en hiver ? de C. Agouridas et F. Brénon, Question du mois, Mediachimie.org
(6) La chimie des feux de forêts, de J.-C. Bernier, éditorial, Mediachimie.org
(7) L’eau, une ressource indispensable pour la ville, de A. Charles, A. Harari et J.-C. Bernier, série « Chimie et… en fiches », Mediachimie.org
(8) Cristaux, cristallographie et cristallochimie. Des symétries aux propriétés : fiche 4 - les systèmes monoclinique et triclinique, de A.Harari et N. Baffier, année de la cristallographie (2014), Mediachimie.org
 

Crédits :
Figures : DR Medichimie.org
Illustration : Pxhere / licence CC0 Domaine public Lien

- Éditorial
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Connaissez-vous le verre vert ?

À cette question je sens que nombreux vous répondrez : « mais oui bien sûr j’ai plusieurs bouteilles de bière qui sont de couleur verte ». Et vous aurez raison. Car en effet, du point de vue chimique, il se trouve que
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À cette question je sens que nombreux vous répondrez : « mais oui bien sûr j’ai plusieurs bouteilles de bière qui sont de couleur verte ». Et vous aurez raison. Car en effet, du point de vue chimique, il se trouve que dans les sables utilisés pour faire ces bouteilles en verre, il y a des impuretés de fer et notamment l’oxyde FeO qui contient du fer à l’état d’oxydation Fe2+. C’est lui qui donne cette coloration verte car il absorbe les rayonnements rouges. Par contre si on oxyde le fer en Fe3+ on obtient alors une coloration brune due à l’absorption des rayonnements bleus (1). La plupart des verres utilisés pour l’agroalimentaire, notamment les boissons, sont de ces couleurs et ils méritent en plus le « label vert » car ils sont majoritairement recyclés.

Fabrication

Revenons un peu sur la fabrication du verre (2). Il s’agit d’une réaction à haute température entre 3 composants : la silice SiO2 (sable), le carbonate de sodium Na2CO3 et le carbonate de calcium ou calcaire CaCO3. On forme alors à 1600°C un verre composé de SiO2, Na2O et CaO) à l’état liquide. Il y a simultanément un avec dégagement de CO2 issu de la décomposition des carbonates. Cette fabrication initiale dans des fours verriers exige une forte énergie fournie majoritairement par des carburants fossiles gaz ou fioul et des matières premières minérales . En France, on fabrique environ 5 millions de tonnes de verre par an sur 60 sites verriers qui consomment 3% de l’énergie totale et émettent aussi 3% du CO2 (3) émis par l’industrie.

Comment alors « décarboner » l’industrie verrière et « verdir » notre verre ?

Recyclage

Depuis les années 70, l’habitude de recycler le verre a été prise et de nombreux points de collectes des bouteilles, flacons et bocaux en verre ont été établis, ce qui permet de recycler près de 80% des verres creux. Sur le territoire plus de 3 bouteilles sur quatre sont recyclées, plus de 2 Mt sont collectées et sont à 100% recyclées.

Pour être efficace et renouvelable à l’infini, le recyclage (4) doit commencer par un tri très strict, et tout d’abord pour les particuliers, lorsqu’on dépose les bouteilles dans les containers. Après les collectes s’opère un tri mécanique qui permet d’éliminer les papiers et objets métalliques puis un tri optique automatique permettant d’éliminer les objets céramiques non fusibles et enfin un tri infra rouge qui permet de séparer les verres colorés des verres blancs transparents. Après ce tri sévère, les verres sont broyés et transformés en calcin, poudre qui peut alors être refondue à environ 1500°C puis à nouveau moulé et façonné en de nouvelles bouteilles.

Cette re-fusion est économique, peut se faire à température plus basse et économise de l’énergie ; elle évite aussi l’émission du CO2 issu de la décomposition des carbonates observé lors de la première fabrication. On estime que la fusion d’une tonne de calcin évite entre 400 kg et 700 kg de CO2 et permet l’économie de 1,300 t de matière première dont plus de 800 kg de sable.

Certaines verreries expérimentent l’oxycombustion qui consiste à remplacer l’air d’alimentation des brûleurs qui chauffent le four par de l’oxygène pur ce qui évite de réchauffer l’azote de l’air, et ainsi d’économiser 25% de gaz, et de réduire d’environ 15% les émissions de CO2 et surtout de diviser par 10 celles des oxydes d’azote (NOx.).

Le verre plat

Le recyclage du verre creux est plutôt bon. Il n’en est pas de même pour le verre plat et la laine de verre qui sont des déchets issus du BTP. La modernisation d’une ligne de production de verre feuilleté à Aniche dans le Nord a permis l’expérience d’une production bas carbone.

Dans le cas général, après la fusion, le verre fondu passe sur un bain d’étain fondu selon le procédé float, et se refroidit de 1100°C à 600°C. Après refroidissement les plaques sont découpées puis après stockage passent dans une ligne où elles sont lavées puis chauffées en salle blanche dans une machine hermétique où elles sont collées deux par deux avec une couche interne de polybutyral de vinyle (PBV)(i) qui améliore les performances acoustiques, d’isolation et anti-effraction des vitrages.

Une expérience en mai 2022 a constitué à produire 2000 t de verre plat zéro carbone avec une alimentation exclusive en électricité verte et biogaz et en recourant au calcin seul, évitant ainsi l’émission de 1000 t de CO2 et le recours à 2300 t de matières premières (sable et carbonates).

Cette expérience préfigure une évolution de la production du verre plat où l’introduction de calcin de verres plats doit progressivement augmenter. Le gisement en France de vitrages issus de la déconstruction ou du remplacement des fenêtres est de 200 000 t et seulement 5% sont utilisés. Cela tient aux difficultés de collectes lors des chantiers et de la qualité nécessaire à obtenir un calcin avec moins de 0,5% d’impuretés.

Il en est de même pour la laine de verre (5). Seule une usine à Orange pour l’instant collecte et recycle les panneaux et rouleaux fibreux qui souvent trainent sur les chantiers de déconstruction ou de rénovation avant d’être enfouis. Seules moins de 1000 t sont recyclées après tris et dissolution du polymère d’imprégnation sur un gisement national estimé 120 000 t. Ici encore la constitution d’un réseau regroupant les sociétés du BTP et les nombreuses entreprises artisanales de la construction parait nécessaire.

Ne soyons pas trop pessimistes ; même si les productions de verre ne sont pas encore « décarbonées », les vitrages isolants et intelligents (6) permettent d’économiser de l’énergie puisqu’ils sont 5 à 8 fois plus efficaces qu’une simple vitre et de nous préserver aussi des températures externes. De même les panneaux en laine de verre avec un coefficient de conduction de la chaleur λ très faible permettent de supprimer les passoires énergétiques et donc d’économiser des kWh et d’éviter l’émission de millions de tonnes de CO2.

Voilà des productions verrières « vertes » ?

 

Recyclage du verre 

 

Jean-Claude Bernier
Juillet 2022

 

(i) PBV : le motif répétitif de ce polymère synthétique a pour formule :

avec R = C3H7

 

Pour en savoir plus
(1) La couleur des verres, de Jacques Livage, colloque Chimie et lumière (20 février 2020)
(2) Comment faire des vitrages avec du sable ? La réaction de fusion du verre, de Jean-Claude Bernier, série Une Réaction en un clin d’œil, Mediachimie.org
(3) Le CO2, matière première de la vie, in La chimie, l’énergie et le climat, collection Chimie et… junior (EDP Sciences) 2017
(4) Recyclage et valorisation des déchets, Revue Chimie Paris (2013)
(5) Isolation dans l’habitat : la chimie pour ne pas gaspiller de calories !, de Jean-Claude Bernier, in La chimie et l’habitat (EDP Sciences) 2011
(6) Vers des vitrages intelligents et connectés pour des bâtiments durables et confortables, de Stéphane Auvray, colloque Chimie et lumière (20 février 2020)
 

Crédits :
Recyclage du verre : DR Mediachimie.org
Molécule PVB :CC BY-SA 4.0, Lien
Illustration : Nordseher /Pixabay Lien

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Un Chimiste du solide, médaille d’or du CNRS

La médaille d’or du CNRS est l’une des plus prestigieuses distinctions scientifiques françaises. Elle est attribuée cette année au professeur Jean-Marie Tarascon, aujourd’hui professeur au collège de France, mais sa
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La médaille d’or du CNRS est l’une des plus prestigieuses distinctions scientifiques françaises. Elle est attribuée cette année au professeur Jean-Marie Tarascon, aujourd’hui professeur au collège de France, mais sa carrière s’est déroulée dans plusieurs lieux scientifiques et pas exclusivement dans l’hexagone.

Jeune diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure de Chimie de Bordeaux il fait sa thèse au laboratoire de Chimie du solide de P. Hagenmuller avec J. Etourneau sur la synthèse et l’étude des borures de terres rares. Après sa thèse il part à l’université de Cornell aux États-Unis pour un stage post doc, mais il est repéré par la Bell Telephone Company qui l’engage dans son laboratoire de recherche où il continue à travailler sur les chalcogénures et siliciures aux propriétés supraconductrices. C’est après 1985 qu’il est rattrapé par la folie des supra YBaCuO et à la Bell, nuit et jour il enchaine les synthèses et substituants dans la pérovskite pour élever la température de transition au-delà de 91K.

C’est le tremblement de terre en Californie qui coupe le courant au labo et montre la faiblesse des batteries au plomb de secours qui l’oriente vers l’électrochimie.

Il travaille d’abord sur un spinelle qu’il connait bien LiMn2O4 qui par substitutions l’amène progressivement aux LiMnCoO4 puis au LiCoO2. Les bases cathodiques des batteries lithium–ion étaient posées et il réalise avec l’équipe de la Bell la première batterie tout plastique largement brevetée.

C’est en 1995 à la suite du décès du professeur M. Figlarz qu’à la demande de plusieurs scientifiques il revient en France à l’université d’Amiens et prend la direction du Laboratoire de réactivité et chimie du solide. Il lui donne une orientation marquée vers les matériaux pour le stockage de l’énergie. Il développe une plateforme d’essais et de tests de batteries « boutons » prototypes en mettant à profit ses connaissances cristallographiques et l’apport d’équipements de diffraction RX et de microscopie électronique avec l’association au CNRS. Très vite le laboratoire picard devient un centre d’attractivité. Il réussit dans les années 2000 à fédérer un bon nombre de laboratoires sous le nom d’ALISTORE (i), qui réunit avec des crédits européens les meilleurs laboratoires d’électrochimie en Europe, académiques et industriels. En 2010 il obtient la création du réseau français RS2E (ii) qui permet à plusieurs unités du CNRS, des universités, du CEA et des industriels de mettre en commun leurs réflexions et leurs innovations sur le plan national. Il continue les innovations et avec son complice de la première heure Mathieu Morcrette, conscient que les quantités de lithium, de cobalt ou de nickel ne sont pas éternelles, il imagine la batterie au sodium qui est bien moins couteuses et plus respectueuse des ressources naturelles. Progressivement il augmente avec son équipe sa capacité de stockage et crée la société picarde TIAMAT energy (iii) qui produit et commercialise les nouvelles batteries ion–sodium. Nommé professeur au Collège de France en 2014, il se préoccupe maintenant plus particulièrement de la fiabilité des batteries en imaginant d’y mettre des capteurs et des éléments autoréparables pour prolonger leur durée de vie et améliorer leur longévité.

Jean-Marie Tarascon avec encore son bon accent du Sud-Ouest chère aux rugbymen est non seulement un chercheur remarquable et un entraineur d’hommes et de femmes innovants, c’est aussi un bon pédagogue qui a la passion de convaincre son auditoire ; voir par exemple les conférences sur les batteries et le stockage de l’énergie (iv) au collège de France. Il sait aussi avec des mots simples expliciter la chimie à l’intérieur d’une batterie pour les jeunes lycéens.

Lors d’une dernière conférence qu’il donnait sur une vision du stockage de l’énergie pour un développement durable, il jetait un regard lucide sur le développement des batteries et leur conditions d’usage : utiliser de l’énergie renouvelable pour charger les batteries, développer des matériaux d’électrodes à plus haute capacité et avec des métaux abondants, développer des batteries plus éco-compatibles, injecter de l’intelligence artificielle dans les batteries pour autoriser une longue voire une seconde vie, lancer une politique de recyclage massive incluant des circuits courts et des procédés de récupération avec des normes strictes.

Cela ressemble furieusement à une feuille de route R&D pour le futur du stockage électrochimique.

Merci Jean-Marie !

Jean-Claude Bernier
Juillet 2022

 

(i) https://alistore.eu/
(ii) https://www.energie-rs2e.com/fr
(iii) http://www.tiamat-energy.com/
(iv) Sélection de conférences et cours de M. Tarascon au Collège de de France

 

Illustration : capture Entretien avec Jean-Marie Tarascon, Collège de France, 2015, licence CC by-nc-sa 3.0

- Question du mois
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Pourquoi ne pas mélanger de l’eau de Javel et du détartrant ?

Peut-être avez-vous été tenté, en vous croyant plus efficace, de mettre simultanément de l’eau de Javel et du détartrant dans la cuvette des WC afin de la désinfecter et de la rendre plus blanche. Surtout ne faites pas
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Peut-être avez-vous été tenté, en vous croyant plus efficace, de mettre simultanément de l’eau de Javel et du détartrant dans la cuvette des WC afin de la désinfecter et de la rendre plus blanche.

Surtout ne faites pas cela ! Pour en être convaincu, découvrez la composition de ces produits et leurs rôles respectifs.

Le tartre ou calcaire

Ces deux termes sont synonymes. De formule chimique CaCO3, il s’agit du carbonate de calcium.

Le calcaire qui se dépose provient des eaux dites dures (car riches en ions calcium et magnésium mais aussi en ions bicarbonate (i)). En effet les eaux de pluie qui s’infiltrent, s’enrichissent en ions présents dans les couches géologiques traversées. Ainsi les régions calcaires vont conduire à des eaux dures dans les nappes phréatiques (ii).
La réaction de déposition du calcaire sur les canalisations et dans la cuvette des WC est la suivante :

Ca2+ + 2 HCO3-CaCO3 (solide) + CO2 (gaz) + H2O

Le détartrant

Comme son nom l’indique il a pour rôle de retirer le tartre.

Or l’ion carbonate présent dans le calcaire est une base (composé capable de capter des ions H+ (iii) ) et le détartrant est un acide (composé capable de libérer des ions H+). Ils peuvent donc réagir l’un sur l’autre selon

CaCO3 + 2 H+aq → Ca2+ + CO2 (g) + H2O

Les bulles que vous observez sont donc des bulles de dioxyde de carbone et le dépôt de calcaire est éliminé. Le dégazage du dioxyde de carbone rend la réaction totale (iv).

L’acide présent dans un détartrant de WC varie selon les marques (v). On rencontre essentiellement des mélanges sous forme de gels ou poudres contenant de l’acide chlorhydrique, de formule HCl ou de l’acide phosphorique H3PO4 ou de l’acide sulfurique H2SO4. Sur une échelle de pH allant de 0 à 14 dans l’eau, la solution acide d’un détartrant pour WC a un pH proche de 1 ou 2 selon les produits. Le vinaigre ne convient pas (vi).

L’eau de javel

L’eau de Javel est une solution basique contenant aussi des ions hypochlorite ClO- et des ions chlorure Cl-.

La solution basique est due à de la soude ou hydroxyde de sodium NaOH dissoute dans l’eau. Ainsi l’eau de Javel a un pH voisin de 12 ou 13 selon sa concentration.

Quand vous utilisez l’eau de Javel vous recherchez à utiliser les propriétés des ions hypochlorite. En effet leur propriété essentielle est d’être un oxydant puissant ce qui a pour effet de détruire pratiquement tous les composés comme les virus, les bactéries et autres microorganismes ainsi que les produits issus de la décomposition de la matière organique. Les colorants et les odeurs disparaissent aussi.

Que se passe-t-il donc lors d’un mélange de détartrant et d’eau de Javel ?

L’acide du détartrant va consommer les ions hydroxyde de la soude présente dans l’eau de Javel selon la réaction, H+aq + OH- → H2O. Donc le pH va diminuer. Si on se retrouve en excès de détartrant le milieu devient acide et les ions hypochlorite deviennent alors instables en présence des ions chlorures.

Il se forme un dégagement de dichlore, gaz très dangereux pour la santé selon

ClO- + Cl- + 2 H+ → Cl2(g) + H2O

Alors n’hésitez pas à avertir vos connaissances et les enfants qu’il ne faut pas réaliser un tel mélange.

N’oubliez jamais de lire la notice des produits ménagers que vous utilisez. Dans le cas du détartrant il expressément écrit : « ATTENTION : Ne pas mélanger avec du chlore ou de la Javel ». Dans le cas de l’eau de Javel, l’information est la suivante : « Attention ! Ne pas utiliser en combinaison avec d'autres produits. Peut libérer des gaz dangereux (chlore) ».

La bonne marche à suivre

Dans un premier temps éliminer le calcaire en laissant agir le détartrant. Une fois le calcaire éliminé, rincer abondamment la cuvette en tirant successivement 2 à 3 chasses d’eau.

Puis ajouter de l’eau de Javel et laisser agir. Enfin, rincer abondamment.

Dans la mesure du possible aérez la pièce.

Et prenez toujours des précautions quand vous manipulez de l’eau de Javel : portez des lunettes et des gants de ménage.

Françoise Brénon et l’équipe question du mois
 

 

(i) Le bicarbonate a pour autre nom hydrogénocarbonate et pour formule chimique HCO3-. L’eau naturelle ayant un pH voisin de 6 à 7 les ions carbonate passent sous la forme hydrogénocarbonate, en raison de la stabilité de ces espèces en fonction du pH.

  

(ii) Les régions de France où l’eau est dure sont celles où les terres sont calcaires (Ile-de-France, Champagne crayeuse, Nord, Alpes…). Les régions où l’eau est douce c’est-à-dire qu’elles contiennent peu d’ions calcium et magnésium sont les régions de la Bretagne et du Massif Central…).

(iii) L’ion H+ est aussi appelé ion hydrogène. On le note pour simplifier H+aq, notation que l’on lit « ion hydrogène aqueux ».

(iv) Vous avez déjà rencontré cette réaction dans la question du mois : Pourquoi le champagne, le vin ou du Coca-Cola® peuvent-ils abimer le marbre ?

(v) Pour en savoir plus on peut consulter les fiches techniques des produits commerciaux en cherchant "fiche technique" + nom du produit sur un moteur de recherche.

(vi) Le vinaigre blanc contient de l’acide acétique (avec un pH voisin de 3,5) ce qui n’est pas assez efficace pour détartrer les WC. On l’utilise plutôt par exemple pour détartrer les cafetières. La composition des détartrants commerciaux tout prêts pour cafetières sont plutôt les acides citrique, lactique, sulfamique… (gamme de pH 2 à 4).

 

Crédits illustration : DR. Mediachimie

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Colloque Chimie et Matériaux Stratégiques - mercredi 9 novembre 2022

Le cycle des Colloques “Chimie &…” s'enrichit d'un nouvel opus : Chimie et Matériaux StratégiquesMercredi 9 novembre 2022 Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris   Les métaux et matériaux stratégiques
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Le cycle des Colloques “Chimie &…” s'enrichit d'un nouvel opus :

Chimie et Matériaux Stratégiques
Mercredi 9 novembre 2022

Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris

 

Les métaux et matériaux stratégiques sont le plus souvent relativement rares ou difficilement accessibles, inégalement répartis sur la planète, mais mondialement indispensables dans des utilisations industrielles stratégiques, notamment la décarbonation de l’Énergie dans toutes ses applications industrielles et environnementales.

Les conflits géopolitiques actuels ne font qu’amplifier l’importance de ce thème, car ces matériaux sont indispensables à la vie d’un État et leur manque entraine des impacts industriels et économiques négatifs importants, liés à un approvisionnement ou à une exploitation difficile.

Dans le cadre de notre mission de formation des jeunes et d’information des citoyens, il nous est apparu important de faire un point scientifique objectif sur les différentes facettes de ce thème transdisciplinaire au cœur de l’actualité, dans lequel la chimie joue et jouera un rôle important. Les conférenciers ont été choisis parmi les meilleurs experts de la recherche, de l’industrie, de la politique et de l’économie, dans les différents domaines concernés.

Ce colloque est ouvert sur inscription à un large public avec une attention particulière aux jeunes et à leurs enseignants. Pour que ce colloque puisse être accessible au plus grand nombre, il sera diffusé en direct sur la chaine YouTube de Mediachimie. Le niveau se veut accessible à tous pour permettre un large débat.

Danièle OLIVIER | Vice-Présidente de la Fondation internationale de la Maison de la Chimie

 

Voir le direct sur Mediachimie ou sur Youtube.

En savoir plus

Inscription gratuite et obligatoire : INSCRIPTIONS

- Éditorial
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L’hélium, l’autre gaz indispensable

Depuis plusieurs semaines on entend parler de la crise du gaz, le conflit avec la Russie mettant les nations européennes dans une situation énergétique délicate du fait d’une dépendance non maîtrisée aux importations du
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Depuis plusieurs semaines on entend parler de la crise du gaz, le conflit avec la Russie mettant les nations européennes dans une situation énergétique délicate du fait d’une dépendance non maîtrisée aux importations du gaz russe. Il s’agit bien évidemment du méthane CH4 (1) utilisé comme combustible et aussi matière première pour l’industrie chimique. Il y a un autre gaz dont on parle peu mais qui est tout aussi indispensable, non dans le domaine de l’énergie, mais dans celui de la santé, de la soudure, de l’électronique, de la recherche et de la défense, c’est l’hélium.

Un gaz rare très curieux

L’hélium (symbole He) de numéro atomique 2 et de masse molaire 4 g/mol est un gaz plus léger que l’air (0,138 g/L), très bon conducteur de la chaleur. Il a une température de liquéfaction très basse – 269°C (4K). C’est, après l’hydrogène, l’élément le plus répandu dans la croute terrestre provenant des particules α (He2+) issues de la désintégration d’éléments radioactifs (2). L’hélium liquide est incolore et subit un changement de phase à son point lambda à – 271°C où il devient « superfluide » c’est-à-dire qu’il n’a pas de viscosité mesurable, qu’il passe à travers des capillaires quasi nanométriques et rampe le long des surfaces. 1000 fois plus conducteur thermique que le cuivre, ses propriétés sont expliquées en le classant comme un fluide quantique. Curiosité de laboratoire, il est très utile pour l’exploration du domaine proche du zéro absolu, des propriétés des « atomes froids » et bientôt des nouveaux calculateurs quantiques.

Un gaz industriel

L’hélium est un sous-produit de l’extraction du gaz naturel qui peut en contenir de 0,3% à 7%. C’est en 1927 que l’un des premiers gisements d’Hugoton Basin fut exploité aux États-Unis. D’autres réserves gazières naturelles comme celui du CO2 dans le Wyoming sont exploités depuis 1986.

Toute une série d’opérations est effectuée pour obtenir un gaz pur. On le débarrasse d’abord des impuretés comme l’eau, le mercure et le sulfure d’hydrogène (H2S) par adsorption sur du charbon actif puis on sépare le méthane par cryogénie. On refroidit ensuite à – 196°C pour éliminer l’azote et les restes de méthane. Enfin on brûle le gaz avec de l’oxygène sur catalyseur pour éliminer l’hydrogène (3). Enfin on brûle l’hydrogène restant en présence de l’hélium avec de l’oxygène sur catalyseur (4).

Une dernière purification donne un gaz hélium pur à 99,99% qui peut être stocké.

Les États-Unis sont les principaux producteurs, viennent ensuite le Qatar, l’Algérie, l’Australie, la Russie et la Pologne. La production mondiale est de l’ordre de 160 millions de m3 dont 50% aux États-Unis.

La saga de la production d’hélium est assez intéressante. Dans les années 1970 les États-Unis sont en situation de quasi-monopole. Le gouvernement fédéral a financé avec un partenariat privé un pipe-line de 600 km reliant les installations de production aux cavités de stockage texanes. Les volumes extraits de l’ordre de 4000 tonnes sont multipliés par 5 pour atteindre 20 000 t en 1970. Le gouvernement juge que les stocks sont suffisamment importants et la production diminue largement.

Le processus est accéléré avec la fin de la guerre froide dans les années 90 et compte tenu de la dette des sociétés fédérales de maintenance des infrastructures et de stockage, la loi de privatisation de l’hélium en 1996 précipite l’écoulement du milliard de m3 stockés mais fait baisser les prix qui n’encouragent pas les nouveaux investissements US. La forte demande internationale qui s’accélère pour l’électronique et la fibre optique en Europe et en Asie va multiplier le prix au m3 qui passe de 2 $ à plus de 6 $, l’hélium devenant un produit critique. La production va alors s’internationaliser d’abord en Algérie où une alliance Air Products – Air liquide – Sonatrach va mieux exploiter l’extraction à partir des ressources gazières. Puis c’est le Qatar, avec les entreprises allemande Linde et française Air liquide, qui voit sa production sera multipliée par trois. Le tableau indique la production mondiale internationalisée actuelle maintenant en millions de m3 :

paysUSQatarAlgérieRussieAustraliePologne
M m3835114541

Un gaz très utile

Sa faible température d’ébullition (4K) le fait abondamment utiliser en cryogénie. Les bobines des aimants en NbTi (nobium, titane) ou NbSn (nobium, étain) des supraconducteurs des IRM en contiennent chacun plusieurs dizaines de litres, le grand collisionneur de Hadrons (LHC, Large Hadron Collider) du CERN en contient 120 t et les bobines des aimants du projet ITER en contiendront des milliers de litres (5); dans nos laboratoires les spectromètres RMN sont également refroidis à l’hélium liquide (6).

Gaz inerte et ininflammable il est utilisé pour purger les réservoirs d’hydrogène liquide et aussi pour pressuriser les réservoirs d’oxygène liquide utilisé comme propergol (7) pour les moteurs Vulcain des fusées Ariane. La NASA pour sa part utilise plusieurs millions de m3 par an. Son inertie le fait utiliser dans la soudure à l’arc pour l’inox, le cuivre et l’aluminium ; il protège les métaux de l’oxydation et il est moins couteux que l’argon. Il protège sous pression le tirage des monocristaux de silicium ou germanium et celui des fibres optiques. Plus léger que l’air il sert à gonfler les ballons et dirigeables, à la place de l’hydrogène ; rien que pour les ballons sondes la météo en utilise près de 4 millions de m3 annuellement.

Du fait de sa moindre solubilité dans les solutions aqueuses et notamment dans le sang il remplace l’azote dans les bouteilles servant à la respiration des plongeurs et évite ainsi les embolies gazeuses par dégagement d’azote dans les artères lors de la décompression.

Bien plus fluide que l’air il est utilisé dans les disques durs scellés des serveurs du « cloud » : on peut ainsi empiler plus de disques durs et l’hélium favorise la vitesse de lecture des données. Il peut les garder en température à 4 ou 5°C améliorant leur longévité.

Enfin il permet de faire la fête : on gonfle facilement les ballons multicolores (8) des anniversaires et en inspirant l’hélium à la place de l’air sa faible densité change la voix vers les aigus pour amuser l’assistance.

Plus sérieusement, l’Europe avait déclaré en 1994 l’hélium produit critique et stratégique compte tenu de sa production géographiquement centrée et de son utilisation indispensable pour certaines industries. En 2020 sa criticité a été annulée. En France il y a une capacité faible de production au Blanc-Mesnil et une société 48-Energy a déposé un permis de recherche dans la Nièvre.

Jean-Claude Bernier
Juin 2022



Pour en savoir plus
(1) Le biogaz, une énergie d’avenir ? de Jean-Claude Bernier, éditorial Mediachimie.org
(2) Les réactions nucléaires dans les étoiles, par Lucien Ransinangue, dossier pédagogique Nathan / Mediachimie.org
(3) Gaz de schistes : pour aujourd’hui ou pour demain ? de Julien Lefebvre, Noël Baffier et Jean-Claude Bernier, une fiche Chimie et…en fiches, cycle 4, Mediachimie.org
(4) Zoom sur les derniers résultats de la production d’hydrogène « décarboné » de Jean-Pierre Foulon et Françoise Brénon, Zoom sur, Mediachimie.org
(5) Quelle échéance dans la disponibilité pour l’option « fusion de l’hydrogène » ?, de Bernard Bigot, Colloque Chimie et énergies nouvelles (10 février 2021)
(6) La résonance magnétique nucléaire au service de la biologie structurale, de Nicolas Birlirakis et al.,  L’Actualité Chimique n°353-354 (juin-juillet-août 2011) p. 100-109
(7) La propulsion des fusées et des futurs avions chez Air Liquide, de Pierre Crespi, Colloque Chimie, aéronautique et espace (8 novembre 2017)
(8) Pourquoi mon ballon s’envole ? Question du mois, Mediachimie.org

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Palmarès des 38e Olympiades de la Chimie

Cette année, 36 lycéen(ne)s parmi près de 2 500 jeunes de toute la France et des lycées de l’étranger, avec l’aide de l’AEFE, ont participé aux épreuves finales du concours national des 38e Olympiades de la Chimie à
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