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Mots-clés : charpentes, sécurisation, voûtes, arcs-boutants

Le lendemain de l’incendie de la toiture de Notre Dame, la course contre la montre est engagée. Sous l’impulsion et les directives de l’architecte en chef Philippe Villeneuve, rejoint plus tard par Remy Fromont et Pascal Prunet, les hommes se lancent dans le sauvetage et la sécurité de la cathédrale.

Engagés dans cette réussite, ils ont fait appel à plusieurs entreprises afin de répondre et exécuter leurs consignes. Des tailleurs de pierres, des échafaudeurs, des cordistes, des couvreurs et des charpentiers ont travaillé sans relâche pour sauvegarder le monument.

Mon entreprise LE BRAS FRERES a réalisé tous les travaux de confortement par cintres et étaiements sur la cathédrale. Depuis le début des opérations de sécurisation, nous avons coordonné l’ensemble des travaux de renforcements bois et métalliques sur le monument. A savoir, nous avons travaillé :

  • Sur la conception des cintres bois pour soutenir les arcs‐boutants,
  • Sur la réalisation des planchers bois pour ceinturer les murs gouttereaux et ainsi aider à la poursuite des travaux de sauvegarde,
  • Sur les renforts des Beffrois,
  • Sur les nombreux étrésillonnements des zones sinistrées,
  • Sur la conception de chevalements intérieurs,
  • Sur les renforts de voûtes.

Fortement investi dans la sauvegarde de ce monument, mon entreprise animée essentiellement par du personnel passionné par son métier, nous possédons toutes les technicités et le savoir‐faire nécessaire pour que la cathédrale Notre Dame, chantier emblématique hors du commun, retrouve sa beauté d’antan.

Mon bureau d’études interne à l’entreprise composé de jeunes ingénieurs et dessinateurs hautement qualifiés nous a permis une grande réactivité sur l’étude et l’exécution des travaux. La charge de travail à ce moment était tellement importante qu’il a fallu que toute la société LE BRAS FRERES soit mobilisée ; et ceci, depuis la secrétaire jusqu’au compagnon travaillant à l’atelier ou ceux directement sur terrain, sans oublier le service logistique. Tous les salariés de l’entreprise (présents ou non sur ce chantier) étaient concernés et mobilisés. C’est grâce à l’implication de tous que la sécurisation de l’édifice a pu se faire.

Toutes ces prestations de consolidation et sécurisation ont été visées par les architectes en chef des monuments historiques. Leurs appuis historiques et techniques ont permis de coordonner parfaitement et rapidement les opérations.

La compétence professionnelle et la conviction de chaque membre de mon entreprise nous ont permis de finaliser la sécurisation et le confortement de ce monument. En permanence, je suis resté en étroite collaboration avec les compagnons charpentiers et échafaudeurs, le bureau d’étude, les ateliers et les donneurs d’ordres.

Sur toute cette opération, nous avons été dirigés et soutenus par le Directeur Général des opérations de sauvegarde de la cathédrale Notre Dame, il a été un moteur important
tout au long de ces travaux. Le travail de la reconstruction est encore long, nous devrons garder le rythme sur le long terme.

Ce jour, je vais vous présenter plus particulièrement la sauvegarde des voûtes à travers la méthodologie d’étaiement par cintres que l’on a accomplie au niveau des arcs‐ boutants et des voûtes.

Seront présentées toutes les étapes pour la sauvegarde du monument. Nous commencerons par la numérisation, la conception mécanique des cintres, jusqu’à l’aboutissement de la pose. A cela, nous expliquerons les phases de fabrication et assemblage de toutes ces pièces.

 

Vidéo de la conférence (durée : 14:40)
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Auteur(s) : Julien Le BRAS, Président Directeur Général Groupe Le Bras Frères
Source : Colloque Chimie et Notre-Dame, 9 février 2022
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Mots-clés : Notre‐Dame de Paris, Geoffroy‐Dechaume, ateliers Monduit, corrosion galvanique

Le 11 avril 2019, eut lieu la dépose des statues des douze apôtres et des quatre évangélistes qui ornaient la base de la flèche de la cathédrale Notre Dame de Paris. Elles devaient rejoindre les ateliers de la SOCRA en Dordogne pour une restauration fondamentale. Quatre jours plus tard un incendie ravage la flèche et la charpente de l’édifice, faisant de ces œuvres de véritables miraculées.

Durant les deux années qui suivirent, les statues, créées par le sculpteur Geoffroy‐Dechaume et réalisées par les ateliers Monduit, furent restaurées en atelier suivant des protocoles spécifiques pour le traitement des armatures internes et de l’épiderme en cuivre. Les pathologies rencontrées sont celles que nous rencontrons habituellement sur ce type d’ouvrage : altération de l’épiderme, corrosion galvanique de l’armature interne en fer pur. Cette campagne de restauration aura été également l’occasion d’aborder les questions relatives à l’aspect de surface de l’épiderme en cuivre et des traitements de finition. Aujourd’hui présentées dans les galeries de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine à Paris, ces œuvres retrouveront leur emplacement d’origine à la fin des travaux de reconstruction de la flèche.

 

Vidéo de la conférence (durée : 25:49)
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Auteur(s) : Richard BOYER, Directeur Général SOCRA
Source : Colloque Chimie et Notre-Dame, 9 février 2022
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Mots-clés : feu, pierre, métal, plomb, interdisciplinarité

Lors de l’incendie du 15 avril 2019, le feu a provoqué de nombreuses altérations chimiques des matériaux en présence, accompagnées bien sûr d’altérations physiques et mécaniques. L’eau utilisée par les pompiers n’a pas moins altéré matières et édifice, de même que celle, venue du ciel, qui a continué de pénétrer dans la cathédrale tant que l’échafaudage initial n’a pas été enlevé. Pierres, plomb, bien sûr, bois, fer et verre ont donc subi des modifications plus ou moins fortes, et dont les implications structurelles sont plus ou moins grandes.

Les scientifiques qui se sont portés au chevet de l’édifice sont pour une partie d’entre eux des spécialistes des matériaux anciens, issus de l’université ou du CNRS, ou de leur conservation et de leur restauration, et dans ce cas, plutôt issus du ministère de la Culture. Ils se sont trouvés confrontés à des altérations de nature diverse. Les températures atteintes ont par exemple transformé le plomb en oxydes, transportés par aérosol, qui se sont déposés sur tout l’intérieur de l’édifice et doivent être enlevés pour pouvoir rendre une cathédrale dépolluée et nettoyée aux fidèles et au public. Ces oxydes sont souvent venus s’ajouter à des plombs plus anciens, dus à la pollution automobile, ou à la saleté produite par l’activité au sein de la cathédrale. Le nettoyage des différents matériaux concernés (métal des grilles, bois du mobilier, peintures murales, vitraux, pierre) doit être mené selon des techniques qui peuvent aussi relever de processus chimiques mais qui doivent surtout respecter le matériau patrimonial original qui a subi déjà une première attaque. Dans certains cas, par ailleurs, ce plomb a fusionné avec la pierre créant quasiment un nouveau matériau. La pierre elle‐même sous l’effet de la chaleur connaît des modifications et des transformations qui se manifestent par des variations de couleur et d’aspects, significatifs de changements structurels internes.

L’eau peut entraîner la formation de sels, et de fortes altérations des matériaux en véhiculant différents matériaux à l’état de solutions, et c’est pourquoi les produits utilisés pour le nettoyage doivent être particulièrement bien choisis.

Par chance, les sculptures de la flèche par Viollet‐le‐Duc et Geoffroy‐Dechaume ont été déposées avant l’incendie et leur restauration a permis des observations précises sur leur histoire, et leur matérialité.

Enfin, au‐delà du clin d’œil, le chantier scientifique de Notre‐Dame en rassemblant des scientifiques venus de laboratoires et d’horizons très différents a contribué à former une véritable communauté et à rapprocher des gens qui ne se connaissaient pas et ne travaillaient pas ensemble, à renforcer l’interdisciplinarité des approches de ce bâtiment emblématique. Plus encore, de nouvelles méthodes de travail et de recherche, de nouveaux outils se sont mis en place pour rassembler ces connaissances et créer quasiment de nouveaux champs disciplinaires.

En cela, le chantier de Notre‐Dame a bien une dimension alchimique humaine.

 

Vidéo de la conférence (durée : 11:34)
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Vidéo de la conférence (durée : 12:23)
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Auteur(s) : Pascal LIÉVAUX, Conservateur général du patrimoine, délégation à l'inspection, à la recherche et à l'innovation, direction générale des Patrimoines et de l'Architecture et Aline MAGNIEN, Conservatrice générale du patrimoine, Directrice du Laboratoire de Recherche des Monuments historiques, Ministère de la Culture et de la Communication
Source : Colloque Chimie et Notre-Dame, 9 février 2022
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Mots-clés : Notre‐Dame de Paris, patrimoine, métiers, sécurisation, restauration

Symbole universel de Paris et de la France, chef‐d’œuvre de l’architecture gothique, la cathédrale Notre‐Dame de Paris fascine et inspire, depuis plus de huit siècles, les pèlerins, les visiteurs et les artistes du monde entier. Inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco au titre des Rives de la Seine, Notre‐Dame de Paris est intimement liée au destin de la France et aux grandes heures de son histoire.

Le 15 avril 2019, un incendie violent a touché au cœur la cathédrale provoquant une vive émotion à travers le monde et un élan de générosité et de solidarité sans précédent.

Grâce à la mobilisation de la brigade de sapeurs‐pompiers de Paris, Notre‐Dame de Paris a pu être sauvée des flammes.

Depuis l’incendie, un vaste chantier s’est mis en place afin d’assurer la sauvegarde et la renaissance de la cathédrale et de lui redonner sa splendeur.

Jusqu’à l’été 2021, artisans et compagnons venant de toute la France, équipes de l’établissement public, maître d’ouvrage, et architectes en chef des monuments historiques, maître d’œuvre, ingénieurs et chercheurs, experts du ministère de la culture, ont sauvegardé la cathédrale, étape préalable et nécessaire à sa future restauration.

Grâce à leur travail considérable et à leur mobilisation, Notre‐Dame de Paris est entièrement consolidée et sécurisée.

La phase de restauration est désormais résolument engagée afin de tenir l’objectif fixé par le Président de la République de rendre la cathédrale au culte et à la visite en 2024. Les défis qui attendent ces bâtisseurs de cathédrales sont nombreux, faisant de ce chantier une aventure exceptionnelle.

 

Vidéo de la conférence (durée : 36:13)
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Auteur(s) : Général d’armée Jean-Louis GEORGELIN, Représentant spécial du Président de la République et président de l’établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris
Source : Colloque Chimie et Notre-Dame, 9 février 2022
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Mots-clés : monuments historiques, isotopes du plomb, métaux, pollution environnementale, traçage chimique

En avril 2019, l'incendie de la cathédrale Notre‐Dame a répandu sur Paris une quantité inconnue de poussière contenant du plomb provenant du toit et de la flèche. Pour différencier l'impact de l'incendie des sources historiques de celles, multiples, de contamination au plomb dans la ville de Paris, il était nécessaire de définir de manière univoque la signature géochimique de la poussière émise par l'incendie. En effet, aucune donnée décrivant l'empreinte géochimique du plomb du toit n'était disponible au moment de l’incendie.

Pour caractériser cette empreinte, un protocole géochimique (isotopique et élémentaire) a été appliqué aux échantillons de poussières riches en plomb collectés en différents endroits à l'intérieur de Notre‐Dame. Ainsi, la signature isotopique radiogénique du plomb (Pb) (rapports isotopiques 206Pb/207Pb et 208Pb/206Pb) et les concentrations d’une trentaine d’éléments chimiques (plomb, cuivre, antimoine, bismuth, étain…) ont été déterminés par spectrométrie de masse. Une stratégie développée spécifiquement pour cette étude a été employée pour éliminer toute source de contamination métallique potentielle due aux substrats d'échantillonnage ou aux poussières précédemment déposées. Il en a résulté que seuls les échantillons collectés sur des supports en bois, et au niveau supérieur dans Notre‐Dame pouvaient être utilisés pour une détermination fiable de la signature chimique de l’incendie. Ainsi, la signature des poussières se situe entre la signature de minerais espagnols utilisés en France durant le XIXe siècle (i.e., à la période de la construction du Paris Haussmannien) [1], des monuments historiques contemporains à la construction de Notre‐Dame, et des sédiments actuels de la Seine [2]. De plus, cette étude met en évidence des rapports élémentaires (ex. Sn/Cu) permettant une caractérisation plus spécifique de la signature.

Cette empreinte géochimique facilitera l’évaluation future de la contribution de l'incendie à la pollution au plomb dans Paris et de l'étendue réelle de la zone affectée par le panache de poussière contenant du plomb.

 

Vidéo de la conférence (durée : 26:36)
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Références :
[1] Lestel, L., Non‐ferrous metals (Pb, Cu, Zn) needs and city development: the Paris example (1815-2009). Regional Environmental Change, 2012. 12(2), p. 311‐323
[2] Ayrault, S., et al., Lead contamination of the Seine River, France: Geochemical implications of a historical perspective. Chemosphere, 2012. 87(8), p. 902‐902‐910

Auteur(s) : Sophie AYRAULT, Directrice de Recherches au CEA, Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement (LSCE), Université Paris Saclay
Source : Colloque Chimie et Notre-Dame, 9 février 2022
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Mots-clés : plomb, désintégrations radioactives successives, demi-vie, isotope, nettoyage, agent complexant

Le lundi 15 Avril 2019, alors qu’elle était en plein travaux de restauration, la cathédrale Notre-Dame de Paris, vieille de plus de 850 ans, a pris feu au niveau de sa charpente, engendrant la perte de celle-ci, de sa toiture, de son horloge et d’une partie de sa voûte. Pendant l’incendie, une course contre la montre a permis de sauver le maximum d’oeuvres d’art présentes.

Dès le lendemain, bon nombre d’architectes, d’entreprises spécialisées dans la restauration du patrimoine et d’experts scientifiques se sont portés à son chevet pour prendre les décisions qui s’imposaient au plus vite pour limiter les risques d’écroulement des murs et des voûtes restantes.

De cet élan volontaire est née une alchimie entre toutes ces personnes avec la ferme volonté de réaliser, en un temps record, le « chantier du siècle », celui de reconstruire quasi à l’identique les éléments perdus de Notre-Dame.

En parallèle à ce chantier de restauration, s’est ouvert un chantier scientifique regroupant cinquante laboratoires répartis dans toute la France, impliquant 175 personnes. Ces activités de recherche vont renouveler les connaissances sur cet édifice, son histoire et son environnement, avec la création de huit groupes de travail sur les thèmes suivants : numérique, structure, bois/charpente, métal, pierre, verre, émotions patrimoniales et acoustique. Les chimistes y prennent part comme vous pourrez le voir dans ce dossier…

Comment la chimie peut-elle contribuer à la conservation du patrimoine ?

La chimie intervenant dans beaucoup de domaines de la conservation du patrimoine, nous allons prendre un fil conducteur, celui du plomb, pour montrer quelques facettes de la chimie, liée intimement à la physique, dans la conservation du patrimoine.

 

Problématique :

  • Du plomb, mais lequel ?
    Comment éliminer le plomb déposé sur les peintures
    décoratives ?
    Comment nettoyer et déplomber les pierres murales ?2 ?

Des pistes sont également proposées pour un projet professionnel en lien avec la problématique.

Auteur(s) : Éric Bausson, en collaboration avec les équipes métiers/orientation de Mediachimie : Françoise Brénon et Gérard Roussel
Source : Dossier réalisé par les Éditions Nathan en partenariat avec La Fondation de la Maison de la Chimie et Mediachimie
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La chimie et les biotechnologies sont compatibles avec l’agriculture durable. La perception des citoyens reste cependant très éloignée de l’apport que l’innovation pourrait apporter au progrès. Depuis une vingtaine d’années, l’utilisation de produits de protection des cultures ainsi que les nouvelles technologies en agriculture sont mises au banc des accusés, responsables pour certains de la perte de la biodiversité, du réchauffement climatique, des pollutions environnementales, de la malbouffe et d’impacts sur la santé humaine.

Je développerai l’exemple des nouveaux outils apportés par la « modification ciblée du génome » qui illustre cette problématique. Les traits recherchés permettent la création de nouvelles plantes, moins consommatrices en intrants et notamment en engrais, utilisant mieux l’azote, allongeant la durée de consommation, mieux adaptés aux changements climatiques, améliorant la qualité nutritionnelle des aliments.

Ces techniques de sélection permettent des modifications beaucoup plus ciblées, plus sures, plus précises, plus rapides pour la sélection des plantes. Les méthodes traditionnelles de mutagénèse chimique ont consisté en une sélection de mutations effectuées au hasard, et n’ont jamais été règlementées. Il serait illogique de préconiser plus de réglementations pour des technologies ciblées où les modifications du génome sont parfaitement connues que pour des techniques aléatoires utilisées depuis 80 ans sans impact en matière sanitaire. Mais les controverses successives, le pilonnage et l’activisme de certains groupes organisés ont frappé l’opinion publique sur des risques sanitaires qui, aujourd’hui, avec vingt ans de recul, ne sont pourtant pas avérés. Les plus hautes instances juridiques, comme le Conseil d’Etat en France, qui tranche les litiges relatifs aux actes de l’administration ou encore la Cour de Justice de l’Union Européenne ont rendu des décisions incohérentes, influencés par ces agitateurs qui entretiennent une confusion de plus en plus marquée entre ce qui relève des savoirs issus d’une démarche scientifique et rigoureuse et ce qui relève des croyances ou des manipulations. Cette dérive conduit à ce que le débat public soit approprié par ceux qui cultivent la peur et qui traduisent cette peur non par le principe de précaution, mais par le principe d’inaction, empêchant de fait toute recherche, menaçant les fondements de la recherche scientifique et notre démocratie. Que signifie le droit s’il ne prend pas en compte les évolutions de la science ?

La vraie question de fond est de savoir comment dès la deuxième moitié du 21 ème siècle, on pourra nourrir près de 10 milliards d’individus sans prélèvements et destructions supplémentaires pour laplanète. Pour y parvenir, il faut impérativement réconcilier biotechnologies et agro-écologie.

Les risques ne doivent pas être balayés d’un revers de main, mais plutôt évalués rationnellement, en tenant à distance les croyances, les partis pris idéologiques, la propagande et les discours sectaires. Car, comme le disait fort justement le mathématicien, philosophe et prix Nobel de littérature Bertrand RUSSEL : « La science n’a jamais tout à fait raison, mais hélas elle a rarement tout à fait tort et, en général, elle a plus de chance d’avoir raison que les théories non scientifiques. Il est donc rationnel de l’accepter à titre d’hypothèse ».

 

Vidéo de la conférence (durée : 37:59)
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Auteur(s) : Jean-Yves LE DEAUT, Biochimiste, Professeur des Universités et Parlementaire Honoraire, ex-Président de l'Office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (Opecst) et membre de l'Académie d'agriculture de France
Source : Colloque Chimie et Agriculture durable, un partenariat en constante évolution scientifique, 10 novembre 2021
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Mots-clés : SDP, oomycètes, phosphite, silicium

Il existe depuis un certain nombre d'années, une volonté accrue de réduire la dépendance de l'agriculture aux pesticides de synthèse par la mutation profonde des systèmes de production et des filières. L'un des objectifs du plan Ecophyto II+ qui vise à réduire les usages de produits phytopharmaceutiques de 50% d'ici 2025, passe par une amplification des efforts de recherche, développement et innovation.

On assiste ainsi au développement de nouvelles approches en protection des plantes vis‐à‐vis des maladies fongiques, que l'on regroupe sous le terme de méthodes alternatives, dans la mesure où elles se différencient des solutions considérées comme plus conventionnelles comme l'utilisation de fongicides. Nous décrirons ici l'intégration de connaissances fondamentales autour d'une finalité pratique, à travers deux exemples particuliers de recherche et développement : la lutte contre les Oomycètes par le phosphite (Phi) et l'induction de la résistance des plantes par le silicium (Si). Phi et Si sont tous les deux considérés comme des agents de potentialisation (priming), Stimulateurs de Défense des Plantes (SDP).

On s'intéressera ensuite aux limites posées par ces deux méthodes alternatives et aux obstacles à franchir lors du passage au champ, des connaissances acquises au laboratoire.

Vidéo de la conférence (durée : 36:00)
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Auteur(s) : Jean-Marc SENG et Patrick SAINDRENAN, Institut des Sciences des Plantes de Paris-Saclay (IPS2)
Source : Colloque Chimie et Agriculture durable, un partenariat en constante évolution scientifique, 10 novembre 2021
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Mots-clés : diversification, reconception, changement d’échelle, trajectoire

L’agroécologie vise à valoriser les processus biologiques pour couvrir à la fois les attentes de production et l’ensemble des autres services écosystémiques fournis par les agroécosystèmes. À travers les pratiques, il s’agit de favoriser les fonctionnalités écologiques qui garantissent la pérennité des systèmes, notamment en termes de reconstitution de stocks de nutriments et de maintien du potentiel productif. Une des motivations est de renforcer la résilience des agroécosystèmes face à un contexte changeant. La réduction de la vulnérabilité des agrosystèmes, autrefois permise par un recours de court terme aux intrants, peut désormais être pensée au travers d’une plus grande stabilité des productions dont la diversité serait un facteur essentiel. La transition agroécologique va donc notamment viser la substitution des intrants par des processus biologique pour aboutir à des systèmes plus divers et résilients, mieux adaptés aux évolutions de
l’environnement et aux attentes sociétales.

Un premier enjeu de la transition est de passer d’un paradigme fondé sur « l’individu idéal », qui vise à obtenir l’individu, animal ou végétal, le plus performant dans un environnement rendu optimal et qui a forgé les systèmes agricoles actuels, à un nouveau paradigme fondé sur les interactions entre individus et leur intégration dans des écosystèmes, qu’il s’agisse du champ ou du paysage. La recherche s’intéresse alors aux fonctions et services écosystémiques, en s’inspirant des recherches en écologie fonctionnelle, qu’il s’agit d’adapter et de mettre à profit.

Un second enjeu est de passer d’un paradigme basé sur des normes et des référentiels, qui permet leur utilisation partout et en toutes circonstances (pour le conseil, la vente, etc.), et qui était devenu l’objectif de l’accompagnement de la production agricole, à un paradigme de diversification sociotechnique, spécifique d’un milieu et aboutissant à des trajectoires des filières avec des transitions voire des ruptures. Les systèmes correspondants sont alors caractérisés par des valeurs, des dimensions humaines, économiques et sociologiques, assumées, reconnues voire aidées, dans les territoires.

Trois domaines prioritaires pour la recherche agronomique en appui à la transition agroécologique ont été identifiés : (i) placer le vivant au cœur de la conception des agroécosystèmes, et ceci à toutes les échelles ; (ii) considérer la diversité des agroécosystèmes et l’hétérogénéité des produits ; et (iii) favoriser le changement d’échelle de l’agroécologie en prenant en compte des étendues spatiales supérieures à celles de la parcelle ou de l’exploitation. La transition agroécologique implique un processus adaptatif qui se construit en avançant, dans une trajectoire qui n’est pas totalement définie au préalable : la phase de transition apparaît donc aussi comme un objet de recherche en tant que tel.

 

Vidéo de la conférence (durée : 33:27)
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Auteur(s) : Thierry CAQUET, Directeur Scientifique Environnement d'INRAE
Source : Colloque Chimie et Agriculture durable, un partenariat en constante évolution scientifique, 10 novembre 2021
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Mots-clés : biologie de synthèse, biotechnologie, photosynthèse, amélioration des plantes

La biologie de synthèse est l'ingénierie rationnelle de la biologie et le fer de lance des biotechnologies. Plus précisément, elle a été définie par le réseau de l'espace européen de recherche en biologie de synthèse (ERASynBio) comme le design délibéré́ et la construction de systèmes, basés sur ou inspirés par la biologie, pour mettre en place de nouvelles fonctions à des fins utiles, en s'appuyant sur des principes élucidés en biologie et en sciences de l'ingénieur

Or les biotechnologies entretiennent depuis longtemps de fructueuses interactions avec les travaux d'amélioration et adaptation dans l'agriculture. Notre propos est ici plus étroit et embrasse préférentiellement les apports de la biologie de synthèse. De nombreuses modifications pourraient en principe être apportées aux plantes dans le but d'améliorer leur photosynthèse et leur croissance, de recourir à moins de produits phytosanitaires, ou d'altérer leur composition pour faciliter leur usage. Nous distinguons ci-dessous six cibles d'action :

  1. choix et amélioration des plantes pour une croissance maximisant la biomasse ;
  2. amélioration de la saccharification ;
  3. amélioration du processus de photosynthèse par le photosystème de type II ;
  4. modification du riz pour produire des composés photosynthétiques à 4 carbones ;
  5. résistance des plantes aux parasites et à la sécheresse ;
  6. fixation de carbone par une voie optimisée totalement synthétique.

Cependant, il est trop tôt pour savoir quelles seront les avancées qui mèneront à des innovations à grande échelle, parmi celles qui viennent d'être discutées ou d'autres qui n'ont pas encore percé. Mais il est déjà̀ certain, par analogie avec le passé récent, et au vu de la situation planétaire évoquée en introduction, que les adaptations variétales des plantes, les modifications plus complexes des plantes, et l'usage raisonné de la biomasse, vont occuper dorénavant une place croissante dans les préoccupations techniques, scientifiques, énergétiques, économiques, politiques, et éthiques de l'humanité́. La pression démographique rendra de plus en plus intenables les positions de principe visant à interdire les méthodes les plus efficaces pouvant être utilisées pour réaliser ces adaptations. Alors les gains en efficacité́ et rapidité́ que permet le domaine mouvant de la biologie de synthèse et ses futurs épigones ne constitueront plus un atout pour certains, mais une nécessité́ pour tous.

 

Vidéo de la conférence (durée : 42:37)
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Auteur(s) : François KEPES, Membre de l’Académie des Technologies, Membre correspondant de l’Académie d’agriculture de France
Source : Colloque Chimie et Agriculture durable, un partenariat en constante évolution scientifique, 10 novembre 2021
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