Le charbon actif (CA) est utilisé pour traiter des problèmes de pollution de plus en plus prégnants. Il n’est à confondre ni avec le biochar (i) ni avec le noir de carbone (ii).
Comment est-il préparé ?
Le CA est d’abord obtenu par pyrolyse (carbonisation) actuellement à partir de végétaux tels que du bois, des tiges de bambou, des coquilles de noix, ou de coco principalement à une température de l’ordre de 500 °C. Il faut par exemple 50.000 noix pour faire 1 tonne de charbon actif ! Il y a expulsion du gaz carbonique, d’acides organiques volatils contenus dans la matière initiale. On obtient du carbone presque pur de structure caverneuse présentant une surface poreuse d’environ de 5 m2/g. À la différence du noir de carbone, le traitement se poursuit par une activation. Il s’agit dans un premier temps d’un chauffage en présence de vapeur d’eau vers 800 °C. Sous l’action de la température élevée et de la vapeur, la matrice carbonée est littéralement criblée ce qui augmente sa porosité. Dans un second temps un chauffage vers 500 °C en présence d’agents chimiques tels que l’acide phosphorique augmente le nombre des pores permettant d’atteindre des micropores de 1 nanomètre (nm) et une surface de l’ordre de 1500 m2/g dans le charbon actif issu de coques et seulement de 2 à 50 nm pour celui issu des bois. Le CA produit est hygroscopique mais peut adsorber les produis organiques, par exemple 0,5 kg de toluène par kg de carbone. Selon les conditions expérimentales on distingue deux grandes variétés de CA.
Le charbon actif en poudre (CAP) possède une très fine granulométrie de l’ordre de 20 µm environ et de masse volumique d’environ 400 kg/m3. Il est utilisé dans le traitement des eaux pour des pollutions accidentelles à raison de 20 mg/L pour éliminer en particulier des polluants organiques à une concentration pouvant atteindre une concentration de 1.500 mg/m3 et qui sont responsables essentiellement des mauvais goûts et des odeurs désagréables des eaux.
Le charbon actif en grains (CAG) est constitué d’une granulométrie plus de l’ordre du millimètre. Il est trois fois plus cher que le CAP et est utilisé pour éliminer les polluants organiques tels que les pesticides, les composés biologiques non biodégradables et les PFAS. C’est une des étapes dans les unités de traitement des eaux pour l’obtention d’eau potable.
Le plomb et les métaux lourds ne sont pas éliminés de cette façon. L’adoucissement de l’eau n’est pas réalisé par le charbon actif. Par contre si l’eau a été adoucie via le remplacement des ions calcium par des ions sodium (sel pour adoucisseur), le passage de cette eau sur du charbon actif ne modifie pas l’adoucissement.
La régénération du charbon actif nécessite de casser les liaisons existant à la surface du CA. Actuellement le CAP chargé des impuretés est récupéré sous forme de boues et incinéré. Pour le CAG, le « décrassage » peut nécessiter un chauffage vers 1000 °C pour volatiliser les impuretés adsorbées ou dans certains cas un simple lavage avec des solutions aqueuses d’acides ou de bases par exemple.
Les applications du CA sont nombreuses. Outre le traitement de l’eau, il peut être utilisé pour décolorer les jus sucrés, par exemple le sirop de glucose. Les cartouches filtrantes des masques à gaz contiennent du CA pour fixer les gaz toxiques comme les COV (composés organiques volatils) et les dioxines contenues dans les fumées d’incinération. Le CA est aussi présent dans des éco-textiles pour éliminer les odeurs corporelles, dans des hottes aspirantes, dans les filtres à cigarettes…
En médecine, sous forme de granulés, il est employé pour traiter un grand nombre d’intoxication digestive, diarrhée, gastroentérite. Il ne présente pas d’effet toxique mais ne doit pas être conseillé par exemple lors de prise de traitements anticonceptionnels car le CA fixe le principe actif.
Les utilisations du CA se répartissent selon (iii) :
- Traitement de l’eau 40 %,
- Purification de l’air 22 %,
- Agroalimentaire 18 %,
- Pharmacie, médecine 6 %,
- Automobiles 4 %.
La production mondiale dépasse actuellement les 2 millions de tonnes.
Jean-Pierre Foulon
(i) Voir la Question du mois « Qu’entend-on par biochar ? » J.-P. Foulon, Mediachimie.org
(ii) Voir le Zoom sur le noir de carbone, J.-P. Foulon, Mediachimie.org
(iii) Source : Charbon actif sur le site l’Elementarium
Crédit illustration : Charbon actif sous forme de poudre et de bloc, Ravedave / Wikimedia Commons, licence CC BY-SA 3.0
Vidéo du mois : Agatha Christie et la cocaïne
Dominant le Jardin des Plantes à Paris, la Gloriette du Muséum est une des plus anciennes constructions métalliques, fabriquée au XVIIIe siècle dans les forges de Buffon. Mais les métaux, ça s’oxyde…
Mediachimie a créé pour vous des vidéos passionnantes et riches d’informations sur des anecdotes historiques relatives à la chimie. Retrouvez chaque mois une nouvelle vidéo.
Le noir de carbone est un matériau constitué à près de 99 % de carbone et se présente sous la forme de petites sphères de 100 nm environ entre elles pour former d’abord des agrégats de quelques centaines de nm et ensuite d’agglomérats de l’ordre de 50 µm. La production mondiale actuelle est estimée à plus de 18 millions de tonnes par an pour un marché de plus de 20 milliards d’euros ! […]
Accédez au Zoom sur le noir de carbone
Crédit illustration : Vladimir Razgulyaev / Adobe Stock
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Vidéo du mois : La Gloriette du Muséum
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Bientôt les fêtes, et donc la période des gâteaux ! Pour faire des gâteaux, on utilise des matières grasses, de l'eau, éventuellement des œufs, mais les deux ingrédients essentiels sont le sucre(i) et la farine.
Ici on ne va s’intéresser qu’à la farine ou plutôt aux différentes sortes de farine. En effet il n'y a pas que la farine de blé, car de nombreuses plantes, et pas seulement des céréales, peuvent donner des farines utilisables en cuisine. Elles sont obtenues en broyant des graines de céréales (blé, orge, épeautre, maïs...), de légumineuses (lentilles, pois chiches, haricots, soja…), de racines (manioc, pommes de terre), etc.
Elles contiennent toutes essentiellement de l’amidon. Il y a également des protéines (gluten par exemple), et d’autres composés comme des fibres si la farine est faite avec des graines complètes (avec leurs enveloppes).
L’amidon n’est pas constitué d’une seule et même molécule mais a une structure complexe qui varie selon la plante dont il est issu, d’où l’apparition de différences entre les farines.
Pour comprendre cela, il nous faut tout d’abord parler du D-glucose et de ses polymères à partir desquels est constitué l’amidon. On peut le représenter dans un plan et en perspective. Mais le cycle n'est pas plat, et on préfèrera la représentation dite « chaise ». Il existe 2 structures(ii) nommées α et β, selon la position dans l’espace du groupe OH porté par le carbone numéroté 1 (figures 1a et 1b). Le D-glucose est un sucre simple.
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Fig. 1a. α-D glucose | Fig. 1b. β-D glucose |
Les polymères de glucose et l'amidon
Des molécules de D-glucose peuvent s’associer entre elles pour donner de longues chaines appelées polymères de glucose. Il y a dans la nature de nombreux homopolymères(iii) du glucose selon la façon dont les molécules s’enchaînent.
On observe ainsi parmi ceux-ci(iv), deux enchainements possibles conduisant à deux homopolymères de glucose, l’amylose et l’amylopectine, qui constituent l’amidon.
- L’amylose est un polymère linéaire formé de plus de 1.000 unités D-glucose liés par des liaisons O-glycosidiques (α-1,4) (figure 2a).
Fig. 2a. Les numéros des atomes de carbone auxquels est lié l’atome O sont indiqués.
Elle prend une structure hélicoïdale stabilisée par des liaisons hydrogène entre les unités (6 unités par tour d’hélice) (figure 2b).
Fig. 2b. Amylose : Structure partielle ; le pointillé indique que la chaine se prolonge. - L’amylopectine est ramifiée et comporte plus de 10.000 unités D-glucose unies par des liaisons O-glycosidiques intra-chaînes (α-1,4) et inter-chaînes (α-1,6) (figures 3a et 3b).
Il y a un branchement toutes les 20 unités environ. Sa structure est plus désordonnée que celle de l'amylose.Fig. 3a. Les numéros des atomes de carbone sont indiqués Fig. 3b. Structure partielle simplifiée ; 1 seule ramification est représentée et les chaines sont évidemment plus longues.
Les farines et les compositions de leur amidon
Les proportions entre amylose et amylopectine vont être caractéristiques de l’amidon de chaque farine, dont la teneur en protéine (gluten ou autre…) est également spécifique. Ainsi blé, épeautre, orge, seigle contiennent du gluten tandis que millet, sorgho, avoine, quinoa, sarrasin n'en contiennent pas.
Pour ce qui est des ratios amylose/amylopectine on observe :
blé 35/65, maïs 25/75 (mais selon les cultivars(v) on peut avoir des chiffres très différents, comme des maïs avec un ratio jusqu'à 70/30 !), pour le manioc, la pomme de terre, en revanche il y a peu d'amylose, 20/80, et pour le riz il y a de fortes variations d’un riz à l’autre la teneur en amylose pouvant aller d’une valeur inférieure à 5% jusqu’à une valeur supérieure à 24%.
Les fécules : ce ne sont pas des farines
La plus connue est la Maïzena®. Attention ! Il s'agit d'une marque déposée et appartenant à Unilever(vi) Il vaut mieux parler de fécule de maïs. Pour faire de la fécule, on met la farine en suspension dans l'eau, on agite énergiquement et on rince plusieurs fois : on a ainsi enlevé les protéines (gluten par exemple) qui partent dans l'eau.
La fécule ne contient donc que de l'amidon, ce qui donne une poudre plus fine. Nous voilà donc de retour vers l'amidon ! Il est donc logique que les diverses fécules se distinguent par leur proportion en amylose et amylopectine, comme les farines dont elles sont issues.
La fécule est un excellent liant pour les sauces et facilite leur préparation. Il est plus facile de faire une sauce avec une fécule (celle de maïs) qu'avec de la farine.
Elle est aussi un excellent gélifiant ou épaississant. Les amidons, mis en suspension dans l'eau, chauffés puis refroidis, donnent des gels d'autant plus fermes que l'amidon est riche en amylose. En effet, les chaînes linéaires d'amylose se réassocient au cours du refroidissement, ce que ne peuvent faire les chaînes ramifiées d'amylopectine. Ainsi ceux riches en amylose (maïs) sont utilisés dans les poudres pour faire des flans. Les amidons riches en amylopectine (pomme de terre) sont plus des épaississants que des gélifiants.
La fécule est plus fine que la farine de blé et sert à alléger la pâte des gâteaux. Deux cuillerées de farine de blé équivalent à une de fécule de maïs quant à l'effet épaississant. Comment cela s'explique-t-il ? la farine est faite à partir de la mouture de la totalité de la graine (amidon + germe + enveloppe du grain), alors que la fécule ne contient que de l'amidon.
Quels critères pour choisir parmi les farines ?
Les enzymes, amylases, catalysent la digestion de l'amidon qui consiste globalement en une hydrolyse lente conduisant in fine au glucose. L’enzyme facilite la coupure des liaisons O-glycosidiques qui relient les cycles en partant d’une extrémité non réductrice de la molécule puis de proche en proche. En raison de sa structure, l'amylose est digérée plus lentement que l'amylopectine(vii). Cela peut être un critère de choix.
Actuellement, la « mode » en diététique, est de s’intéresser à l'index glycémique, IG(viii). L'IG permet de classer les aliments en fonction du pic de sucre qu'ils provoquent dans le sang. Un IG élevé, supérieur à 70, provoque un pic de la glycémie puis une chute rapide qui peut entraîner un effet « coup de barre ». Un aliment à IG modéré, entre 40 et 69, ou bas, inférieur à 40, diffuse de l'énergie plus progressivement dans l'organisme. C'est pour cet effet que certaines farines sont recommandées (voir en note le tableau d’Indice Glycémique de diverses farines(ix)).
Mais il ne faut pas se fier exagérément à l'IG, car les farines contiennent aussi des protéines, et des matières grasses, quel que soit leur IG. Il faut plutôt privilégier les farines complètes pour leurs meilleures qualités nutritionnelles. Concernant l’intolérance au gluten, les personnes concernées rechercheront pour leur régime des farines pauvres en gluten (riz, maïs, sarrasin, châtaigne, épeautre).
Conclusion
Que choisir, farine ou fécule ? La farine reste incontournable comme « matériau de base ». La fécule est un « outil » qui permet d'épaissir une sauce et de remplacer une partie de farine en rendant le plat obtenu moins énergétique puisque moins riche en glucose (50 g de fécule remplace 100 g de farine).
Coté diététique, les gâteaux restent très énergétiques car ils contiennent des matières grasses, du sucre et de la farine ou de la fécule, qui n’oublions pas conduiront à du glucose au cours de la digestion. Donc faites-vous plaisir mais avec modération si vous voulez « garder la ligne » !!
Nicole Moreau et Françoise Brénon
(i) Le sucre de table habituel est du saccharose de formule C12H22O11. Son hydrolyse conduit à du glucose et du fructose. C’est ce qui se passe au cours de la digestion du sucre.
(ii) Ces 2 structures sont dites anomères et le carbone n°1 est un site anomérique. Elles sont en équilibre par ouverture puis fermeture du cycle au niveau de la fonction acétal (entourée en rouge sur la figure ci-contre).
(iii) « homo » signifie qu'il s'agit du même sucre répété plusieurs fois, le contraire étant « hétéro ».
(iv) Il existe un autre enchainement de D-glucose (β-1,4) qui conduit à la cellulose polymère de structure des végétaux, qui peut former des fibres.
(v) Le cultivar est une variété de plante obtenue par sélection.
(vi) Maïzena sur Wikipedia.
(vii) En effet, l’attaque commence par les extrémités non réductrices des molécules de l’amylose et de l’amylopectine. Voir sur les figures 2b et 3b les parties entourées en bleu. Pour une chaîne d'amylose, il n'y a qu'une extrémité non réductrice, alors qu'il y en a plusieurs (en raison des ramifications) pour une chaîne d'amylopectine. L’extrémité réductrice est la fonction acétal (entouré en rouge) capable de s’ouvrir pour redonner l’aldéhyde réducteur. En outre, l'amylose adopte une conformation hélicoïdale, rendant l'accès des enzymes plus difficile.
(viii) Pour en savoir plus sur l’Index Glycémique, consulter Indice Glycémique sur le site Wikipedia et L’index glycémique, c’est quoi ? sur le site France Assos Santé
(ix) Indice glycémique de diverses farines
Farine | IG |
Son d'avoine, son de lupin | 15 |
Amande, noisette, cacahuète | 20 |
Soja | 25 |
Orge mondée | 30 |
Lentille, coco, pois chiche | 35 |
Sarrasin, petit épeautre, avoine, | 40 |
Quinoa, épeautre complet, blé T150 | 45 |
Seigle T130 | 50 |
Blé T80 | 60 |
Châtaigne | 65 |
Maïs, millet | 70 |
Riz complet | 75 |
Blé T45, fécule de maïs | 85 |
Riz blanc, fécule de pomme de terre | 95 |
La lettre T indiquée pour certaines farines indique le taux de cendre. Plus le T est élevé, plus la farine sera complète, plus le T est bas plus la farine de froment sera blanche et riche en amidon.
Pour aller plus loin
Des additifs pour texturer des aliments, M. Desprairies, La chimie et l’alimentation, coordonné par Minh-Thu Dinh-Audouin, Rose Agnès Jacquesy, Danièle Olivier et Paul Rigny (EDP Sciences, 2010) ISBN : 978-2-7598-0562-4, p. 83
Crédits
- Figures 1a et 1b : α-D glucose et β-D glucose, Wikipedia, domaine public
- Figures 2a et 3a : Sauget, Alix, Développement de matériaux composites fibreux hautes perfomances à matrice bio-sourcée. (Thèse, Université de Lorraine, 2014) figures complétées
- Figures 2b et 3b : Zubay, Geoffrey, Biochemistry (Addison-Wesley, 1983) ISBN 0-201-09091-0
- Illustration : F. Brénon, travail personnel
Réservez votre journée du mercredi 12 février pour participer au colloque accessible au grand public à la Maison de la Chimie.
Colloque Chimie et Alimentation
Mercredi 12 février 2025
Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris
L'alimentation a forgé l'espèce humaine et est fondamentale pour sa survie dans un contexte de croissance de la population mondiale et de changement climatique.
Tout au long de la vie, la qualité de l'alimentation est un facteur important du bien-être et de la santé. Avec l'évolution du mode de vie, l'industrie alimentaire ne cesse de progresser. Les problèmes et les défis à relever sont mondiaux, ils concernent toutes les couches de la société et sont d'ordre politiques et scientifiques. Nous nous limiterons au domaine scientifique plus généralement dans le cadre occidental européen.
L'alimentation est un domaine transdisciplinaire dans lequel les sciences de la chimie sont intervenues très tôt au niveau : de la production des aliments, de leurs transformations, de leur conservation et dans l'art culinaire, car la chimie, science de l'étude des molécules et de leur réactivité, est indispensable pour comprendre et maitriser les phénomènes mis en jeu dans ces différents domaines de l'alimentation.
Pour les maitriser, il faut comprendre, y compris à l'échelle industrielle, les phénomènes qui surviennent lors des transformations culinaires et lors de celles des ingrédients alimentaires en aliments. Il faut comprendre la chimie d'assimilation des molécules et des métaux des aliments pour mieux manger, pour y prendre du plaisir, pour être en bonne santé ou pour manger demain quand nous serons 9 ou 10 milliards d'individus sur la planète. L'actualité montre que la souveraineté alimentaire est un défi national.
L'objectif de ce colloque est de présenter l'apport des sciences de la chimie sur ces différents points, et de tenter avec les connaissances les plus récentes, de répondre aux questions que se posent les citoyens et notamment les jeunes, y compris sur la sécurité alimentaire.
Dans cet objectif, les conférenciers choisis sont des experts des domaines scientifiques universitaires et industriels et des institutions nationales et européennes concernés.
La croissance de l'industrie alimentaire entraine le besoin d'une main d'œuvre multidisciplinaire bien formée et les choix d'orientation vers ces secteurs porteurs se font dès nos lycées de formation générale ou professionnelle.
Un temps sera donc consacré à la réponse aux questions des scolaires dans le cadre des débats.
Danièle Olivier
Vice-Présidente de la Fondation de la Maison de la Chimie
Le colloque sera diffusé en direct sur YouTube et Mediachimie.org.
En savoir plus et voir le programme
Inscription gratuite et obligatoire : INSCRIPTIONS
Conception graphique : CB Defretin | Images : © Hervé THIS – Adobe Stock : © Ruslan Batiuk – © Nuttaya Nampai – © _veiksme_ – © Curioso.Photography – © HadK
Une polémique a enflé en cet automne au sujet de la vente par Sanofi à un fonds d’investissement américain CD&R de sa filiale Opella. Car il se trouve que dans ses usines de Lisieux et de Compiègne, Opellia fabrique plus de 450 millions de boites de Doliprane® l’un des médicaments le plus vendu en France. Si vous avez un peu de fièvre (1), un rhume saisonnier, des douleurs articulaires, un cachet ou une gélule dosés à 500 ou 1000 mg soulagent assez vite les troubles. Car le Doliprane® de Sanofi ou l’Efferalgan® d’UPSA et autres antipyrétiques contiennent un principe actif : la molécule de paracétamol, contraction de N-acétyl-para–aminophénol de formule brute C8H9NO2.
Pour être plus précis, Sanofi et UPSA ne fabriquent pas le principe actif qui lui est produit en Chine ou aux USA, mais ils réalisent dans leurs usines françaises des médicaments à base de paracétamol en mélangeant le principe actif et des excipients adaptés à la forme finale (gélule, comprimé, poudre, suppositoire, solution injectable, boite…).
Le paracétamol (2)
Tout d’abord une anecdote. En 1886 deux médecins chercheurs strasbourgeois travaillent sur l’effet du naphtalène et de ses dérivés sur la parasitose intestinale. Ils envoient l’un de leurs étudiants en chercher chez une pharmacie en ville. Mais au lieu d’observer une action antiparasitaire, ils observent une action antipyrétique car par erreur le produit livré n’était pas du naphtalène mais de l’acétanilide utilisé à l’époque pour étalonner les bancs Kofler afin de déterminer les températures de fusion (3). Ce n’est que plus de 60 ans plus tard, en 1948, qu’une étude américaine montre que l’acétanilide est dégradé dans le corps humain en un métabolite très actif le paracétamol, antipyrétique. C’est une illustration que dans la recherche de médicaments (4) les découvertes peuvent être faites « par hasard », par sérendipité (5), où l’observation éclairée des chercheurs a toute son importance.
En fait dès 1878 la synthèse du paracétamol avait été réalisée par un chimiste américain H. Northrop Morse en réduisant du 4-nitrophénol en 4–aminophénol, suivie d’une acylation par l’anhydride éthanoïque suivant la réaction finale suivante :
C’est après un symposium en 1951 à New York que furent présentées les antalgiques et antipyrétiques de la molécule. Sa commercialisation est retardée par la présence d’impuretés comme le para-aminophénol toxique. C’est en 1955 que la FDA donne l’autorisation de mise sur le marché. Les laboratoires McNeil le commercialisent sous le nom de Tylenol® puis au Royaume-Uni sous le nom de Pimadol®. En fait les entreprises qui vendaient déjà de l’aspirine (6) ne se précipitaient pas sur la fabrication de cette nouvelle molécule.
Ce fut après 1960 qu’on appuya sur le fait qu’elle ne provoquait pas de maux d’estomac contrairement à l’aspirine et que la vente décolla. En France les laboratoires Bottu mettent sur le marché le Doliprane® en 1964. Rachetés par Sanofi le succès ne vient pas tout de suite mais la décennie 1980 voit son envolée avec plusieurs formes de pharmacopées en vente.
La maitrise nationale des médicaments
L’annonce de la vente d’Opella au fond américain CD&R tombe mal pour le gouvernement. La politique volontariste de réindustrialisation dans l’hexagone et la volonté émise en 2021 en pleine crise du COVID de garantir la souveraineté sanitaire française sont mises à mal. Les ministres de l’économie et des finances sont intervenus auprès des acteurs de la coentreprise pour que malgré les 50% du fonds américain, la production des médicaments à base de paracétamol et l’emploi sur les sites de Lisieux et de Compiègne soient préservés. Enfin l’État va déclencher la procédure IEF de contrôle des investissements étrangers sur ce dossier. Cette procédure ne suffit pas. Plutôt que des déclarations médiatiques de plusieurs politiques, des actions concrètes et des investissements industriels sont capables de faire revenir en France et en Europe la chimie fine des principes actifs. En 20 ans les proportions entre l’Asie et l’Europe ont été inversées. En Asie en 2023, on compte 55% de sites chimiques en fabriquant alors que seuls 36% résistent en Europe.
Un signe de renouveau : en France, à Roussillon en Isère la société Seqens, créée en 2003 sur la reprise de certains principes actifs chimiques de Rhodia, investit en 2024 plus de 100 millions d’euros sur une plateforme chimique qui comprend deux bâtiments.
Le premier pour la synthèse du paracétamol qui va utiliser un procédé innovant en flux continu (7) permettant de travailler sur des quantités réactionnelles réduites avec moins de solvants. Le procédé a été mis au point au centre de Porcheville (Yvelines). Son efficacité est bien meilleure que celle des procédés traditionnels en Batch grâce à des gains en énergie de plus de 60% et des rejets solides et liquides divisés par 20 (8). Cet investissement subventionné par l’État à 30%, en avances remboursables, doit permettre de démarrer la production à la fin de cette année et après autorisations avec une commercialisation en 2026. Les prévisions sont de l’ordre de 10 000 à 15 000 t/an. Des contrats déjà signés avec Sanofi et UPSA garantissent l’achat d’une partie de la production mais déjà des clients européens se profilent. Reste la question du prix. Sur une boite actuelle à 2,20 € le principe actif représente moins de 10 centimes. Pour le produit français on parle de 2 à 3 centimes de plus, mais toujours moins de 5% du prix du médicament. Ceci est en discussion notamment avec UPSA qui investit dans son usine d’Agen de conditionnement. L’État s’est engagé sur un moratoire de non-baisse des prix sur les médicaments comportant le paracétamol en échange d’un approvisionnement hexagonal.
Un deuxième projet de réindustrialisation du principe actif est en cours sur Toulouse par une jeune société, Ipsophène, avec un procédé innovant (9) ) breveté par le laboratoire Ipsomedic d’Aubagne. Le démarrage est prévu pour fin 2025 avec pour objectif une production de 4000 t/an.
Souhaitons que ces actions de réindustrialisation de l’industrie pharmaceutique qui vont à contre-courant de la stratégie (10) des grands groupes à savoir se désinvestir de la chimie des médicaments à faible valeur ajoutée et gagner plus d’argent avec les biopharmaceutiques couteux, puisse réussir.
Peut-être verrons-nous comme sur les poulets label rouge, bientôt en pharmacie, sur les boites de Doliprane® ou d’Efferalgan® une petite cocarde tricolore. En fait pour répondre à la question en tête de cet édito, tant pis pour les patriotes, la qualité du paracétamol n’en fait pas une molécule française… À la limite alsacienne ? Mais hélas à l’époque en 1886 l’Alsace était allemande !
Jean-Claude Bernier
novembre 2024
Pour en savoir plus
(1) Frimas, rhumes et grippes…, J.-Cl. Bernier, éditorial, Mediachimie.org
(2) Le paracétamol, produits du jour de la Société chimique de France
(3) Fusion d'un solide ? Banc Köfler, R. Blareau et F. Brénon, vidéo Blablareau au labo et Mediachimie.org
(4) L’intelligence artificielle un moteur dans la recherche en chimie, E. Besson, fiche Chimie et …en fiche lycée, Mediachimie.org
(5) De la sérendipité à l’intelligence artificielle en recherche pharmaceutique, L. Schio, colloque Chimie et intelligence artificielle, février 2023, Fondation de la Maison de la Chimie
(6) L’aspirine une origine végétale, Mission des Herbonautes, partenariat Muséum National d'Histoire Naturelle / fondation de la Maison de la Chimie
(7) Zoom sur la chimie en flux continu, J.P. Foulon, Medaiachimie.org
(8) Pour une industrie chimique propre et durable, C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, La chimie et la sécurité des personnes, des biens, de la santé et de l'environnement, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences
(9) La jeune société Ipsophene veut installer une usine de paracétamol à Toulouse, L’Usine Nouvelle, 13/07/2023
(10) Et si Sanofi se trompait de stratégie, B. Meunier, tribune, Les Échos, 13/11/2024
Crédit illustration : © JC Bernier
Le Grand Prix : Les Jeunes Journalistes de la Chimie (GPJJC) est un concours pour les étudiants en école de journalisme, organisé par la Fondation de la Maison de la Chimie. Le concours est ouvert aux étudiants des 14 écoles reconnues par la profession (PDF), à la fois aux premières et deuxièmes années, mais également aux élèves alternants.
Comme pour la précédente édition en 2024, le but est d’élire le meilleur reportage vidéo et le meilleur article de presse d’information scientifique sur un thème d’actualité lié à la chimie, et de contribuer à faire émerger de futurs journalistes scientifiques.
La nouveauté cette année : après sélection des binômes sur les thèmes choisis par le jury, ils concourront pour le meilleur article ainsi que pour le meilleur reportage.
Un même binôme pourra donc être récompensé à la fois pour les deux catégories, les approches n’étant pas complémentaires et les travaux seront évalués indépendamment l’un de l’autre.
Un jury composé de scientifiques et de journalistes de presse écrite et audiovisuelle sélectionnera sur dossier, parmi l’ensemble des candidatures reçues, quatre binômes d’étudiants journalistes pour participer au concours. S’ensuivra une période d’investigations et de production de trois mois et l’annonce des lauréats en juin 2025.
Candidatez en binômes jusqu’au 21 mars 2025 : en savoir plus
Fin mars 2025 : Annonce des 4 binômes sélectionnés par le jury
Les vidéos et résumés des conférences du colloque Chimie et Eau sont disponibles sur Mediachimie et sur Youtube.
Le quiz post-colloque est également en ligne. À vous de jouer !
Deux nouveaux ouvrages de la collection Chimie et… sont disponibles en ligne.
Chimie et sport olympique et paralympique : téléchargez le PDF
Chimie, recyclage et économie circulaire : téléchargez le PDF
Retrouvez les derniers colloques Chimie et… dans l’Espace Colloques (livre intégral, vidéos, chapitres de conférences…).
Vous qui n’avez pas la possibilité de venir à la Fondation de la Maison de la Chimie le 6 novembre 2024, vous pouvez assister en direct au Colloque Chimie et Eau
sur Mediachimie ou sur Youtube
La captation des conférences sera par la suite disponible en ligne et leur mise à disposition sera indiquée sur la page d'accueil de Mediachimie.
Vous pouvez aussi tester vos connaissances sur le sujet avec ce quiz.
Si on reconnait l’évident avantage des voitures électriques à ne pas polluer les grandes villes (1) par l’émission de gaz à effet de serre (GES) par comparaison avec les voitures à moteur thermique, tout n’est pas aussi vert que ce que les constructeurs nous disent pour séduire nos élans de sauveurs de la planète.
Les constructeurs (et nous aussi !) ont une épée de Damoclès au-dessus de la tête !
- Obligation de ne produire que des véhicules électriques et d’arrêter les véhicules thermiques en 2035 (2)
- Obligation assortie par Bruxelles de menaces de sanction financière à partir de 2025 pour tout gramme de CO2e par km excédentaire sortant de leur production, ce qui d’après les directeurs des grandes marques européennes se chiffrerait à plusieurs dizaines de milliards d’euros ! On comprend mieux la publicité pour ces véhicules (wattures) affichant « zéro CO2e/km » (i) pour convaincre ainsi Bruxelles de leur vert(u).
Une voiture électrique est-elle écologique ?
Réfléchissons un peu : prenons l’exemple d’une citadine moderne dotée d’une batterie lithium (3) NMC de 45 kWh.
Elle consomme environ 15 à 20 kWh/100 km si elle roule en France et si la recharge y a été faite. Comme notre mix électrique (à majorité nucléaire 75%, et hydroélectrique 15%) correspond à une émission de 50 g CO2e/kWh, elle émet de façon indirecte entre 7,5 et 10 g CO2e/km (ville, route, autoroute) et non zéro.
Si elle roule en Allemagne avec un mix électrique (à majorité gaz, pétrole et charbon, 61%…) correspondant à 350g CO2e/kWh, elle va émettre entre 50 et 70 g CO2e/km. Je n’ose pas rouler en Hongrie ni en Chine où ma petite citadine dégagera entre 80 et 120 gCO2e/km, quasiment plus que son modèle thermique.
La publicité nous ment donc et j’approuve les associations de consommateurs à réclamer une meilleure information des acheteurs. D’autant que si nous nous penchons sur le cycle de vie (4) nous appuyons là où ça fait mal !
Imaginons que l’on conserve notre petite watture 16 ans (soit 2 fois 8 ans pour une durée raisonnable de la batterie) et que nous parcourions 10 000 km/an : en fin de vie, en France nous aurions émis entre 1,3 et 1,6 t CO2e. Comparons à l’émission de la même citadine thermique à la limite du malus (100 g/km) qui va émettre après 160 000 km 16 t de CO2e soit 10 fois plus. Il y a donc là un très large avantage à la voiture électrique.
Oui mais imaginons que la dépense énergétique pour fabriquer la caisse et les moteurs des deux exemplaires soit à peu près la même. Il faut y ajouter pour la « watture » la fabrication du pack de batteries. On estime qu’il faut pour sa fabrication de l’ordre de 12 000 à 15 000 kWh. Hélas la plupart des batteries sont fabriquées en Chine ce qui représente avec un mix de 550 g CO2e/kWh, 8,25 t CO2e qu’il faut ajouter aux 1,6 t soit 9,85 t à comparer aux 16 t de la citadine thermique. Ceci montre qu’en France on a intérêt à rouler en voiture électrique et, mieux encore si la batterie est issue d’une gigafactory qui se monte sur notre territoire car les 8,25 t chinoises maigriraient à 0,75 t. Cocorico vive le made in France.
Je vous laisse faire le calcul pour rouler et fabriquer en Allemagne ou en Tchéquie ou Hongrie, l’avantage s’amenuise beaucoup trop.
Quoi qu’il en soit en ajoutant la dépense de fabrication de la batterie notre « watture » est justiciable maintenant d’environ 60 g CO2e/km et non 0 g et on n’a pas pris en compte le remplacement possible du pack après 8 ans. Il est vraiment urgent que l’Etat et les constructeurs réforment l’étiquette énergie.
L’aspect économique et industriel
Á l’ouverture du Salon de l’Auto, l’industrie automobile Européenne est morose. La chute des ventes des voitures électriques en Allemagne suite à la suppression de la prime d’achat entraine une fermeture d’usines VW (une première depuis 1945). En France les ventes se tassent. Les grands PDG de Renault, Peugeot Stellantis, Volkswagen se demandent comment survivre. Car dans les ports européens arrive la déferlante chinoise, les marques BYD, MG Motor, Aiways, Leapmotor envahissent le marché européen avec des voitures électriques performantes et moins couteuses que nos modèles malgré le transport de plusieurs milliers de kilomètres. Les experts qui visitent les nouvelles usines autour de Shenzhen sont bluffés par l’armée de robots faisant virevolter les pièces et les plaçant avec précision avec quelques points de soudure. Ils sont aussi impressionnés par les presses de « gigacasting » moulant les carrosseries aluminium à haute pression. Si en 1970 les Chinois ont bien appris de l’expertise européenne des voitures et moteurs thermiques, depuis 2000 ce sont les européens qui doivent acquérir le savoir-faire chinois dans les voitures électriques et aussi dans la fabrication des packs de batteries. Car là aussi si les Européens et les Américains ont été les inventeurs des batteries lithium-ion, ce sont les Chinois qui sont devenus les maitres de la chimie des batteries NMC (Nickel, Manganèse, Cobalt) et maintenant des LFP (lithium, fer, phosphate) (5) comme CATL qui détient 38% du marché mondial. La firme chinoise consacre près de 5% de son budget à la R&D, les batteries au sodium et tout solide sont en préparation, d’où l’incertitude et l’attentisme qui gagnent les investisseurs des gigafactories européennes.
Votre mobilité personnelle
Adopterez-vous la mobilité électrique ? Une très intéressante étude de l’UFC Que Choisir (6) montre les avantages et désavantages des modèles électriques. Un prix 30% plus élevé que les modèles thermiques, mais une rentabilité économique championne si on dispose d’une prise « wall box » dans son garage avec un carburant EDF kWh Heures Creuses, à environ 0,20 €, ce qui met les 100 km à 3 € au lieu de 9 € pour la petite citadine-diesel. Malheureusement en ville, et dans les immeubles collectifs, rares sont les prises individuelles et là, comme sur autoroute les bornes affichent une moyenne de 0,60 €/kWh ce qui donne une dépense équivalente au thermique (9 € pour 100 km). De plus, pour les modèles d’autres segments - compacte, berline, SUV - le poids intervient sur la consommation et des études comparatives mettent en évidence divers points de bascule de rentabilité de 60 000 à 100 000 km entre l’électrique et le thermique. L’entretien pour un véhicule électrique est plus simple car il y a moins de pièces en mouvement comme dans un moteur thermique. Il n’est pas moins couteux car on manque d’ouvriers qualifiés en électricité et électronique en ce domaine. Le fonctionnement complexe des batteries peut aussi donner lieu à quelques « bugs » et les spécialistes de dépannage manquent encore. Tesla a ses propres spécialistes, un réseau « Revolte » a formé plus de 200 spécialistes en France chez les concessionnaires, capables de tout réparer, chargeurs, logiciels, cartes électroniques, composants des batteries… Même après un accident.
Les prix élevés des modèles électriques la diminution ou la suppression des aides à l’achat expliquent la crise actuelle qui frappe l’automobile. Heureusement le Salon de l’Auto va montrer l’émergence de nouveaux modèles Renault R5 e-tech, Citroën ë-C3 à moins de 25 000 €. Le nombre de points de recharge a aussi atteint le chiffre de 140 000 en septembre 2024, avec une répartition très variable suivant les régions, mais on en programme un million pour 2035.
Avant tout achat, prenez le temps de la réflexion. Suis-je un petit ou un gros rouleur ? Ville, autoroute ? Quelle autonomie ? Quel segment d’automobile ? Quelle consommation moyenne en kWh ? Quelle émission de CO2e ? Puis je disposer d’une borne personnelle ?
Les associations de consommateurs appellent à une meilleure information, mais soulignent que la voiture électrique n’est pas la panacée. Elles pensent que les primes à la conversion seraient mieux utilisées par les pouvoirs publics à investir dans les transports collectifs. Elles citent l’effet de rebond en Norvège où les utilisateurs de véhicules électriques prennent de moins en moins les transports en commun.
Alors ? Achetez de bonnes chaussures, graissez votre bon vieux vélo, sachez que l’exercice physique est aussi bon pour vous comme pour la planète !
Jean-Claude Bernier
Octobre 2024
(i) (CO2e) pour CO2 équivalent, unité créée par le GIEC pour mesurer et comparer les effets climatiques d’un gaz à effet de serre, sachant que les différents gaz n’ont pas le même impact sur l’effet de serre et ont une durée de vie dans l’atmosphère différente.
Pour en savoir plus
(1) La mobilité urbaine, S. Delalande, Colloque Chimie et grandes villes, 9 novembre 2016
(2) La voiture intelligente (vidéo), F. Demerliac, collection Des idées plein la tech'
(3) Le lithium, un élément chimique indispensable pour notre mobilité actuelle, É. Bausson, fiche Chimie et... en fiche lycée (Mediachimie.org)
(4) Chimie pour un développement durable, Fédération française pour les sciences de la chimie (FFC)
(5) Un Nobel de chimie populaire, J.-C. Bernier, éditorial Mediachimie.org et Accumulateur « Lithium –Ion » : une révolution technologique portable ! (vidéo), R. Blareau et F. Brénon
(6) Véhicule électrique d’indispensables révisions sur l’information et le signal prix, UFC Que choisir
Crédit illustration : © Adobe Stock Patrick J.
Réservez votre journée du mercredi 6 novembre 2024 pour participer au colloque accessible au grand public à la Maison de la Chimie.
Colloque Chimie et eau
Mercredi 6 novembre 2024
Maison de la Chimie, 28 bis rue Saint-Dominique, 75007 Paris
Depuis l’aube de l’humanité l’eau et la vie sont indissociables.
Aujourd’hui, les besoins en eau évoluent avec les modes de vie et, de façon différente, sur notre planète. Avec le changement climatique, le cycle de l’eau a lui aussi évolué. L’accès à l’eau, et encore plus à l’eau potable, est devenu un enjeu sanitaire et industriel et souvent même une source de tensions géopolitiques.
Il faut préserver la ressource en eau. La gestion de l’eau, sa qualité et les risques de pénurie sont devenus des enjeux majeurs pour les populations et les gouvernements Les industriels, notamment les industriels de la chimie, sont maintenant fortement mobilisés.
Les défis à résoudre sont nombreux, les problèmes sont multidisciplinaires, mais la place de la chimie est importante dans beaucoup des solutions actuellement mises en œuvre comme dans celles en cours de recherche et de développement. Nous avons dû limiter notre choix aux sujets qui nous semblaient actuellement les plus importants ou les plus innovants. Ils concernent l’identification et le traitement des micropolluants et des risques sanitaires, la gestion plus sobre des eaux industrielles, le recyclage et le traitement des eaux et boues usées, la préservation de l’humidité des sols, la capture de l’humidité atmosphérique…
Les conférenciers ont été choisis parmi les experts universitaires et industriels de ces domaines pour répondre avec rigueur scientifique et objectivité a ces questions qui préoccupent actuellement tous les citoyens et notamment les jeunes et leurs formateurs. Car la mise en œuvre des solutions nécessite une main d’œuvre multidisciplinaire bien formée et les choix d’orientation vers ces secteurs porteurs se font dès nos lycées de formation générale ou professionnelle.
Un temps sera consacré à de larges débats.
Danièle Olivier
Vice-Présidente de la Fondation de la Maison de la Chimie
Inscription gratuite et obligatoire : INSCRIPTIONS
En attendant le colloque :
- retrouvez le quiz Chimie et eau (avant colloque)
- parcourez une sélection de ressources disponible sur Mediachimie : Eau et Chimie
- lisez la fiche Les Chimistes dans : Les chimistes dans : les métiers de l'eau
Conception graphique : CB Defretin | Images : Adobe Stock - © Kateryna Kordubailo - © Naknakhone - © Chinnapong - © Dr_Microbe - @TensorSpark - MdBaki
Malgré le développement des outils numériques, l'usage du papier pour écrire reste omniprésent dans le monde. La production annuelle mondiale de pâte à papier est de 178 Mt et celle de la France est de 1,6 Mt.
L’histoire du papier débute en Chine : Tsaï Loun ministre de l’Agriculture chinoise au IIIe siècle avant notre ère décrit la fabrication du papier à partir de l’écorce de bambou, de lin, de chanvre. Puis c’est le chimiste français Anselme Payen qui isole la cellulose sous forme de fibres blanches en 1838. […]
Accédez au Zoom sur les techniques de blanchiment de la pâte à papier
Crédit illustration : F. Brénon
Décidément la prestigieuse académie suédoise est séduite par l’intelligence artificielle. Après le prix Nobel de physique décerné à deux spécialistes des réseaux de neurones en électronique avancée, le prix Nobel de chimie a récompensé des chercheurs qui se sont servis de l’intelligence artificielle pour transformer les recherches sur les structures tridimensionnelles des protéines. La moitié du prix a été décerné à 2 spécialistes, un anglais Demis Hassabis et un américain John Jumper qui appartiennent tous deux à l’entreprise Google DeepMind pour y avoir développé un programme d’IA nommé « AlphaFold » qui permet de prédire la structure complexe des protéines à partir de données sur des acides aminés. L’autre moitié du prix revient à David Baker, un biochimiste de l’université Washington à Seattle, qui réussit à concevoir des protéines entièrement nouvelles.
Ces découvertes ont une importance primordiale en biologie, car les protéines sont les molécules de la vie, elles sont dans les muscles qui nous donnent la force, dans les anticorps qui nous protègent des maladies et aussi dans celles qui lisent et copient l’ADN.
On se rappelle tous les études des structures par cristallographie à Grenoble à l ESRF ou à Saclay sur SOLEIL complétées par RMN, elles pouvaient prendre plusieurs mois. Ces travaux menés depuis plus de 40 ans dans tous les pays ont permis de nourrir une base de données internationale qui contient plus de 200 000 protéines avec leurs structure. C’est le fruit de plusieurs décennies de recherche, mais c’est encore peu en comparaison des 100 fois plus de protéines existant dans la nature.
Les protéines sont comme des chaines ou des colliers dont les maillons ou les perles sont des acides aminés. La façon dont elles s’enroulent est très importante, on parle de repliement de la protéine, qui lui donne ses propriétés. Avec le programme Alphafold en rentrant une séquence d’acides aminés, l’IA donne la structure tridimensionnelle de n’importe quelle protéine.
David Baker procède presque à l’inverse du programme Alphafold de ses collègues de Google Deepmind. On propose une structure 3D que l’on veut produire et son programme optimise la séquence d’acides aminées qui pourrait donner une protéine stable. C’est ainsi qu’il a développé une protéine nouvelle capable de bloquer la protéine Spike responsable du Covid-19. On voit là un champ immense qui s’ouvre pour la recherche de nouveaux médicaments en sachant l’importance des formes des récepteurs pour affuter des protéines sachant les copier afin d’annihiler les protéines dysfonctionnelles que nous avons dans notre corps lors d’une maladie.
La Fondation de la maison de la chimie avait déjà bien perçu l’importance de l’IA pour la chimie ; elle avait sensibilisé en février 2023 le grand public et les jeunes lycéens sur ce sujet brûlant au sein d'un colloque Chimie et Intelligence artificielle. Citons notamment les 2 conférences plénières de François Xavier Coudert, directeur de recherche CNRS, professeur attaché ENS – Université PSL, et de Carlo Adamo, Directeur Institute of Chemistry for Life and Health Sciences (i-CLeHS) – Chimie ParisTech, et la conférence de clôture de Cédric Villani, Université Lyon I, Institut des Hautes Études Scientifiques.
L’intelligence artificielle en recherche ne remplace pas le chercheur mais elle lui permet de manipuler des millions de données en un temps record c’est un accélérateur de découvertes !
Jean-Claude Bernier
Octobre 2024
Pour en savoir plus
Colloque Chimie et intelligence artificielle, Fondation de la maison de la chimie, février 2023, accès aux videos et articles des conférences sur Mediachimie.org
Concepts d’IA et Machine Learning ; utilisation en chimie ; les méthodes d’IA comme nouveau langage, François Xavier Coudert, article et vidéo, Colloque Chimie et intelligence artificielle, Fondation de la maison de la chimie, février 2023
L’Intelligence Artificielle comme moteur dans la recherche en chimie, Carlo Adamo, article et vidéo, Colloque Chimie et intelligence artificielle, Fondation de la maison de la chimie, février 2023
Intelligence artificielle pour la science et l’industrie, Cédric Villani, article et vidéo, Colloque Chimie et intelligence artificielle, Fondation de la maison de la chimie, février 2023
L'intelligence artificielle, un moteur dans la recherche en chimie !, Éric Bausson, Fiche Chimie et… en fiches lycée, Mediachimie.org
La Fête de la science 2024 se tiendra en France métropolitaine du 4 au 14 octobre. La thématique mise à l’honneur cette année est « Océan de savoirs ».
Des milliers de scientifiques, enseignants, médiateurs culturels, bibliothécaires partagent avec les publics leur enthousiasme et leur curiosité pour les sciences, les techniques et les innovations à travers de multiples animations. Les activités proposées par chaque région de France et d’Outre-mer sont consultables sur le site https://www.fetedelascience.fr/.
Mediachimie.org accompagne également cette fête de la science 2024 en vous proposant une sélection de ressources en relation avec cette thématique : voir la page Eau et Chimie.
N’oubliez pas de vous inscrire au colloque Chimie et eau du 6 novembre à la Fondation de la maison de la chimie : Colloque Chimie et eau - mercredi 6 novembre 2024. Le colloque sera également retransmis en direct toute la journée sur la chaîne YouTube de mediachimie.org.
Crédit : llustration : Capture écran site fetedelascience.fr
Quoi de plus simple et anonyme que la molécule H2O, elle est pourtant vitale (1). Notre corps en contient plus de 65% soit 45 litres si vous pesez 70 kg. Sur notre bonne vieille planète l’eau est essentiellement sous forme d’eau salée, 97,5% (mer et océans), et l’eau douce ne représente donc que 2,5%. Mais seulement 30% de cette eau douce constitue les nappes phréatiques et les rivières, le reste étant sous forme de glace ou de neige.
En France ce sont des milliers de rivières, fleuves, cours d’eau et ruisseaux qui serpentent sur 500 000 km et sous nos pieds 2000 milliards de m3 sont stockés dans nos nappes phréatiques. Sans eau il n’y a pas de vie et on sait quel rôle essentiel elle joue dans notre alimentation, nos sources d’énergie (2) et notre industrie. Rien d’étonnant alors que les épisodes de sécheresses, de cumuls de précipitations, de pollutions, de pressions agricoles et urbaines trouvent de larges échos dans les médias et l’opinion. Pour répondre à ces problèmes y a t-il encore de la recherche sur les technologies liées à l’eau ? Essayons par trois exemples d’esquisser une réponse.
La lutte contre les espèces exotiques envahissantes
C’est un véritable fléau à l’échelle mondiale ! Ces espèces étouffent la vie aquatique, gênent l’écoulement dans les rivières et canalisations et sont sources de dégâts à l’environnement et de pertes économiques. Claude Grison et son laboratoire montpelliérain en étudiant des espèces comme la laitue de mer et la Jussie d’eau ont découvert qu’une bonne partie de la plante était au contraire capable de dépolluer l’eau (3). Transformées en fine poudre, elles sont des filtres très efficaces pour récupérer des métaux comme le palladium, le manganèse, le zinc et le nickel. Elles peuvent aussi être utilisées pour la récupération de polluants comme les herbicides.
La valorisation de ces découvertes est réalisée par une startup qui va transformer ces poudres gorgées de microparticules métalliques comme catalyseurs pour diverses réactions chimiques industrielles en remplacement de ceux issus des extractions minières. L’équipe de Montpellier espère avec ses partenaires industriels monter en puissance ces solutions de dépollution grâce à ces plantes envahissantes dont la croissance risque d’être accélérée par le changement climatique.
La pollution chimique organique
La chimie analytique a fait d’énormes progrès depuis 20 ans. Les procédés de séparation, d’extraction, et de caractérisation ; chromatographie inverse ou d’exclusion, spectrographies de masse… permettent d’identifier les polluants à des concentration très faibles comme le ppb (microgramme par kilo) et même moins. On est donc capable de caractériser les micropolluants (4) dans l’eau. Hélène Budzinski et son laboratoire de Bordeaux, l’EPOC, savent caractériser des milliers de molécules organiques. Mais d’après elle, alors qu’il y en a des millions, un enjeu de taille se dresse pour les chercheurs en chimie analytique : comment analyser ce qui n’est pas encore connu ! Ce projet novateur se fait en collaboration avec la régie de l’eau de Bordeaux (5). Il va demander de grands progrès méthodologiques de séparation et d’identification pour anticiper des actions sur des polluants potentiellement toxiques dont la recherche et l’analyse ne sont pas encore réglementées. Le challenge va aussi plus loin car on peut observer des effets sur la santé, la faune, l’environnement sans identifier les polluants et l’inverse est aussi possible. Un pesticide n’est peut-être pas en cause puisque l’effet escompté n’est pas constaté mais le mélange avec d’autres herbicides par un effet cocktail peut être impactant. S’y ajoutent des conditions environnementales, pH, température, turbidité… qui peuvent intervenir. Le projet de recherche mené par le CNRS, la régie de l’eau et l’office français de la biodiversité va essayer de caractériser par la chimie couplée à des bio-essais l’impact de rejets dans un affluent de la Garonne.
La prédiction des ressources et de la consommation
La recherche d’une meilleure qualité de l’eau au robinet c’est bien, mais la disponibilité de la ressource, son usage, sont aussi pour les collectivités locales une préoccupation constante (6). On l’a vu cet été lors du stress hydrique de certains départements et villes du sud de la France. C’est ainsi qu’un laboratoire de Mathématique du CNRS à Nice travaille avec la régie Eau Azur sur un projet complexe. Comment modéliser la prévision des demandes en eau des usagers au moins trois semaines à l’avance et aussi en amont prévoir le niveau des nappes phréatiques sur plusieurs mois.
Un premier modèle s’appuyant sur des méthodes statistiques classiques et sur un traitement des données par intelligence artificielle fournit des prévisions à six jours encore loin des six mois ! Mais il y a un réel intérêt scientifique à développer un outil mathématique de pointe pour traiter un sujet concret et utile. Le problème est bien sûr les prédictions météorologiques aléatoires qui influencent les niveaux des nappes. Mais la prédiction du stock disponible et du prélèvement permettra d’arrêter ici les pompes, là de les conserver, sans risques de pannes et des couts associés à ces défaillances et aux réparations. L’objectif pour les collectivités locales est de mieux gérer l’eau actuelle et future, prévoir la demande et dimensionner de nouveaux réservoirs si nécessaire.
En France la recherche dans la filière eau rassemble plus de 200 laboratoires et près de 3000 personnes à travers le CNRS, le BRGM, l’INRAE et plusieurs universités (7). Il s’agit d’accroître les connaissances sur les polluants, leur détection et leur élimination, les risques naturels, inondations et sécheresse, la valorisation des eaux usées, les réseaux de distribution intelligents, les nouveaux matériaux d’infrastructure de canalisation et les accès aux ressources. Le PEPR (Programme et équipements prioritaires de recherche) « One water - eau bien commun » financé sur 10 ans accélère la recherche académique et industrielle en ce domaine. Il sera décrypté lors du colloque « chimie et eau » du 6 novembre prochain.
Jean-Claude Bernier
Septembre 2024
Pour en savoir plus
(1) L’eau, une ressource essentielle à la vie, D. Soissons, dossier Nathan / Fondation de la Maison de la Chimie (Mediachimie.org)
(2) L’eau et l’énergie sont-elles dépendantes ?, A. Charles, N. Baffier et J.-C. Bernier, fiche Chimie et… cycle 4 (Mediachimie.org) et Pourquoi économiser l’eau potable est-il aussi source d’économie d’énergie ? F. Brénon et O. Garreau, Question du mois (Mediachimie.org)
(3) Zoom sur la phytoremédiation des métaux lourds, J.P. Foulon, Zoom sur… (Mediachimie.org)
(4) L’eau, sa purification et les micropolluants, M. Coquery et S. Martin Rue, in Chimie et nature (EDP Sciences) 2012, isbn : 978-2-7598-0754-3
(5) La bataille de l’eau propre, C. Agouridas, J.-C. Bernier, D. Olivier et P. Rigny, in La chimie et la sécurité des personnes, des biens, de la santé et de l'environnement, collection Chimie et... Junior, EDP Sciences, Fondation de la Maison de la Chimie
(6) L’eau ressource indispensable pour la ville, A. Charles, A.Harari et J.-C. Bernier, fiche Chimie et… cycle 4 (Mediachimie.org)
(7) Les chimistes dans les métiers de l’eau, F. Brénon et G. Roussel, série Les chimistes dans… (Mediachimie.org)
Crédits :
- Figure : répartition de l'eau sur Terre. DR.
- Illustration : Goutte d’eau, José Manuel Suárez/Wikimedia Commons CC BY 2.0