Mediachimie | Mon beau sapin

Date de publication : Lundi 21 Décembre 2020
Rubrique(s) : Éditorial

En cette fin d’année l’expression « ça sent le sapin » doit perdre son sens argotique pessimiste et plutôt se compléter par « ça sent bon le sapin de Noël ». À l’approche du 25 décembre 2020 nous avons besoin d’une bouffée d’optimisme et, même si nous sommes déconfinés ou confinés, le sapin traditionnel dans le salon va agir comme une douce thérapie.

Nous l’avons acheté « bio », ou même « loué » si nous sommes d’abord écologistes, puis décoré avec nos guirlandes aluminisées et celles parsemées de LED multicolores.

Nous avons ainsi déjà profité de ses odeurs fraiches et boisées (1). Le pin sylvestre dégage plus de 44 composés olfactifs (2). Le principal responsable est la pinène (C10H16), présente sous ses deux formes isomères α et β. L’α-pinène présente dans l’essence de térébenthine est aussi connue comme antiseptique présente aussi dans la sauge. L’autre odeur fraiche du sapin est celle de l’acétate de bornyle à l’odeur de résine fraîche, utilisé aussi dans les parfums ou les désodorisants. Synthétisé par plusieurs conifères il est aussi utilisé en phytothérapie pour ses propriétés sédatives (3).

On notera en passant que la structure des molécules peut avoir une influence forte sur la chaine cellules olfactives - transmissions nerveuses au cerveau et - codes de reconnaissance. C’est le cas par exemple des deux énantiomères S-(-) limonène α et R–(+) limonène β : le premier à l’odeur de citron et le second à l’odeur d’orange (4).

Mais il n’y a pas que le sapin et ses parfums pour vous réconforter en cette période de Noël. Il y a bien sûr l’odeur du chocolat chaud qui contient des polyphénols excellents pour l’organisme mais aussi des endorphines stimulantes et euphorisantes idéales en hiver (5).

Ainsi le pain d’épices avec le gingérol du gingembre, mais aussi sa saveur douce, sucrée et légèrement épicée et due à la zingérone qui s’est développée durant la cuisson.

Si vous aimez les marrons chauds, lorsqu’elles sont grillées les châtaignes dégagent quantité de composés volatils par réactions à haute température. La chaleur développe aussi diverses molécules dont le ? butyrolactone qui donne en bouche un léger gout sucré caramélisé ainsi que le furfural qui apporte le côté boisé avec une légère odeur d’amande (6).

Vous aurez aussi pour vous réchauffer un incontournable des marchés de Noël, hélas si peu nombreux cette année, le vin chaud. Même sans en abuser vous reconnaitrez son odeur avec les vapeurs d’alcool qui entrainent les parfums d’agrume, l’aldéhyde cinnamique et les phénols comme l’eugénol de la cannelle.

Voilà une thérapie simple et joyeuse pour les fêtes (7). Si vous n’avez pas de sapin, la chimie extractive peut vous fournir les huiles essentielles pour une aromathérapie. Vous avez le choix entre l’huile essentielle de coriandre, l’essence d’orange douce, ou les extractions de cannelle de Ceylan ou encore de sapin bouvier : alors à vos diffuseurs, mais attention comme dans tout traitement c’est la dose qui compte (8) !

Joyeuses fêtes.

Jean-Claude Bernier
Décembre 2020

Pour en savoir plus :
(1) Quand la chimie a du nez  (vidéo)
(2) Les méthodes de mesure des odeurs : instrumentales et sensorielles
(3) Un exemple de production de substances actives : le pouvoir des plantes
(4) Zoom sur la chiralité et la synthèse asymétrique
(5) Les emplois thérapeutiques du chocolat
(6) Sucre et huile : des ingrédients clés pour la chimie biosourcée
(7) La nature pour inspirer le chimiste : substances naturelles, phytochimie et chimie médicinale
(8) La bonne chimie est-elle dans le bon dosage ?