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Zoom sur les sources des acides gras et leurs effets sur la santé

Collection : Zooms sur...
Mots clés : acides gras, saturés, insaturés, cis, trans, linoléique, alpha linoléique, eicosapentaénoïque (EPA), docosahexaénoïque (DHA), huile végétale, poissons gras, stockage, énergie, membranes cellulaires
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Certains acides gras sont indispensables car l’organisme humain ne peut pas les synthétiser, comme les acides linoléique et alpha-linolénique, dits « essentiels », ou ne peut presque pas les synthétiser, comme les acides eicosapentaénoïque (EPA) et docosahexaénoïque (DHA) (1).

Les autres acides gras peuvent être synthétisés par l’organisme humain et peuvent aussi être apportés par l’alimentation. Ils ne sont pas indispensables, mais ils sont utiles (1).

Lorsqu’on parle « d’aliments riches en acides gras », il s’agit d’une simplification, car en réalité les acides gras n’y sont pas libres, mais estérifiés sous forme de triglycérides (2) et y sont généralement présents en mélanges.

Sources alimentaires des acides gras insaturés

On trouve majoritairement des acides gras oméga-3 dans les huiles de certains végétaux ainsi que dans les poissons gras. Par exemple : l’acide alpha-linolénique est présent dans les huiles de noix, de colza, de soja et de lin ; l'EPA (C20H30O2) et le DHA (C22H32O2), acides polyinsaturés sont présents en grande quantité dans les poissons gras (maquereau, saumon, sardine, hareng, anchois…) et dans l'huile de poisson (morue...).

Les aliments les plus riches en oméga-6 sont la viande rouge, la volaille, le poisson et les œufs. On les trouve aussi dans le maïs, le soja et d’autres huiles végétales, comme l’huile de tournesol particulièrement riche en acide linoléique

L’acide oléique, qui est un oméga-9, est très majoritairement présent dans l’huile d’olive et est aussi présent dans une moindre mesure dans l’huile de tournesol. L’organisme des mammifères est capable de biosynthétiser des acides gras divers à partir de cet acide.

En ce qui concerne les acides gras trans (voir la définition dans le Zoom sur les acides gras dans tous leurs états (2)), ils sont présents naturellement dans la viande et les produits laitiers des ruminants, mais ils sont également produits industriellement par hydrogénation partielle de diverses huiles végétales. On les retrouve ainsi dans les margarines et dans de nombreux aliments transformés (produits de panification, viennoiseries, quiches, barres chocolatées…).

Sources alimentaires des acides gras saturés

Les acides gras saturés sont regroupés par familles : les très courts comme l’acide butyrique (en C4) présent dans le beurre, les chaînes moyennes de C6 à C10, les chaînes longues de C12 à C16 comme l’acide palmitique C16H32O2 et enfin les chaînes très longues de C18 à C24 comme l’acide arachidique C20H40O2.

Ils sont présents dans un certain nombre de graisses végétales et animales.

Les acides gras saturés circulant dans l’organisme proviennent en partie d’une synthèse endogène à partir des sucres ; ce sont particulièrement les cas des acides de C16 à C24.

Rôles des acides gras dans l’organisme

Les acides gras jouent deux rôles majeurs :

  • un rôle structural : ils entrent dans la composition des membranes des cellules et y assurent notamment la fluidité, en particulier les acides gras insaturés.
  • un rôle de stockage de l’énergie.

 

Acides gras et structures des membranes cellulaires

Les acides gras à longues chaînes (contenant plus de 18 carbones) entrent dans la constitution des membranes biologiques sous forme de phospholipides ou de sphingolipides.

Ces membranes, dites phospholipidiques, sont constituées d’une bicouche de phospholipides entourant la cellule. Un phospholipide est un lipide contenant un groupe ester d’acide phosphorique. Les premiers phospholipides isolés de tissus vivants ont été caractérisés en 1847 par le chimiste français Nicolas Gobley à partir de jaune d'œuf (Fig. 1).

Lécithine
Figure 1 : lécithine C42H80NO8
 

La plupart des phospholipides sont des phosphoglycérides, dont la tête présente un résidu glycérol-3-phosphate estérifié par une molécule polaire, et les deux queues sont les chaînes aliphatiques de deux acides gras. Ainsi, les deux chaînes lipidiques de la lécithine sont liées au glycérol et l’une est linéaire (acide stéarique), l’autre est coudée par une double liaison cis (acide oléique).

Ils sont les constituants essentiels des membranes cellulaires où ils s'organisent en bicouches lipidiques dans lesquelles les queues lipidiques hydrophobes sont orientées vers l'intérieur de la bicouche tandis que les têtes polaires, hydrophiles, forment les deux surfaces externes de la bicouche.

Les structures dans l’espace des acides gras jouent un rôle déterminant sur les caractéristiques et les propriétés de ces membranes cellulaires, en particulier leur souplesse et leur flexibilité, qui sont très importantes pour le bon fonctionnement des différentes protéines membranaires chargées de la communication entre l’intérieur et l’extérieur de la cellule, tels les récepteurs membranaires, les canaux ioniques qui sont ancrés dans la membrane.
 

Ainsi par exemple l’acide EPA  (C20H30O2) qui a une structure capable de s’enrouler (Fig. 2) présente une souplesse et une fluidité très importante sur le plan biologique au niveau des membranes cellulaires (1).

Acide EPA
Figure 2 : acide EPA. Source : Sciencationelle — Travail personnel, licence CC BY-SA 4.0, Wikimedia commons
 

Notons par ailleurs, que le cholestérol, outre ses fonctions de régulation du métabolisme, participe aussi à la bonne organisation et la bonne stabilisation de la membrane cellulaire.

Les acides gras saturés et les insaturés trans forment des assemblages plus compacts, donnant de la rigidité à l’ensemble, tandis qu’une double liaison cis écarte les chaînes les unes des autres donnant de la souplesse et de l’élasticité à l’ensemble.

Les autres phospholipides sont les sphingolipides, qui dérivent structurellement de la sphingosine (Fig. 3) et non du glycérol. Si l’azote de la sphingosine est acylé par un acide gras, on a un céramide ; et si l’alcool primaire de la sphingosine est en outre porteur de phosphocholine (Fig. 4), on a des sphingomyélines, la sphingosine constituant l'une des deux queues aliphatiques.

sphingosine 
Figure 3 : sphingosine
 

phosphocholine 
Figure 4 : phosphocholine
 

 

Cette variété d’acides gras et la diversité de leurs fonctions, qu’ils soient biosynthétisés par les organismes ou qu’ils proviennent de leur alimentation, ont de multiples fonctions biologiques et jouent un rôle très important pour la santé des organismes et la structure des membranes cellulaires.

Acides gras et stockage de l’énergie

Sous forme de triglycérides ils sont stockés notamment dans les tissus adipeux. L’organisme va puiser dans ces stocks. Ces triglycérides subissent une lipolyse qui libère les acides gras, qui vont produire de l'énergie sous forme d'ATP, par β-oxydation (processus aérobie (3)).

Consommation et recommandations

Les connaissances sur les liens entre santé et acides gras ont beaucoup évolué aux cours de ces 20 dernières années ainsi que les recommandations en termes de consommation.

D’après l’ANSES, « les lipides totaux, constitués d'unités de base appelées « acides gras » doivent représenter 35 à 40 % de l'apport énergétique ingéré chaque jour [...]. Cette fourchette permet d'assurer la couverture des besoins en acides gras essentiels et indispensables et prend en compte la prévention des pathologies » (4).

L’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS) recommande un rapport de cinq oméga-6 pour un oméga-3. Ces acides gras agissent de manière complexe dans l'organisme. Les métabolites issus des oméga-6 sont pro-inflammatoires, prothrombotiques et hypertenseurs tandis que ceux issus des oméga-3 ont globalement un effet inverse.

Par leurs structures linéaires peu souples, les effets nocifs des graisses saturées et des graisses insaturées trans sont mieux établis que pour presque toutes les autres substances alimentaires : des doses très faibles de certains de ces corps gras accroissent de manière significative le risque de maladies cardiovasculaires. Ainsi l’OMS conseille aux adultes de limiter la consommation d’acides gras trans à moins de 1 % de l’apport énergétique total (AET), soit moins de 2,2 g par jour, pour 2000 calories (5).

Concernant les acides gras saturés, ils ne constituent pas une famille homogène car ils ont des origines, des métabolismes et des fonctions différentes. Il faut distinguer les acides gras saturés à chaîne courte et moyenne (de 4 à 10 atomes de carbone), présents principalement dans la matière grasse laitière, rapidement utilisés par le foie, qui sont peu stockés et qui n’augmentent pas le taux de cholestérol, des acides gras saturés longs (de 12 à 18 atomes de carbone). Trois d’entre eux ont des rôles biologiques spécifiques importants : l’acide myristique (C14H28O2) a entre autres un rôle fonctionnel majeur pour la cellule ; l’acide stéarique (C18H36O) très présent dans la viande et le lait des ruminants, est transformé dans l’organisme en acide oléique et a un effet neutre sur le cholestérol ; enfin l'acide palmitique est utilisé préférentiellement pour synthétiser de l’ATP et produire des acides gras plus longs (6).

Compte tenu des nouvelles données scientifiques, il est maintenant recommandé (ANSES mars 2023) que la part des acides gras saturés totaux soit inférieure ou égale à 12 % de l’AET, mais 3 acides gras se différencient des nouvelles recommandations parce qu’ils sont susceptibles d’augmenter le risque cardio-vasculaire lorsqu’ils sont consommés en excès : il s’agit des acides laurique (C12H24O), myristique et palmitique.

En résumé, les acides gras et leurs dérivés ne sont donc pas qu’une source d’énergie pour les organismes ; ils jouent des rôles essentiels, structuraux ou métaboliques, et sont bénéfiques ou non pour l’organisme selon leurs structures.

 

Pour en savoir plus

(1) Chimie, biologie, métabolisme, le trio gagnant pour comprendre la nutrition, conférence par Jean-Michel Lecerf, Colloque Chimie et alimentation (février 2025)

(2) Zoom sur les acides gras dans tous leurs états : saturés/insaturés, cis/trans, ω-3/ ω-6/ ω-9, B. Bodo et F. Brénon, Mediachimie.org

(3) Quelle chimie dans le sport ? Épisode 1 : le métabolisme énergétique aérobie, vidéo Blablareau / Mediachimie

(4) ANSES Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail
- [4.a.] Les acides gras trans
- [4.b.] Les lipides

(5) OMS recommandation acides gras trans

(6) Les dernières recommandations en lipides : de la théorie à l’assiette (PDF) - Symposium (2013) sur °C.E.R.I.N Centre Recherche et Information Nutritionnelles

 

Crédit illustration : anaumenko / Adobe Stock

Auteur(s) : Bernard Bodo et Françoise Brénon
Niveau de lecture : pour tous
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